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| Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More | |
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ami de la Miséricorde consacré
Messages : 6669 Date d'inscription : 18/05/2017 Age : 66 Localisation : Paray Le Monial
| Sujet: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Sam 27 Mai - 9:35 | |
| Rappel du premier message :
Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More
Introduction
VINCENT : Voilà donc où nous en sommes, mon cher oncle ! Ceux qui, dans ce pays, viennent rendre visite à leurs amis malades et malheureux, viennent y chercher, comme je le fais moi-même en ce moment près de vous, le réconfort et la consolation. Les prêtres et les moines parlent aux malades de la mort, mais nous qui sommes dans le monde, avons toujours tâché, ici, en Hongrie (1), de leur rendre courage et espoir en la vie. Mais maintenant, mon cher oncle, le monde est devenu si mauvais et de si grands périls sont suspendus au-dessus de nos têtes que notre plus grand réconfort est de penser que la mort approche. Et nous qui sommes vraisemblablement destinés à vivre un certain temps dans cette misère, avons besoin que quelqu'un comme vous, mon cher oncle, nous puisse donner quelques bons conseils contre l'affliction, car vous avez vécu longtemps et vertueusement et êtes si versé dans la loi de Dieu que bien peu de gens le sont plus que vous en ce pays. Vous avez une longue expérience de ce que nous redoutons maintenant, car vous avez été emmené en captivité par deux fois et maintenant vous êtes sur le point de nous quitter. Cela peut être pour vous un grand soulagement, mon cher oncle, puisque vous allez à Dieu. Mais, nous, vous nous laisserez ici comme des orphelins. Vous nous avez toujours soutenus en nous aidant, en nous encourageant, en nous conseillant, non comme l'eût fait un oncle ou quelque parent éloigné, mais comme un véritable père. ANTOINE : Mon cher et bon neveu, je ne nierai pas que non seulement ici en Hongrie, mais un peu partout dans la chrétienté, on ait pris l'habitude de réconforter les malades d'une manière aussi peu chrétienne. On leur fait plus de mal que de bien en réveillant en eux le désir de vivre, au lieu de les laisser méditer sur la mort, le jugement, le paradis et l'enfer et sur toutes ces pensées qui devraient obséder un homme non seulement quand il est malade, mais même quand il est en parfaite santé. Cette manière d'agir me paraît absurde quand on en use pour réconforter un homme de mon âge, car s'il est vrai qu'un jeune homme puisse mourir prochainement, il est évident aussi que, de toute façon, un vieillard n'en a plus pour longtemps à vivre. Pourtant (comme le dit Cicéron), il n'est personne d'assez vieux pour n'espérer vivre une année encore et se réjouir en caressant cette folle pensée. Aussi les prétendus réconforts des amis, au lieu de réconforter celui qui doit mourir, feront s'évaporer complètement cette douce rosée de la grâce de Dieu qui nous amène à souhaiter le départ pour l'autre monde, où l'on se trouve en sa présence.
Source : livres-mystiques.com
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ami de la Miséricorde consacré
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Mar 4 Juil - 9:49 | |
| XIX. UNE AUTRE OBJECTION. RÉPONSE
ANTOINE : (...) Les autres furent les douloureuses prières qu'il fit sur la croix malgré ses tourments atroces : il avait été flagellé, on avait enfoncé des clous dans sa chair, ses membres étaient écartelés, ses muscles se tordaient, ses veines se rompaient, la cruelle couronne d'épines s'enfonçait dans sa tête et son sang se répandait sur sa face (Lc., 22). Pendant toutes ces souffrances horribles, il prononça deux invocations très ferventes, l'une pour le pardon de ceux qui le torturaient si cruellement, l'autre pour remettre son âme entre les mains de Dieu son Père (Lc., 23). Ces prières, lancées au plus fort de ses tortures, me paraissent les plus importantes de toutes celles qu'il fit. Aucune prière adressée à Dieu dans la joie n'est aussi belle ni aussi forte que celles qu'on lui adresse dans la souffrance.
Venons-en maintenant au second de vos arguments. Vous dites qu'un homme peut offenser Dieu aussi bien dans l'adversité que dans la fortune : dans le premier état en montrant de l'impatience, dans le second par la recherche immodérée des plaisirs charnels. Par ailleurs, on peut être tout aussi vertueux dans la prospérité que dans la misère en remerciant Dieu aussi bien parce qu'il a donné la richesse, les honneurs, la fortune que parce qu'il a donné la pauvreté, la misère, l'emprisonnement, la maladie, la souffrance. Et vous ne comprenez pas pourquoi je crois que l'épreuve apporte plus de réconfort. Vous croyez en trouver davantage dans la prospérité. Vous y voyez même deux fois plus de soutien moral que dans le malheur puisque l'âme et le corps y ont également leur part, tandis qu'une personne qui souffre ne trouve de réconfort que pour son âme seulement.
Là, je ne suis pas d'accord avec vous, mon neveu. Un homme en pleine prospérité est naturellement porté à remercier Dieu, il peut être heureux de le faire mais il a peu de motifs pour se croire réconforté puisqu'il jouit d'un bonheur terrestre, à moins que vous ne donniez le nom de réconfort à ces satisfactions sensuelles que sont les plaisirs du corps. On donne parfois ce sens à ce terme quand on dit : « Cette boisson me réconforte ». Mais, pour ceux qui ont l'âme droite, le réconfort est beaucoup plus une consolation apportant l'espoir d'une récompense qu'un plaisir passager réjouissant le corps. (...)
