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Sous le regard des trois Blancheurs, suivre Jésus et Marie fut-ce au milieu des pires tempêtes, mais dans la paix, la joie et l'amour.
 
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 La lettre de l'enfer

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AuteurMessage
Philippe
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Philippe


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Localisation : Maisons Laffitte

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MessageSujet: La lettre de l'enfer   La lettre de l'enfer EmptyDim 1 Avr - 9:20

DU PAPE QUI NIE L’ÉTERNITÉ DE L'ENFER

http://www.ephphata.net/lettres-de-l-au-dela/Lettre-a-d-recit.html

la lettre de l'au-delà…
 

J'avais une amie, ou plutôt, nous étions en contact pour raison de travail à [……]. Nous étions ensemble, l'une à côté de l'autre, dans une maison de commerce.
Puis Annette se maria et je ne la vis plus.
Dans le fond, il régnait entre nous deux, depuis le début, plutôt de la courtoisie que de l'amitié. Je n'en ressentis, à cause de cela, que bien peu de privation quand elle alla, après son mariage, habiter un quartier de la ville de [……] très éloigné de ma demeure.

Pendant l'automne de 1937, je passai mes vacances au bord du lac de Garde ; ma mère m'écrivit vers la fin de la seconde semaine de septembre : « Pense donc ! Annette est morte dans un accident d'automobile. Elle a été enterrée hier au « cimetière du Bois ».
Une telle nouvelle m'épouvanta. Je savais qu'elle n'avait jamais été très religieuse. Etait-elle prête quand Dieu l'appela ainsi à l'improviste ?
Le matin suivant, j'entendis la Sainte Messe pour elle dans la chapelle des sœurs où j'avais pris pension. Je priai avec ferveur pour la paix de son âme et offrai aussi ma communion à cette intention. Mais pendant la journée, j'éprouvai un certain malaise qui augmenta vers le soir, encore plus.
Je m'endormis inquiète. Finalement, je fus réveillée comme par un coup violent. J'allumai la lumière… la pendule marquait minuit dix. Je ne vis personne ; aucun bruit ne s'entendait dans la maison. Seules les eaux du lac de Garde se brisaient d'une façon monotone sur la rive du jardin de la pension. On n'entendait pas même une brise de vent…
Pourtant, au moment de mon réveil subit, en plus du coup, j'avais cru percevoir un bruit comme celui du vent, semblable à celui qui se produisait quand mon chef de bureau, agacé, me passait une lettre de mauvaise manière.
Je me retournai de l'autre côté, récitai quelques Pater pour les âmes du Purgatoire et me rendormis…
[…]
Je m'étais levée le matin vers 6 heures pour aller à la chapelle de la maison, quand, en ouvrant la porte de ma chambre, j'aperçus une liasse de papier à lettre.
La ramasser, reconnaître l'Ecriture d'Annette et jeter un cri ne fut qu'une même chose. Les feuilles en main, j'étais tremblante. Je compris qu'avec un tel état d'esprit, je ne pourrais pas même dire un Pater, d'autant que je fus également assaillie comme par une sensation asphyxiante.
Je ne trouvai pas de meilleure solution que de sortir dehors à l'air. J'ordonnai un peu mes cheveux, je cachai la lettre dans mon sac et laissai la maison.
Une fois dehors, je grimpai par le sentier qui, de là, à partir de la route s'élève vers la montagne parmi les oliviers, les jardins des villas et les buissons de lauriers.
Le matin se levait lumineux. Les autres fois, tous les cent pas, je m'extasiais sur la vue magnifique qui, de là, s'ouvrait sur le lac et l'île de Garde, belle comme une fable. La merveilleuse couleur bleue de l'eau transparente me délassait toujours. Et je regardais étonnée, la blanche montagne Baldo qui, de l'autre côté, s'élevait lentement de 64 mètres au-dessus du niveau de la mer jusqu'à plus de 2 200 mètres.
Maintenant, au contraire, je n'avais aucun regard pour tout cela. Après un quart d'heure de route, je me laissai tomber mécaniquement sur un banc qui s'appuie sur deux cyprès où encore, deux jours auparavant, j'avais lu avec tant de plaisir la « Junger Thérèse » de Federer (« Thérèse, la jeune fille d'âge mûr » de H. Federer - 1923) Alors, pour la première fois, je ressentis que les cyprès étaient les arbres des morts ; ce qu'auparavant, dans les pays du Sud où ils se voient souvent, je n'avais jamais soupçonné.
Je pris la lettre. La signature manquait, mais c'était très certainement l'écriture d'Annette. Il ne manquait pas même l'ample boucle ornementale des "S" et des "T" dont elle avait pris l'habitude au bureau pour contrarier monsieur Gr. Le style n'était pas le sien, ou tout du moins, elle ne parlait pas comme à son habitude, parce qu'elle savait converser d'une façon extraordinairement aimable et rire de ses yeux célestes. C'était seulement quand nous discutions de questions religieuses qu'elle pouvait devenir venimeuse et prendre le ton dur de cette lettre. Voici qu'en la jugeant ainsi, je subis moi-même l'amertume de son style impitoyable.