Source : livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Mer 5 Juil - 0:58 | |
| XIX. UNE AUTRE OBJECTION. RÉPONSE
ANTOINE : (...) Un homme qui manque de patience dans ses malheurs ne peut être récompensé. Mais s'il souffre patiemment pour l'amour de Dieu, s'il se conforme aux désirs de Dieu, il sera récompensé en proportion de sa peine. Ceci apparaît dans plusieurs passages de l'Écriture, je vous en ai cités quelques-uns, je vous en citerai d'autres. Mais nulle part on ne voit qu'un riche ayant remercié le Seigneur de ses bienfaits, Dieu lui ait promis une récompense au ciel pour la seule et unique raison qu'il avait pris du bon temps sur la terre. Mais puisque je vous parle du véritable réconfort, de celui qui donne à l'homme l'espoir de gagner la faveur de Dieu, la rémission de ses péchés, la diminution de la peine du purgatoire ou encore une récompense dans le ciel, puisque de tels bienfaits ne sont accordés qu'au malheur subi avec patience et non au bonheur, même s'il est accepté avec reconnaissance, vous voyez bien que vous ne pouvez parler de deux fois plus de réconfort dans la prospérité.
En vérité, il y a bien plus de motifs de se sentir réconforté dans le malheur que dans le bonheur. D'abord, comme je vous l'ai déjà montré longuement, une prospérité continuelle, jamais interrompue par aucune épreuve, est un présage inquiétant de damnation. Il s'ensuit que, pour un cœur droit, une épreuve est un mobile de réconfort. Ensuite, l'Écriture nous dit qu'il y a plus d'avantages à retirer de l'épreuve que de la prospérité et l'Ecclésiaste dit : « Mieux vaut aller à la maison du deuil qu'à la maison du banquet ; car c'est ainsi que doit finir tout homme et le vivant y réfléchit » et un peu plus loin : « Le cœur du sage est dans la maison du deuil et le cœur des fous dans la maison de la joie » (Eccl., 7, 2). En vérité, quand l'Écriture recommande la joie humaine, il faut l'entendre comme une joie spirituelle ou encore comme un léger rafraîchissement de l'esprit, une légitime réaction contre la mélancolie. Dans l'Ancien Testament, la prospérité fut promise aux enfants d'Israël comme un don spécial de Dieu car, en ce temps-là, à cause de leur imperfection, il fallait les amener à Dieu par des perspectives plaisantes comme maintenant, pour faire étudier les enfants, on leur promet des bonbons. L'Écriture fait remarquer que les gens étaient comme des enfants et elle donne à leur maître Moïse le nom de « pédagogue ».(...)
Source : livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Jeu 6 Juil - 0:38 | |
| XIX. UNE AUTRE OBJECTION. RÉPONSE
ANTOINE : (...) Saint Paul dit : « La Loi ancienne n'a rien amené à la perfection » (Héb., 7, 19) et Dieu a menacé les humains de leur envoyer des épreuves dans ce monde pour leurs péchés, non que l'épreuve soit un mal en soi, mais pour que nous soyons conscients de la maladie que donne le péché et que nous en craignions les suites. Car l'épreuve a beau être bienfaisante, si nous la prenons comme il faut, elle n'en est pas moins pénible et nous ne nous en délectons point. Pourtant, je ne me lasserai pas de répéter que l'Écriture désigne l'épreuve comme très supérieure à la fortune pour nous faire obtenir le vrai bien que Dieu nous donnera dans l'autre monde. Que signifieraient autrement les paroles de l'Ecclésiaste que je viens de vous citer : « Mieux vaut aller à la maison du deuil qu'à la maison du banquet » ? Pourquoi dirait-il que le cœur du sage est attiré par ceux qui sont dans la peine, et le cœur du fou par ceux qui sont dans la joie ? Pourquoi menacerait-il le sage en disant que celui qui se complaît dans les richesses tombera dans le malheur, que le rire sera mêlé de tristesse et que la joie se terminera en douleur ?
Et Notre-Seigneur lui-même a dit : « Heureux les affligés car ils seront consolés » (Mt., 5, 5). Il dit encore à ses disciples : « En vérité, en vérité, je vous le dis, vous allez pleurer et vous lamenter, le monde, lui, se réjouira, vous serez dans la tristesse, mais votre tristesse se changera en joie » (Jn., 16, 20). Vous avez déjà pu constater de nombreuses vérifications de ces prophéties : bien des gens qui étaient dans la joie sont maintenant dans la peine. Et vous voyez dans l'Écriture que l'épreuve bien plus que la prospérité vous donne sujet d'espérer la véritable consolation.
En examinant l'adversité et la prospérité, en considérant les conséquences heureuses ou funestes qu'elles entraînent, vous verrez d'autres raisons d'estimer l'épreuve préférable à la fortune. Dans l'épreuve, nous pouvons gagner des mérites par la patience, par la soumission de notre volonté humaine à la volonté divine ou encore en remerciant Dieu de s'être penché vers nous. (...)
Source : livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Jeu 6 Juil - 21:10 | |
| XIX. UNE AUTRE OBJECTION. RÉPONSE
ANTOINE : (...) Vous pouvez me rétorquer que le riche peut faire des générosités, que par l'autorité que lui vaut son crédit, il peut contribuer à faire régner la justice, en un mot qu'il peut faire toutes sortes de bonnes actions. Je vous réponds qu'un pauvre qui supporte patiemment l'épreuve a bien plus de mérites qu'un riche même très vertueux. En effet, celui qui est dans le malheur ferait la même chose que le riche, s'il le pouvait, et son seul bon vouloir a presque autant de valeur que l'action. Tandis que le riche n'est pas dans la même situation : il n'est pas disposé à supporter l'épreuve, à conformer ses désirs à ceux de Dieu, à le remercier de la lui avoir envoyée ; il n'est pas prêt à endurer ce que le malheureux subit avec résignation. De plus, le riche peut faire de grandes largesses, le puissant peut agir en faveur de la justice, mais on peut être généreux sans être riche, on peut lutter pour la justice sans être puissant. Le riche peut enfin, comme le roi David, compter pour rien ses richesses et mener une vie de pénitence. Ainsi vous voyez bien que la prospérité n'est pas la cause essentielle de ces actes vertueux, puisque celui qui est dépourvu de richesses accomplit mieux encore que le riche ces actions bonnes et méritoires. Finalement, nous voyons que plus le riche est généreux moins il est riche. Par le fait même qu'il travaille à faire le bien, il abandonne sa tranquillité, il entame sa fortune. Celui qui considère la chose avec attention s'aperçoit que le riche, s'il veut agir bien, s'écarte de l'état de richesse pour se rapprocher de l'état de misère. C'est donc qu'il reconnaît la supériorité, en ce qui concerne la grâce, de l'état d'infortune sur l'état de prospérité.
Si vous ne comprenez pas ce raisonnement, et m'alléguez qu'un riche, malgré toutes ses largesses, est resté riche, et qu'un homme puissant, malgré tous ses efforts pour faire régner la justice, est resté puissant, rappelez-vous qu'il faut respecter les proportions : s'il est resté riche, c'est qu'il a donné bien peu en comparaison de ce qu'il avait. Si le riche donnait tout ce qu'il possède jusqu'à être lui-même dans le dénuement, alors on comprendrait ce qui vient d'être dit. Car ce riche-là serait tombé volontairement de la richesse dans la pauvreté. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Ven 7 Juil - 23:47 | |
| XIX. UNE AUTRE OBJECTION. RÉPONSE
ANTOINE : (...)Nous avons pesé les mérites de la prospérité, examinons maintenant plus en détail ce qui fait le mérite d'une épreuve, c'est-à-dire la patience, la soumission et les remerciements à Dieu. L'homme fortuné n'a pas de patience, et l'on peut dire que plus il sera riche moins il sera patient. Dès que sa patience est mise à l'épreuve, ce lui est une souffrance, de sorte que s'il a quelque mérite il l'obtient par sa souffrance, non par sa richesse.
Mais ce sont les deux autres vertus qui nous apporteront les meilleurs points de comparaison : je veux parler de la soumission de l'homme à la volonté de Dieu et de sa gratitude envers le Seigneur. L'homme vertueux, dans l'épreuve, se soumet à Dieu et lui rend grâce ; ainsi le riche qui accepte sa richesse comme venant de Dieu et rend grâce à Dieu de la lui envoyer. C'est dans ces deux points qu'on peut le mieux comparer les mérites de la richesse et ceux de l'adversité.
Les différences qui les opposent se manifestent clairement en ceci : il faut être d'une nature toute particulière pour pouvoir dans l'épreuve se soumettre à la volonté de Dieu et lui rendre grâce. Mais sans être très vertueux on peut se montrer très satisfait des richesses que Dieu procure et lui déclarer : « Je vous remercie de tout mon cœur, et je vous aimerai toujours, aussi longtemps que vous me traiterez ainsi ! » Confitebitur tibi, cum beneficeris ei. Même si le riche est très bon, il lui faut moins de vertu pour conformer sa volonté à celle de Dieu qu'il n'en faut à l'homme dans l'adversité. Les philosophes ont eu raison de dire : « La vertu est dans les épreuves et les difficultés ». Je vous l'ai déjà dit, il est bien plus facile de remercier Dieu pour ses bienfaits que pour les épreuves qu'il nous envoie. C'est pourquoi, en nous soumettant à sa volonté et en le remerciant de ce qu'il fait pour nous quand nous sommes dans le malheur, nous méritons une récompense céleste bien plus que si nous montrons les mêmes dispositions d'esprit quand nous sommes dans la prospérité. (...)
Source : livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Dim 9 Juil - 1:21 | |
| XIX. UNE AUTRE OBJECTION. RÉPONSE
ANTOINE : (...)C'est ce que vit bien le démon quand il dit au Seigneur qu'il n'y avait rien de remarquable dans la piété de Job : Dieu l'avait toujours gardé prospère et heureux. Mais le diable savait qu'il serait dur pour Job de rester aussi pieux, de continuer à remercier Dieu dans l'adversité. Il fut donc tout content de recevoir de Dieu l'autorisation de plonger Job dans le malheur, il ne doutait pas que Job ne vînt à s'impatienter et à murmurer contre Dieu. Mais c'est là que le démon fut pris ; la patience de Job pendant son malheur, qui pourtant ne dura pas longtemps, lui acquit la faveur de Dieu bien plus que la piété dont il avait fait preuve pendant sa longue vie de bonheur et de prospérité. Notre-Seigneur aussi nous dit qu'en remerciant ceux qui nous font du bien nous ne faisons rien de remarquable, nous ne devons pas nous attendre à beaucoup de récompenses pour cela.