 
Cet écrit du monde de l'Au-delà, je le rapporte ici, littéralement comme je l'ai lu alors. Il se présentait ainsi :
« Claire, ne prie plus pour moi ! Je suis damnée. Si je te le communique et t'en réfère plutôt longuement, ne crois pas que cela soit à titre d'amitié. Nous, ici, nous n'aimons plus personne. Je le fais comme contrainte à bien faire car « je suis du côté de cette puissance qui toujours veut le Mal et fait le Bien » (Parole de Méphistophéles dans « Faust » de Gœthe.)
En vérité, je te voudrais voir aussi aboutir à cet état où moi, désormais, j'ai jeté l'ancre pour toujours.
Ne t'étonne pas de cette intention, ici, nous pensons tous ainsi ; notre volonté est fixée dans le mal -tout du moins, en ce que, vous, vous appelez le mal- aussi, quand nous faisons quelque chose de « bien », comme moi maintenant, en t'ouvrant tout grands les yeux sur l'enfer, cela ne procède pas d'une bonne intention.
Te souviens-tu qu'il y a quatre ans, nous nous sommes connues à [……] ? Tu avais alors 23 ans et tu te trouvais là depuis six mois quand j'arrivais.
Tu me tirais de quelque embarras ; en tant que débutante, tu me donnais de bonnes adresses. Mais que veut dire « bon » ? Je louais alors ton… « amour du prochain ». Ridicule !
Ton secours dérivait d'une pure courtoisie comme du reste, déjà, je le soupçonnais. Ici, nous ne connaissons rien de bon, en personne.
Tu connais le temps de ma jeunesse. Je comblerai quelques lacunes. Selon le plan de mes parents, à dire vrai, je n'aurais jamais dû exister. Ce fut pour eux, proprement, une « disgrâce ». Quand j'arrivai au monde, mes deux sœurs avaient 14 et 15 ans.
Puissé-je n'être jamais née ! Puissé-je maintenant être anéantie et fuir ces tourments ! Aucune volonté n'égalerait celle avec laquelle je laisserais mon existence comme un vêtement de cendre, se répandant dans le néant.
Mais, je dois exister. JE dois exister ainsi, comme je me suis faite, avec une existence manquée.
Quand papa et maman, encore jeunes, quittèrent la campagne pour la ville, tous deux avaient perdu le contact avec l'Eglise, et ils sympathisèrent avec des gens éloignés de la foi ; ce fut mieux ainsi.
Ils s'étaient connus dans un lieu dansant et six mois après, ils "durent" se marier. De la cérémonie nuptiale, il ne leur resta que juste assez d'eau bénite pour que maman allât à la messe du dimanche, environ deux fois par an. Elle ne m'a jamais enseigné à prier vraiment, tout se terminait avec les soucis de la vie quotidienne, bien que notre condition fût aisée.
Des mots comme « prier », « messe », « eau bénite », « église », je les écris avec une répugnance intérieure sans pareille. J'abhorre tout cela, comme j'abhorre ceux qui fréquentent l'Eglise, et en général tous les hommes et toutes les choses. De tout, en effet, nous vient le tourment. Chaque connaissance, chaque souvenir de choses vues et sues est pour nous la cause d'une flamme cruelle. Dans chacun d'eux, en particulier, nous voyons le côté qui était Grâce, Grâce que nous avons méprisée.
Quel tourment est cela !
Nous ne mangeons pas ; nous ne dormons pas ; nous ne marchons pas avec les pieds. Spirituellement enchaînés, nous regardons, hébétés, avec hurlement et grincement de dents, notre vie manquée, haïssants et tourmentés !
M'entends-tu ? Nous buvons la haine comme l'eau ; la haine, même entre nous.
Surtout, nous haïssons Dieu. Je veux te l'expliquer. Les bienheureux, au Ciel, ne peuvent pas ne pas l'aimer parce qu'ils le voient sans voile, dans sa beauté éblouissante. Cela les rend tellement heureux qu'il est impossible de le décrire. Nous le savons, et cette connaissance nous rend furieux.
Les hommes sur la terre, qui connaissent Dieu par la création et par la révélation, peuvent l'aimer, mais ils n'y sont pas contraints.
Le croyant, je le dis en grinçant des dents, qui, en méditant, contemple le Christ en croix, bras tendus, finira par l'aimer.
Mais celui vers lequel Dieu s'avance seul comme un ouragan, comme punisseur, comme juste vengeur parce qu'un jour, il a été répudié par Lui, ainsi qu'il est advenu de nous, celui-là ne peut que le haïr, avec toute l'impétuosité de sa volonté mauvaise, éternellement. Le haïr avec la vigueur d'une libre résolution d'être séparé de Lui, résolution avec laquelle, en mourant, nous avons exhalé notre âme, et que, pas même maintenant, nous ne retirerions et que jamais nous n'aurons la volonté de retirer.