Ainsi, je vous ai montré, je pense, la grande supériorité de l'adversité sur la fortune en ce qui concerne les récompenses célestes.
XX. CONCLUSION : ÉLOGE DE L'ÉPREUVE
Cher neveu, terminons maintenant cette discussion, je ne veux plus vous retenir, vous avez d'autres occupations.
Si nous prenons comme principe de notre foi tout ce que dit l'Écriture telle que les saints Docteurs la commentent et telle que l'Esprit de Dieu l'enseigne à l'Église catholique, alors nous accepterons l'épreuve comme un don de Dieu, un don qu'il réserve à ses amis très chers. Ce don du ciel, dans l'Écriture, est hautement loué et recommandé ; il conjure le danger qui nous menace et, si Dieu ne nous l'envoyait pas, nous devrions le chercher dans la pénitence. L'épreuve nous aide à purger nos péchés passés et nous préserve des péchés à venir ; elle nous aide à nous détacher du monde et à nous rapprocher de Dieu ; elle diminue nos peines dans le Purgatoire et augmente nos récompenses dans le Paradis. C'est par la douleur que Notre-Seigneur lui-même pénétra dans son propre royaume, et que tous ses apôtres l'y suivirent. C'est à la supporter avec patience que le Christ exhorte tous les hommes, sans cela, dit-il nous ne serions pas ses disciples et nous ne pourrions atteindre le ciel. (...)
Source : livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Lun 10 Juil - 0:44 | |
| XX. CONCLUSION : ÉLOGE DE L'ÉPREUVE
ANTOINE : (... ) Qui réfléchit à cela et s'en souvient ne s'insurgera pas dans l'adversité ; il en verra toute la valeur, il grandira en vertu et pensera qu'il a mérité cette épreuve. Il comprendra que Dieu la lui a envoyée pour son bien et bientôt, il en remerciera le Seigneur. Alors la grâce en lui grandira et Dieu lui apportera le réconfort en faisant sentir sa présence, car « Dieu est près des cœurs brisés, il sauve les esprits abattus » (Ps., 34, 19). Et la joie qu'il en ressentira allégera beaucoup l'épreuve. Il ne cherchera pas ailleurs une vaine consolation, mais c'est en Dieu seul qu'il mettra sa confiance, auprès de lui qu'il cherchera du secours. Il soumettra entièrement sa volonté au bon plaisir de Dieu. Il priera le Seigneur dans son cœur et demandera à ses amis et surtout aux prêtres de prier pour lui, comme saint Jacques le recommande. Il commencera par se confesser, il se purifiera et se préparera au grand départ, il se réjouira à l'idée de quitter ce monde et même à l'idée de passer par le purgatoire.
Si nous agissons de la sorte, nous ne tarderons pas à sentir nos cœurs s'alléger, notre épreuve devenir plus supportable ; nous guérirons et nous vivrons plus longtemps.
Si Dieu veut que nous sortions de cette vie, alors il fait bien plus pour nous, car celui qui prend ce chemin-là ne peut qu'aller droit. Celui qui ne quitte pas volontiers ce monde misérable, je crains fort qu'il ne meure pas bien. Il n'est pas bien accueilli celui qui ne vient pas de bon cœur et qui dit au Seigneur « Salut ô mon Créateur, je ne vous porte point d'amour ! » Mais celui qui l'aime au point de désirer aller vers lui, celui-là sans aucun doute est le bienvenu, même s'il vient sans être lavé de ses péchés, car « la charité couvre une multitude de péchés » (1 P., 4, 9) et « ceux qui mettent en moi leur confiance ne sont pas déçus » (Es., 49, 23). Et le Christ dit : « Celui qui vient à moi, je ne le jetterai pas dehors » (Jn., 6, 38). Ne comptons donc pas sur une longue existence. Gardons la vie tant que nous l'avons parce que Dieu l'a ordonné ainsi, mais dès qu'il nous appelle, réjouissons-nous d'aller vers lui. L'espoir d'aller au ciel nous soutiendra dans notre épreuve passagère et nous parviendrons ainsi à la joie éternelle. Cher neveu, je prie Dieu que nous y accédions l'un et l'autre. (...)
Source : livres-mystiques.com
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Messages : 6669 Date d'inscription : 18/05/2017
| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Lun 10 Juil - 23:37 | |
| XX. CONCLUSION : ÉLOGE DE L'ÉPREUVE
(...)VINCENT : Mon cher oncle, je prie Dieu qu'il vous récompense et cette fois je ne vous ennuierai plus. Je crains de vous avoir mis à rude épreuve avec mes objections importunes. Vous m'avez donné un bel exemple de patience en supportant si longtemps mes sottises. Je me permettrai pourtant de revenir vous parler du problème si passionnant de l'épreuve et de la souffrance. Du reste, vous m'avez dit que vous aviez des arguments que vous réserviez pour la fin.
ANTOINE : Revenez bientôt, cher neveu, nous en discuterons tant que ce dont nous nous sommes entretenus sera encore frais dans notre mémoire.
VINCENT : Je vous promets, cher oncle, de ne jamais oublier ce que nous avons dit. Que le Seigneur vous envoie la consolation qu'il jugera la meilleure pour vous !
ANTOINE : Bien dit, neveu bien-aimé ! Je lui demande d'en faire autant pour vous et pour tous nos amis, qui ont si grand besoin d'être réconfortés. C'est pour eux plus que pour vous-même, je suppose, que vous êtes venu me demander conseil.
VINCENT : Je les réconforterai en leur rapportant vos paroles. J'ai confiance en Dieu, soyez en sa sainte garde !
ANTOINE : Qu'il vous y tienne également. Adieu très cher neveu.
LIVRE II. DU DIALOGUE DU RÉCONFORT DANS LES TRIBULATIONS
VINCENT : Vos gens me disent, cher oncle, que depuis ma dernière visite, vous avez goûté un bon repos, Dieu merci !, et que vous vous sentez mieux. Je suis heureux de l'apprendre.
Après notre dernier entretien, je m'en suis voulu d'avoir eu si peu de considération pour votre santé. On m'avait bien assuré qu'elle s'était quelque peu améliorée, autrement jamais je n'aurais voulu vous imposer la fatigue d'une aussi longue discussion. En vous quittant, j'ai pensé à la tension d'esprit que je vous avais imposée, vous forçant à me parler de sujets rébarbatifs et ardus comme la maladie, la misère, l'épreuve, la tribulation. Je m'en suis voulu d'avoir eu aussi peu d'égard pour votre santé. Je ne fus pleinement rassuré qu'en apprenant que vous vous sentiez mieux. J'en remercie le Seigneur, car le moindre accroc serait dangereux, à votre âge. (...)
Source : livres-mystiques.com
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Messages : 6669 Date d'inscription : 18/05/2017
| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Mar 11 Juil - 21:59 | |
| LIVRE II. DU DIALOGUE DU RÉCONFORT DANS LES TRIBULATIONS
(...) ANTOINE : Non, cher neveu, parler ne me fait pas de mal. Un vieillard un peu fantasque est souvent aussi bavard qu'une femme. Les poètes ont raison de dire que le bonheur des vieillards est de s'asseoir bien confortablement au chaud, avec, à portée de la main, une boisson, une pomme cuite, et de bavarder en buvant et en mangeant !
Notre conversation ne fut en rien déplaisante, elle me fit du bien. Si nous mîmes en commun nos chagrins, nos épreuves, ce fut avant tout pour en tirer consolation et réconfort. Je suis heureux que vous soyez revenu pour achever cette discussion.
VINCENT : En vérité, elle me fit grand bien, et tous ces bons conseils que vous m'avez donnés, toutes ces paroles si encourageantes, je les ai répétés autour de moi et j'en ai fait profiter nos amis. Me voici revenu pour continuer, et je suis tout heureux de vous trouver si dispos. Mais, je vous en prie, mon oncle, si, dans la joie que me cause votre conversation, je m'oublie jusqu'à vous imposer de la fatigue, dites-le moi. Et quand vous désirerez me voir prendre congé, renvoyez-moi : je reviendrai à un autre moment.
ANTOINE : Après notre entretien, je me sentis, je vous l'avoue, un peu fatigué ; car parler longtemps sans interruption finit, à la longue, par lasser un homme affaibli. Je regrettai d'avoir tant parlé et que notre conversation fût plutôt un long monologue. Nous aurions dû mieux répartir les rôles et faire comme les savants qui exposent leurs idées dans des dialogues entre personnages imaginaires. Mais là, je suis seul coupable.
Entre vous et moi, tout s'est passé comme entre une certaine nonne et son frère. La dame, de haute vertu, était entrée dans un ordre cloîtré, très sévère. Elle y était restée longtemps sans voir son frère, homme également vertueux, qui avait obtenu, dans une université, le titre de docteur en théologie. Quand il revint chez lui, il alla rendre visite à sa sœur, tout heureux de la savoir dame de si grand renom. Elle vint à la grille, comme on dit, c'est-à-dire au parloir et après s'être pieusement salués de part et d'autre comme il est d'usage en ces endroits, ils se touchèrent le bout des doigts, car on ne se serre pas la main à travers une grille. Alors la dame se lança dans un sermon sur la misère du monde, la fragilité de la chair, les ruses du malin, et donna à son frère force bons conseils (quoiqu'à vrai dire un peu longs) sur la prudence à observer pendant la vie, sur la façon de mortifier la chair et de sauver son âme. Après quoi, elle se mit à lui faire des reproches : (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Jeu 13 Juil - 9:22 | |
| LIVRE II. DU DIALOGUE DU RÉCONFORT DANS LES TRIBULATIONS
ANTOINE : (...)— Vraiment, mon frère, je m'étonne que vous, qui avez passé tant de temps à étudier, et êtes si savant en tout ce qui concerne Dieu, ne trouviez rien à me dire, à moi votre sœur ignorante, que vous avez si rarement l'occasion de rencontrer. Je ne doute pas que vous sachiez parler doctement.
— En vérité, ma sœur, avec vous c'est impossible, car vous n'avez cessé de parler pour nous deux. Je me souviens, mon neveu, que lors de notre dernier entretien je ne vous laissai guère ouvrir la bouche. J'en userai autrement cette fois, et vous parlerez la moitié du temps.
VINCENT : Vous m'avez raconté une bien plaisante anecdote, mon cher oncle !