Comprends-tu maintenant pourquoi l'enfer dure éternellement ? C'est parce que notre obstination ne cessera jamais.
Contrainte, j'ajoute que Dieu est miséricordieux même pour nous. Je dis « contrainte » parce que, tout en écrivant cette lettre de propos délibéré, il ne m'est, cependant, pas permis de mentir comme je le voudrais volontiers. Je mets beaucoup de choses sur le papier contre ma volonté. Ainsi, l'emportement d'injures que je voudrais vomir, je dois l'étrangler.
Dieu est miséricordieux envers nous en ne nous laissant pas continuer à répandre sur la terre notre volonté mauvaise comme nous aurions été prêts à le faire. Cela aurait augmenté nos fautes et par suite, nos souffrances. Il nous fait mourir prématurément comme il l'a fait pour moi, ou bien il fait intervenir d'autres circonstances atténuantes.
Il se montre encore miséricordieux envers nous en ne nous contraignant pas à nous approcher de Lui plus que nous le sommes en ce lieu retiré de l'enfer, cela diminue le tourment.
Chaque pas qui m'approcherait davantage de Dieu m'occasionnerait une peine plus grande que celle qui t'arriverait pour un pas plus près d'un brasier ardent.
Tu avais été épouvantée, quand une fois, pendant une promenade, je te racontais que mon père, peu de jours avant ma première communion, m'avait dit : « Cherche à obtenir un beau vêtement, ma petite Annette, le reste n'est que comédie. »
A cause de ton épouvante, j'en ai eu presque honte. Maintenant, je m'en moque. L'unique raison de cela était que l'on admettait à la Communion qu'à dix ans seulement. A ce moment, j'étais, en ce qui me concerne, passablement prise par la manie des amusements du monde, de sorte que, sans scrupule, je me moquais des choses religieuses et je ne donnais pas grande importance à la « Première Communion ».
Que beaucoup d'enfants aillent maintenant recevoir l'Hostie dès l'âge de 7 ans nous met en fureur. Et nous faisons tout pour donner à entendre aux gens que les enfants de cet âge n'ont pas la raison suffisante. Ceux-ci doivent d'abord commettre quelque péché mortel. Alors, la blanche particule ne fait plus en eux, grand dommage comme lorsque leur cœur vit encore de la foi, de l'espérance et de la charité -pouah ! quelle pensée- reçues au baptême. Te souviens-tu que déjà, sur terre, je soutenais cette opinion ?
Je viens de parler de mon père. Souvent, il était en dispute avec ma mère. Je t'y faisais allusion, mais très rarement, parce que j'en avais honte. Chose ridicule d'avoir honte du mal ! Pour nous, ici, tout est pareil…
Mes parents ne dormaient même plus dans la même chambre ; j'étais avec ma mère et mon père restait dans la chambre voisine où il pouvait rentrer librement à n'importe quelle heure. Il buvait beaucoup et de telle façon qu'il dissipait tout notre avoir. Mes sœurs travaillaient toutes les deux, mais tout l'argent qu'elles gagnaient leur était nécessaire, disaient-elles. Aussi, ma mère commença-t-elle à travailler de son côté pour gagner quelque chose.
Dans sa dernière année de vie, mon père battait souvent ma mère quand celle-ci ne voulait rien lui donner. A mon égard, au contraire, il était toujours affable. Un jour, je te l'avais raconté, et tu t'es choquée de mon caprice, (au reste, de quoi ne t'es-tu pas choquée à mon sujet ?) un jour donc, il dut rapporter au moins deux fois les souliers qu'il m'avait achetés parce que la forme et les talons n'étaient pas assez modernes [n.d.l.r. - les détails précédents au sujet du père d'Annette et l'épisode suivant des faits ont été confirmés.]
La nuit pendant laquelle mon père fut frappé d'une apoplexie mortelle, il m'advint quelque chose que, par crainte d'une mauvaise interprétation de ta part, je n'ai jamais osé te confier. Mais maintenant, tu dois le savoir. C'est important parce qu'alors, pour la première fois, je fus assaillie de mon esprit tourmenté actuel.
Je dormais dans la chambre avec ma mère. Ses respirations régulières indiquaient son profond sommeil quand voici que je m'entendis appeler par mon nom. Une voix inconnue me disait : « Qu'arrivera-t-il si ton père meurt ? »
Je n'aimais plus mon père depuis qu'il traitait si vilainement ma mère, comme du reste, je n'aimais dès lors, absolument plus personne ; j'étais seulement affectionnée à certaines qui étaient bonnes pour moi. L'amour sans espoir de retour terrestre existe seulement dans les âmes en état de Grâce, et moi, je ne l'étais pas ;
Je répondis à la mystérieuse demande sans savoir d'où elle venait : « Mais il ne meurt pas ! » Après une brève pause, la même demande se fit clairement entendre ? La même réponse : « Mais il ne meurt pas ! » m'échappa encore brusquement de la bouche.