Mais si vous me demandez de parler la moitié du temps, vous ne ressemblez pas à une de vos cousines, je ne vous dis pas laquelle, vous le devinerez. Son mari appréciait énormément la compagnie d'un voisin, à tel point qu'il s'absentait souvent de chez lui. Un jour qu'ils dînaient tous trois, la femme reprocha gaiement au voisin d'attirer son mari loin du foyer conjugal.
— Eh bien ! faites comme moi, madame, il ne s'éloignera jamais de vous.
— Et que faites-vous donc ? dit-elle.
— Eh bien ! voilà : votre mari aime parler et, quand il est avec moi, je le laisse jaser tout son saoul.
— Oh ! dit-elle, je préfère encore qu'il soit en votre compagnie, plutôt que de lui céder chez nous la moitié du temps pour bavarder !...
ANTOINE : Ça, neveu, je devine de qui il s'agit. Je voudrais qu'aucune femme ne fût plus bavarde que celle-là !
VINCENT : Elle n'est pas seulement pleine de bonne humeur, elle est bonne. Mais il ne m'a pas semblé parler si peu, au contraire, j'étais confus de vous poser tant de questions que j'aurais parfaitement pu taire, vos réponses me l'ont bien fait comprendre. Mais maintenant, puisque vous m'y invitez, je parlerai sans crainte.(...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Ven 14 Juil - 9:37 | |
| I. SI L'ON PEUT, DANS L'ÉPREUVE, CHERCHER À SE RÉCONFORTER PAR DES DISTRACTIONS
VINCENT. Avant d'aller plus avant, cher oncle, je me permettrai de revenir sur certaines de vos affirmations. Si je me souviens bien, vous refusiez à l'homme le droit de chercher un adoucissement à sa peine dans les choses humaines ou charnelles. Cela me semble un peu dur. Il n'y a pas de mal à bavarder gaiement avec un ami, cela distrait, cela détend, cela rend courage. Salomon dit, si je me souviens bien, qu'on devrait verser à boire à l'homme qui est dans le chagrin pour l'aider à oublier. Et saint Thomas assure qu'un plaisant entretien (eutrapelia) est bienfaisant, rafraîchit l'esprit et le rend plus vif pour continuer à travailler et à étudier.
ANTOINE : Mon neveu, je n'oublie pas ce point de vue, mais je n'avais guère envie d'en parler, car cela ne me paraît pas absolument inoffensif et d'autre part il n'est guère nécessaire de le conseiller ; les gens y sont suffisamment enclins par eux-mêmes. N'en sommes-nous pas un exemple ? Nous devions nous rencontrer pour parler de choses graves et tristes et nous avons commencé par échanger de petites histoires drôles. Neveu, vous me connaissez : je suis par nature très moqueur. Je voudrais pouvoir m'en corriger. Mais, même à mon âge, je n'y puis arriver. Je ne vais tout de même pas me mettre à m'en vanter !
Mais puisque vous me demandez mon avis sur la question de savoir s'il n'est pas permis de chercher à soulager le chagrin par quelque honnête divertissement (étant bien entendu que notre principal soutien est Dieu seul) eh bien ! je ne le défendrai pas formellement. Car des hommes vertueux et savants l'ont permis dans certains cas. En effet, si nous étions tous comme Dieu souhaite que nous soyons et tels que la sagesse naturelle le voudrait (il est du reste sans excuse que nous soyons différents), il ne fait aucun doute que la meilleure consolation serait de parler du ciel. Tandis qu'à présent, Dieu nous vienne en aide ! quelques mots sur les joies célestes suffisent à nous plonger dans l'ennui, il nous faut bien vite nous rafraîchir l'esprit avec une bonne histoire. Notre intérêt pour le ciel s'est bien refroidi. Si la crainte de l'enfer s'était émoussée dans les mêmes proportions, bien peu craindraient encore Dieu ! Heureusement, nous n'en sommes pas là. Avez-vous remarqué, mon neveu, qu'au sermon et le plus souvent vers la fin, le prédicateur parle du ciel et de l'enfer. Pendant qu'il parle de l'enfer, on l'écoute encore, mais dès qu'il aborde les joies célestes, c'est fini. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Sam 15 Juil - 0:31 | |
| I. SI L'ON PEUT, DANS L'ÉPREUVE, CHERCHER À SE RÉCONFORTER PAR DES DISTRACTIONS
ANTOINE : (...)Il en est de l'âme comme du corps : il y a des gens qui, par nature ou par mauvaise habitude, en sont arrivés à ceci : qu'un produit nocif les soulage plus vite et mieux qu'un produit bienfaisant. S'ils sont malades, ils n'avaleront ni médicament ni nourriture sans y avoir ajouté quelque chose qui en diminue l'action salutaire. Pourtant, nous devons les laisser agir à leur guise ; impossible de faire autrement.
Cassien (cet homme si vertueux) raconte dans une de ses conférences qu'un prédicateur parla un jour du ciel. Il parlait si suavement que ses auditeurs ne tardèrent pas à oublier où ils se trouvaient... et qu'ils tombèrent dans une profonde somnolence. Quand le saint prêtre s'en aperçut, il s'écria tout à coup : « Écoutez cette histoire, elle est amusante. » Toutes les têtes se levèrent et il put alors leur parler du ciel à sa guise. Je ne vous dirai rien des reproches qu'il leur fit, mais cette anecdote me suffit pour illustrer ma réponse à votre question : dans l'épreuve, ne peut-on chercher un soulagement, une honnête distraction ? Je réponds que ceux qui ne peuvent entendre parler du ciel sans être distraits de temps en temps par quelque histoire divertissante (comme s'il était pénible d'entendre parler du ciel !) eh bien ! laissez-les donc ! Je voudrais qu'il fût possible de les guérir de leur frivolité. Il n'en est rien.