Pour la troisième fois, il me fut demandé : « Qu'arrivera-t-il si ton père meurt ? » Il me vint à l'esprit comment mon père venait souvent à la maison en état d'ivresse, tempêtant et maltraitant ma mère, et comment il nous avait mises dans une condition humiliante vis-à-vis de notre entourage. Indisposée, je criais : « Je m'en moque ! »
Alors, tout se tut.
Dans la matinée, quand ma mère voulut mettre en ordre la chambre de mon père, elle trouva la porte fermée à clef. Vers midi, on la força. Le cadavre de mon père, à demi-vêtu, gisait sur le lit. En allant à la cave, il avait dû lui arriver quelque accident. Depuis longtemps, il était en mauvais état de santé.
(Dieu avait-il donc lié la conversation de cet homme, bon d'une certaine façon pour sa fille, à la volonté de celle-ci ?)
- Parenthèse du manuscrit.
Marthe et toi, vous m'aviez persuadée d'entrer dans l'association des jeunes. Je n'ai jamais caché que je trouvais bien accordé à la mode paroissiale les instructions des deux directrices. Les jeux étaient amusants. Comme tu sais, j'y eus tout de suite un rôle de direction. Cela suivait mon inclination naturelle. Les promenades aussi me plaisaient. Je me laissais aller quelquefois à la confession et à la communion.
A dire vrai, je n'avais rien à confesser. Pensées et discours, pour moi, n'avaient pas d'importance et pour les actions plus grossières, je n'étais pas encore assez corrompue.
Une fois, tu m'avertissais : « Anne, si tu ne pries plus assez, tu vas à la perdition. » Je priais vraiment peu et seulement d'une façon nonchalante. Maintenant, je sais que tu avais vraiment raison. Tous ceux qui brûlent en enfer n'ont pas prié, ou prié insuffisamment.
La prière est le premier pas vers Dieu, et il demeure le pas décisif. Spécialement la prière à Celle qui fut la Mère du Christ et dont nous ne prononçons jamais le nom. Sa dévotion arrache au démon d'innombrables âmes que le péché devrait infailliblement jeter entre ses mains.
Je poursuis en me consumant de colère et seulement parce que je le dois. Prier est la chose la plus facile que l'homme puisse faire sur la terre. Et c'est justement à cette chose très facile que Dieu a lié le salut de chacun…
A qui prie avec persévérance, peu à peu, Il donne tant de lumière et le fortifie de manière telle, qu'à la fin, même le pécheur le plus endurci peut définitivement se relever, fût-il enfoncé dans la boue jusqu'au cou.
Dans les dernières années de ma vie, je n'ai plus prié comme je le devais, et ainsi, je me suis privée de la grâce sans laquelle personne ne peut se sauver.
Ici, nous ne recevons plus aucune grâce, au reste, même si nous en recevions, nous les refuserions cyniquement.
Toutes les fluctuations de l'existence terrestre ont cessé en cette vie. Pour vous, sur la terre, vous pouvez monter d'un état de péché à l'état de grâce, de l'état de grâce, tomber dans le péché, souvent par faiblesse, quelquefois par malice.
Avec la mort, ces changements sont finis, parce qu'ils ont pour cause l'instabilité de l'homme terrestre. Désormais, nous avons rejoint l'état final. Déjà, avec la croissance des ans, les changements deviennent plus rares. Il est vrai que jusqu'à la mort, on peut toujours se retourner vers Dieu ou s'en détacher. Cependant, entraîné par l'habitude, l'homme, avant de mourir, avec ses derniers faibles restes de volonté, se comporte comme il en avait l'habitude pendant sa vie. L'habitude devenue une seconde nature, il se laisse entraîner par elle. C'est ainsi qu'il advint pour moi. Depuis des années, je vivais loin de Dieu. A cause de cela, au moment du dernier appel de la Grâce, je me tournai contre Dieu.
Ce n'est pas le fait que je péchais souvent qui fut pour moi, fatal, mais plutôt que je ne voulusse plus me relever.
Plusieurs fois, tu m'as averti d'écouter les prédications, de lire des livres de piété. « Je n'ai pas le temps » était ma réponse ordinaire… rien d'autre n'augmentait davantage mon incertitude intérieure.
Du reste, je dois constater que lorsque je quittai l'association des jeunes, l'orientation était déjà tellement avancée qu'il m'aurait été extrêmement pénible de me mettre sur une autre voie. Je me sentais dans l'insécurité et non heureuse, mais devant la conversion surgissait une muraille. Tu ne soupçonnais pas cela, tu considérais le retour à Dieu comme une chose très simple : un jour, en effet, tu me disais : « Mais fais donc une bonne confession, Annette, et tout ira bien après. » Je sentais qu'il en serait ainsi, mais le monde, le démon, la chair me tenaient déjà fortement dans leurs griffes. Je n'aurais jamais cru à l'influence du démon. Et maintenant, j'atteste qu'il influe considérablement sur les personnes qui se trouvent dans les conditions où je me trouvais alors.
Seulement beaucoup de prières, faites par les autres et moi-même, jointes à des sacrifices et souffrances, auraient pu m'en arracher… et même cela, peu à peu seulement. Si l'on voit peu de possédés extérieurement, il y en a de très nombreux qui le sont intérieurement. Le démon ne peut ravir le libre-arbitre à ceux qui se donnent à son influence, mais en punition de leur apostasie, pour ainsi dire, méthodique de Dieu ; Dieu permet que le "Malin" se mette en eux.
Je hais même le démon, et pourtant il me plaît parce qu'il cherche à vous entraîner, à vous ruiner, vous autres, lui et ses satellites -les esprits tombés avec lui au commencement du temps- ils sont innombrables et rôdent sur la terre ; ils dansent comme un essaim de mouches et vous ne vous en apercevez même pas…
Ce n'est pas à nous, réprouvés, de vous tenter ; cela est réservé aux esprits tombés. A la vérité, cela accroît encore davantage leur tourment chaque fois qu'ils entraînent ici une âme. Mais, que ne fait pas la haine !…
Je marchais dans des sentiers éloignés de Dieu, et pourtant, Dieu me poursuivait. J'aplanissais la voie à la grâce en raison d'actes de charité naturelle que j'accomplissais assez souvent par simple inclination. Quelquefois, Dieu m'attirait vers une église, alors je sentais comme une nostalgie. Quand je soignais ma mère malade, malgré mon travail de bureau durant la journée, d'une certaine façon, je me sacrifiais vraiment, alors les attraits de Dieu agissaient puissamment.
Une fois, dans l'église de l'hôpital dans laquelle tu m'avais conduite pendant l'arrêt de travail de midi, il m'arriva une chose qu'alors il n'aurait fallu qu'un pas pour que j'en vienne à me convertir : j'ai pleuré… Mais la joie du monde passait de nouveau comme un torrent par-dessus la grâce, le bon grain suffoquait vraiment parmi les épines. Sous le prétexte que la religion était affaire de sentiment, comme on disait souvent au bureau, je rejetais encore cette notion de grâce comme toutes les autres…
Une fois, tu m'as attrapée parce que, à la place d'une génuflexion jusqu'à terre, je fis à peine une informe courbette en pliant le genou. Tu pensais que c'était un acte de paresse et ne semblais pas même suspecter qu'alors je ne croyais déjà plus à la présence du Christ dans le Saint Sacrement. Maintenant, j'y crois, mais seulement d'une façon naturelle, comme on croit à un orage dont on entend les effets.
En attendant, je m'étais accommodée d'une religion à ma façon. Je soutenais l'opinion qui parmi nous, au bureau, était commune, que l'âme, après la mort, allait dans un autre être de façon qu'elle continuait ainsi à pérégriner sans fin. Avec cela, l'angoissante question de l'Au-delà était résolue et rendue inoffensive.
Pourquoi ne me rappelais-tu pas la parabole du riche opulent et du pauvre Lazare, dans laquelle le Christ envoie immédiatement après la mort, l'un en enfer, l'autre au paradis ?… Il est vrai que tu n'aurais rien obtenu, rien de plus qu'avec tes autres discours de bigote…
Peu à peu, je me créais à moi-même un dieu suffisamment étoffé pour être appelé Dieu ; assez éloigné de moi pour ne devoir maintenir aucune relation avec lui, assez vague pour le laisser, selon le besoin, ressembler à un dieu panthéiste ou bien pour se laisser poétiser comme un Dieu solitaire. Ce dieu n'avait aucun paradis pour me récompenser, ni aucun enfer à m'infliger. Je le laissais en paix. En cela consistait mon adoration pour lui.
On croit volontiers à ce qui plaît, aussi au cours des ans, je me tins suffisamment convaincue de ma religion pour n'en avoir pas de souci.
Une chose seulement, aurait pu briser mon obstination : une longue et profonde douleur. Et cette douleur n'est pas venue ! Comprends-tu maintenant ce que veut dire : « Dieu châtie ceux qui l'aiment » ?
Un dimanche de juillet, l'association des jeunes organisait une excursion. Elle m'aurait bien plu, mais ses fades discours, ce comportement de bigotes, m'en ont détournée. D'ailleurs, une autre image bien différente de celle de la Madone demeurait depuis quelque temps sur l'autel de mon cœur : l'attrayant Max du magasin voisin ; déjà nous avions plaisanté ensemble plusieurs fois.