Pourtant, à mon avis, il vaut mieux écourter au maximum ces récréations et les rendre aussi rares que possible. Qu'elles soient la sauce et non le plat principal. Prions Dieu de trouver une telle satisfaction dans la description des joies célestes que tout plaisir humain paraisse insipide. Si nous y parvenons, un an de plaisir nous soulagera moins qu'une demi-heure de méditation sur les bonheurs du paradis.
VINCENT : Vous avez raison, mon oncle, et je prie Dieu qu'il nous accorde de goûter de telles joies. Et, comme vous l'avez dit l'autre jour, c'est par la foi que nous y parviendrons et c'est par la prière que nous l'obtiendrons. Mais maintenant, mon cher oncle, arrivons-en au vif du sujet.(...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Dim 16 Juil - 0:45 | |
| II. DU PEU DE TEMPS QU'IL RESTE À VIVRE AUX PERSONNES ÂGÉES OU MALADES
ANTOINE : Cher neveu, j'y ai pensé depuis notre dernière rencontre. Si nous voulions le traiter à fond, il y faudrait bien plus de temps qu'il ne m'en reste à vivre. Et tous mes moments ne sont pas pareils. Il y en a de bien pénibles, pendant lesquels je souhaite mourir. Mes bons jours sont rares et vite passés. Je ne puis trouver meilleure comparaison que celle d'une chandelle presque entièrement brûlée. On pourrait la croire éteinte, car le bord du chandelier en cache la flamme, mais parfois cette flamme s'élève un peu et donne une brève lumière, jusqu'à ce qu'enfin elle s'éteigne complètement. C'est ainsi que bien souvent je crois ma mort proche, et puis j'ai quelques bons moments, comme maintenant. On pourrait croire que ces bons jours vont durer. Mais je sais que je n'en ai plus pour longtemps et même si je vous parais vraiment mieux portant, je tiens chaque jour pour mon dernier. On dit souvent pour calmer la jeunesse « qu'on voit au marché des peaux d'agneaux aussi bien que des peaux de béliers ». Il y a pourtant une différence, c'est que, s'il arrive qu'on meure en pleine jeunesse, le vieillard, lui, sait qu'il ne pourra vivre longtemps.
C'est pourquoi, mon neveu, je laisserai de côté les sujets que j'aurais traités en d'autres circonstances et j'en garderai très peu. Toutefois, si Dieu le permet, nous y reviendrons plus tard.
III. TROIS SORTES D'ÉPREUVES
Toutes les tribulations dont souffrent les hommes entrent forcément dans une des trois catégories suivantes : celles qu'on s'impose de plein gré, celles qui sont supportées patiemment et celles qui paraissent insupportables.
Je ne traiterai pas de cette dernière catégorie maintenant ; ce que j'ai dit la fois dernière suffira pour l'instant. Vous voyez de quoi je veux parler : la maladie, l'emprisonnement, la perte des biens, la perte d'un ami, une douleur physique, tout cela sont des épreuves de la troisième catégorie, telles qu'on ne les accepte pas de bon cœur au début et dont par la suite on ne peut se débarrasser malgré tous les efforts qu'on fait.
Je pense que rien ne peut venir au secours de l'homme qui n'a pas la foi, quels que soient les conseils qu'on lui donne.
Je vous ai déjà beaucoup parlé de celui qui l'a : puisqu'il ne peut se libérer de sa peine, mieux vaut lui conseiller de la prendre en considération, de la supporter patiemment et de rendre grâce à Dieu plutôt que de se révolter et ainsi d'augmenter la douleur tout en risquant de déplaire à Dieu.
Je pense en avoir dit assez sur ce sujet. Pourtant, je vous donnerai encore des exemples de consolation qui peuvent servir dans cette sorte d'épreuves.
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Lun 17 Juil - 8:28 | |
| IV. DANS LA CONTRITION ON EST À LA FOIS HEUREUX ET TRISTE
Je parlerai peu de la première catégorie, c'est-à-dire des épreuves qu'un homme s'impose à lui-même, telles qu'une douleur physique ou encore quelque sacrifice matériel auquel il consent librement pour ses péchés et pour l'amour de Dieu.
Cette sorte d'épreuve ne réclame aucune consolation. Puisque la victime s'impose elle-même une souffrance, elle connaît les limites de ce qu'elle peut supporter et ne les dépassera pas. Si un doute s'élève, c'est d'un conseil qu'on a besoin, non de consolation. Ainsi, le courage qui enflamme l'âme pour l'amour de Dieu donnera joie et consolation, à tel point qu'on en oubliera la douleur du corps.
Tout en ayant au cœur grand regret du péché, on ne peut s'empêcher, en pensant à l'immense joie du ciel, de se sentir dans cet état étrange où je fus un jour de fièvre.
VINCENT : À quoi faites-vous allusion, cher oncle ?
ANTOINE : Il y a une quinzaine d'années, j'étais au lit, atteint d'une fièvre tierce. J'avais déjà subi trois ou quatre crises quand il en survint une si forte et si étrange que je n'aurais jamais cru cela possible. Je me sentis à la fois brûlant et glacé dans tout le corps. Je ne dis pas que j'avais froid ici et chaud là. Il n'y aurait rien eu de surprenant à avoir le front brûlant et les mains glacées, non c'était les deux ensemble par tout le corps, et c'était bien pénible.