Or précisément pour ce dimanche, il m'avait invitée à une promenade. Celle avec laquelle il allait d'habitude était malade à l'hôpital. Il avait bien compris que j'avais mis les yeux sur lui.
Je ne pensais pas encore l'épouser toutefois. Il était certainement riche, mais se comportait trop gentiment avec toutes les filles. Et moi, jusqu'à ce moment, je voulais un homme qui m'appartint uniquement. Non seulement être sa femme, mais sa femme unique. J'ai toujours eu, en effet, un certain goût naturel pour la bienséance. (Il est vrai, Annette, malgré toute son indifférence religieuse, avait quelque chose de noble dans son comportement. Je m'épouvante à la pensée que même des personnes bien éduquées peuvent aller en enfer, quand, par ailleurs, elles le sont, en fait, si mal qu'elles fuient Dieu.)
Au cours de la promenade susdite, Max se prodigua en gentillesses. Et l'on ne s'en tint nullement à des conversations de prêtres comme vous. Le jour suivant, au bureau, tu me faisais des reproches parce que je n'étais pas venue avec vous. Je te racontai mon divertissement de ce dimanche. Ta première demande fut : « As-tu été à la messe ? » Sottise ! Comment pouvais-je étant donné que le départ avait été fixé pour six heures ? Tu sais encore comment, excitée, j'ajoutai : « Le bon Dieu ne fait pas attention ainsi à ces bagatelles comme vos prêtres. Maintenant, je dois confesser : « Dieu, malgré sa bonté infinie pèse les choses avec une plus grande précision qu'eux tous. »
Après cette première promenade avec Max, je vins encore une seule fois à l'association, à Noël, pour la célébration de la fête ; c'était quelque chose qui me plaisait suffisamment pour revenir encore, mais intérieurement, j'étais déjà étrangère à vous autres. Cinéma, bals, promenades se succédaient constamment. Avec Max, nous nous disputions quelquefois, mais je sus toujours l'enchaîner à moi de nouveau.
J'eus beaucoup de mal avec l'autre amie qui, au retour de l'hôpital, se comportait auprès de lui comme une obsédée. Ce fut un avantage pour moi car mon noble calme, par opposition, fit une profonde impression sur Max qui finit par décider que je serais la préférée.
J'avais su la lui rendre odieuse, en parlant froidement ; positive à l'extérieur et vomissant le venin à l'intérieur. De tels sentiments, une telle conduite préparent excellemment à l'enfer. Ils sont diaboliques, dans le sens le plus étroit du mot.
Pourquoi je te raconte cela ? C'est pour te dire comment je me détachai définitivement de Dieu…
Entre moi et Max, nous n'étions pas arrivés souvent à la très grande familiarité. Je comprenais que je me serais abaissée à ses yeux si je m'étais laissée aller complètement avant le temps, c'est pourquoi, je sus me maintenir. J'étais prête à tout, je devais le conquérir. A cette fin, rien ne m'était trop cher. En outre, peu à peu, nous nous aimions, possédant l'un et l'autre de précieuses qualités qui faisaient nous apprécier réciproquement. J'étais habile et capable, d'une agréable compagnie, aussi je tins solidement attaché et réussis, au moins dans les derniers mois avant notre mariage, à être l'unique à le posséder.
En cela consistait mon apostasie de Dieu, d'avoir fait d'une créature, mon idole… Jamais une chose pareille ne peut arriver entièrement que dans l'amour d'une personne pour l'autre sexe lorsque cet amour reste enfermé dans les satisfactions purement terrestres ; c'est aussi ce total abandon qui forme son attrait, son stimulant et son venin.
pour moi, en la personne de Max, cette adoration de moi-même me devint une religion vécue.
Pendant ce temps, au bureau, je me lançai avec âcreté contre tout ce qui était d'Eglise, les prêtres, les indulgences, le marmonnement du chapelet et semblables sottises. Tu cherchais, avec plus ou moins d'esprit, à prendre la défense de ces choses, sans soupçonner, semblait-il, que dans l'intime, je n'argumentais pas à la vérité contre elles, mais je cherchais plutôt un soutien contre ma conscience - j'avais alors besoin d'un tel soutien pour justifier mon apostasie par la raison.
Tout au fond, je me révoltais contre Dieu. Tu ne le comprenais pas ; je me tenais encore pour catholique et désirais être appelée ainsi ; j'allais même jusqu'à payer les taxes ecclésiastiques. Une certaine contre-assurance ne pouvait me nuire, pensais-je.
Il arrivait parfois, que tes réponses me frappaient mais elles n'avaient pas de prise sur moi parce que tu ne « devais » pas avoir raison.
En raison de ces fausses relations, nous avons eu, l'une et l'autre, peu de regret lorsque nous nous sommes séparées à l'occasion de mon mariage.
Avant cette cérémonie, je me confessai et communiai encore une fois, comme c'était prescrit. Moi et mon mari, nous pensions la même chose sur ce point. Pourquoi ne pas accomplir ces formalités ? Nous nous y soumîmes comme à toutes les autres. Vous appelez indigne une telle communion. Et bien, après l'avoir faite, j'eus plus de calme dans la conscience. Ce fut du reste la dernière.
Notre vie conjugale se passait, la plupart du temps en grande harmonie. Sur toutes ces questions, nous étions du même avis. En particulier, sur ce point que nous ne voulions pas endosser la charge d'élever des enfants. A la vérité, mon mari en aurait volontiers eu un, bien sûr, mais pas plus. A la fin, je sus le dissuader encore de ce désir. Vêtements, meubles de luxe, promenades, voyages en auto et semblables distractions m'importaient davantage.
Ce fut une année de plaisir sur la terre que ce temps entre mon mariage et ma mort soudaine.
Chaque dimanche, nous allions en voiture ou bien nous rendions des visites aux parents de mon mari. (j'avais honte désormais de ma mère.) Ceux-ci glissaient à la surface de l'existence, ni plus ni moins que nous. Intérieurement, je ne me sentais jamais heureuse ; cependant, extérieurement, je riais. C'était toujours au-dedans de moi que quelque chose me rongeait. J'aurais voulu qu'après la mort, laquelle naturellement, devait être encore bien lointaine, tout fût fini.
Etant enfant, j'entendis un jour au cours d'un sermon, que Dieu récompense toute bonne œuvre que chacun accomplit et quand il ne pourra la récompenser dans l'autre vie, il le fait sur la terre, cela est très exact.
Inopinément, j'eus un héritage de la tante « Lotte » et mon mari réussit à obtenir des émoluments très honorables. Je pus alors arranger ma nouvelle habitation d'une façon attrayante. La religion ne m'envoyait plus que de loin sa lumière, pâle, faible et incertaine.
Les cafés des villes, les hôtels dans lesquels nous allions durant les voyages, ne nous portaient certainement pas à Dieu. Tous ceux qui fréquentaient ces lieux, vivaient comme nous, de l'extérieur à l'intérieur, mais non de l'intérieur à l'extérieur, l'extérieur envahissant l'intérieur, au lieu que ce soit l'inverse.
Si, dans nos voyages, au moment des vacances, nous visitions quelques cathédrales, nous n'avions d'intérêt que pour son contenu artistique. L'atmosphère religieuse que nous respirions, spécialement dans ces monuments du Moyen-Age, je savais les neutraliser avec quelques critiques de circonstance ; un frère faisant office de guide qui avait un maintien gauche ou n'était vêtu que peu proprement ; le scandale que des moines qui se faisaient passer pour pieux, vendissent des liqueurs ; l'éternelle sonnerie des cérémonies sacrées pendant que l'on ne s'occupe que de faire de l'argent… De la sorte, je chassais de moi à chaque fois, la grâce dès qu'elle passait. Je laissai libre cours à ma mauvaise humeur, en particulier à propos de certains tableaux médiévaux de l'enfer, dans les cimetières ou ailleurs, dans lesquels le démon grille les âmes sur des charbons incandescents tandis que ses compagnons aux longues queues entraînent d'autres victimes avec de longues cordes ! Claire ! On peut se tromper pour peindre l'enfer, mais on n'exagère jamais !
Le feu de l'enfer, je l'ai toujours eu en vue d'une façon spéciale. Tu, sais comment, durant une altercation à ce propos, je te tins une allumette sous le nez et te dis avec sarcasme : « A-t-elle l'odeur de l'enfer ? » Tu as éteint en hâte la flamme. Ici, personne ne l'éteint !
Le feu, je te le dis moi-même, ne signifie pas le tourment de la conscience. Le feu, c'est le feu. Cette parole de l'Evangile est à entendre littéralement : « éloignez-vous de moi, maudits, allez au feu éternel ! » « Littéralement » !
Comment un esprit peut-il être touché par le feu matériel ? Demanderas-tu. Comment peut souffrir ton âme sur la terre quand tu mets le doigt sur une flamme ? De fait, l'âme ne brûle pas ; et pourtant, quel tourment en éprouve tout l'individu !
De façon analogue, nous ici, nous sommes spirituellement liés au feu, selon notre nature et selon nos facultés. L'âme est privée de sa liberté naturelle ; nous ne pensons pas ce que nous voulons, ni comme nous le voulons. Ne regarde pas ces lignes, hébétée ; cet état, qui à vous autres, ne dit rien, me brûle sans me consumer.
Notre plus grand tourment consiste, dans la certitude que nous avons que nous ne verrons Dieu, jamais.
Comment cela peut-il nous tourmenter autant, alors que sur la terre on y demeure aussi insensible ? Tant que le couteau reste étendu sur la table, on reste indifférent. On voit s'il est affilé, on ne l'éprouve pas. Que le couteau te transperce, et tu te mettras à crier de douleur. Maintenant, nous souffrons la perte de Dieu ; avant, nous y pensions seulement.
Toutes les âmes ne souffrent pas d'une égale façon. D'autant plus pernicieusement et d'autant plus systématiquement quelqu'un a péché, d'autant plus gravement pèse sur lui la perte de Dieu et d'autant plus la suffoque la créature dont elle a abusé.
Les catholiques damnés souffrent plus que ceux des autres religions parce que, le plus souvent, ils ont reçu et méprisé plus de grâces et de lumières. Celui qui savait plus, souffre plus durement que celui qui savait moins. Ceux qui tombent par malice pâtissent plus cruellement que ceux qui tombent par faiblesse. Mais personne ne souffre plus que ce qu'il a mérité. Oh ! si du moins cela n'était pas vrai ! j'aurais ainsi une raison de haïr !
Tu me disais un jour, que personne ne va en enfer sans le savoir… Cela aurait été révélé à une sainte. Moi, j'en riais, mais ensuite, je me retranchai derrière cette déclaration : « De toute façon, en cas de nécessité, j'aurais toujours la possibilité de faire volte-face. » me disais-je secrètement. Cette pensée est juste. Vraiment, avant ma fin subite, je ne connus pas l'enfer comme il est. Aucun mortel ne le connaît. Mais j'en avais la pleine conscience. « Si tu meurs, tu vas dans le monde de l'Au-delà, tout droit, comme une flèche contre Dieu. Tu en porteras les conséquences. »
Je n'en changeai pas pour autant parce qu'enracinée par la force de l'habitude, comme je te l'ai dit déjà, j'étais poussée, entraînée par elle. Plus les hommes vieillissent, plus ils aiment leurs habitudes… Ma mort vint ainsi !
Il y a une semaine, je parle selon que vous comptez ; en regard à la douleur, je pourrais dire très bien que je brûle en enfer déjà depuis dix ans. Il y a une semaine donc, mon mari et moi, nous faisions pendant ce dimanche, une promenade… la dernière.
Le jour pointait, radieux. Je me sentais bien autant que jamais. Un sinistre sentiment de bonheur m'envahit qui serpentait en moi durant toute la journée… Quand voici qu'à l'improviste, pendant le retour, mon mari fut ébloui par une auto qui venait à toute allure. Il perdit le contrôle… « Jésus » me sortit des lèvres comme un frisson, non comme une prière, mais comme un cri. Une douleur déchirante m'opprimait toute. Et en regard de celle d'à présent, c'était une bagatelle. Puis, je perdis les sens.
Il est étrange que pendant cette matinée, il m'était venu encore à l'esprit, d'une façon inexplicable, cette pensée : « Tu pourrais encore une fois aller à la messe ». Elle retentissait en moi comme une imploration. Nettement et résolument, mon « non » trancha le fil de mes pensées. « Avec toutes ces choses, il faut en finir. Que j'en endosse toutes les conséquences ! Maintenant, je les porte. »
Ce qui advint après ma mort, tu le sais déjà. Le sort de mon mari, celui de ma mère, ce qui arriva de mon cadavre et le déroulement de mes funérailles, je les ai connus dans leur détail par le moyen des connaissances naturelles que nous avons ici. Ce qui arrive sur la Terre, nous le savons seulement d'une façon assez vague. Mais ce qui nous touche de plus près, en quelque façon, nous le connaissons. Ainsi, je vois maintenant où tu séjournes.
Moi-même, au moment de ma mort, je me réveillai soudainement du brouillard. Je me vis comme inondée d'une lumière éblouissante. J'étais au lieu même où gisait mon cadavre. Il arriva comme il arrive au théâtre lorsque, d'un coup, s'éteignent les lumières pour ne plus voir que la scène. Le rideau se divise avec grand bruit et s'ouvre sur une scène inattendue, horriblement lumineuse : la scène de ma vie…
Comme dans un miroir, mon âme se montra à elle-même : les grâces méprisées depuis ma jeunesse, jusqu'au dernier « non » en face de Dieu. Je me sentis comme un assassin auquel, durant le procès judiciaire, on vient apporter sa victime inanimée…
Me repentir ? Jamais !…
En avoir Honte ? Jamais !…
Pourtant, je ne pouvais non plus résister sous les yeux de Dieu que j'avais rejeté. Il ne me restait qu'une chose : la fuite. Comme Caïn s'enfuit du cadavre de son frère Abel, ainsi, mon âme fut poussée dehors, loin de cette vue d'horreur. Ce fut le jugement particulier : l'invisible Juge disait : « Eloigne-toi de moi ! »
…Alors mon âme, comme une ombre enduite de soufre, se précipita dans l'éternel tourment !…
 
Ainsi se terminait la lettre de l'enfer. Les dernières "paroles" étaient presque illisibles, tant elles étaient déformées. La lettre même, quant à elle, se réduisit en cendres entre mes mains…

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