VINCENT : Ma foi, mon oncle, voici un étrange phénomène. Je n'ai jamais rien ouï de pareil et si je ne l'avais entendu dépeindre par votre bouche j'aurais eu du mal à y croire.
ANTOINE : La courtoisie vous empêche peut-être d'avouer que vous ne me croyez pas non plus quand je vous le décris. Mais ce qui m'arriva ensuite fut plus étrange encore.
VINCENT : Contez-moi cela, mon oncle !
ANTOINE : J'interrogeai deux médecins. Ils m'affirmèrent que j'avais dû tomber dans un demi-sommeil et rêver de telles sensations. D'après eux, cela ne pouvait pas être. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Lun 17 Juil - 22:14 | |
| IV. DANS LA CONTRITION ON EST À LA FOIS HEUREUX ET TRISTE
(...)VINCENT : Vous n'en avez pas moins maintenu votre point de vue ?
ANTOINE : C'est vrai. Mais il se passa alors autre chose. Une jeune fille de cette ville à qui certain de ses parents avait enseigné un peu de médecine, me dit qu'une telle maladie existait effectivement.
VINCENT : Par Notre-Dame, mon oncle, sauf le respect que je vous dois, je n'aurais jamais eu confiance dans les affirmations de cette jeune fille. Je la crois actuellement digne de foi, mais à l'époque, elle aurait pu mentir pour paraître savante.
ANTOINE : Peut-être, mais elle me montra dans Galien le chapitre De differentiis febrium, qui traite de cette maladie.
VINCENT : Vraiment, mon oncle, ce fut pour vous un heureux hasard de rencontrer cette jeune personne. Elle était, en ce qui concerne cette maladie, beaucoup plus savante que vos deux médecins et je suppose qu'à présent elle en sait beaucoup plus long qu'eux.
ANTOINE : Je le crois aussi. Elle est très docte, très sage et très vertueuse.
Mais voyez maintenant quel tour me joue mon grand âge : je ne puis me souvenir pour quelle raison je vous raconte cette histoire ! Ah ! J'y suis ! Je voulais comparer cet état, où je me trouvais simultanément brûlant et glacé, avec la contrition, où l'on est à la fois joyeux et triste. Saint Jérôme dit : « Sois tout à la fois triste, et en même temps joyeux d'éprouver cette tristesse. »
Celui qui connaît ce genre d'épreuve, le bienfaisant regret de la faute et la vraie contrition, n'a besoin d'aucune consolation. Il lui suffit de penser à la grande Miséricorde de Dieu, qui dépasse de beaucoup tous les péchés. Notre-Seigneur est prêt à recevoir tous les hommes. Il a étendu ses deux bras sur la croix pour mieux les accueillir tous. Il y était lorsqu'il accueillit le larron, qui pourtant ne s'est tourné vers Dieu que lorsqu'il ne pouvait plus commettre aucun larcin. Cependant « il y aura plus de joie dans le ciel pour un pécheur qui se repent que pour quatre-vingt-dix-neuf justes qui n'ont pas besoin de repentir » (Lc., 15, 7).
Là-dessus je ne parlerai plus de ce premier genre d'épreuve.
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Mer 19 Juil - 9:01 | |
| V. CONCERNANT CEUX QUI NE SE TOURNENT VERS DIEU QU'AU DERNIER MOMENT
VINCENT : En vérité, mon oncle, il y a là une grande consolation, si grande que bien des gens peuvent persévérer dans le péché, sûrs d'être sauvés à la fin comme le fut le larron repentant.
ANTOINE : C'est vrai, mon neveu, certains hommes sont assez pervertis pour abuser de la grande bonté de Dieu. Plus il se montre généreux, plus on s'enfonce dans le péché. Mais, s'il est vrai qu' « il y a plus de joie au ciel pour un pécheur qui se repent... » à cause de la crainte que Dieu et les saints éprouvaient à voir un homme en danger de perdition, sa place au ciel n'est pas la même que s'il avait toujours marché dans le droit chemin, à moins toutefois qu'après sa conversion il ne rejoigne et ne dépasse les gens de bien. C'est ce qui arriva à saint Paul qui, de persécuteur, devint apôtre et travailla plus que tout autre à semer la parole du Christ. Il ne craignait pas de proclamer lui-même : « J'ai travaillé plus qu'eux tous » (I Cor., 15, 10).
Je ne doute pas, cher neveu, que Dieu soit clément envers tous ceux qui se tournent vers lui, à quelque moment de leur vie qu'ils le fassent, fût-ce à la dernière extrémité. Il admet au ciel même ceux qui viennent travailler à sa vigne quand les autres ont fini (Mt., 20). Pourtant, il serait bien imprudent de se fier à cette parabole pour persévérer dans le péché. Personne ne se rend à la vigne sans y être appelé. Celui qui, dans l'espoir qu'il sera tout de même appelé le soir, dort toute la matinée et boit le reste du temps risque fort de n'être pas convoqué, et d'être envoyé « au lit sans souper ».
Il y avait une fois un homme qui se flattait de vivre toute sa vie selon son bon plaisir, car trois mots prononcés juste avant de mourir lui assureraient, disait-il, une éternité bienheureuse. Il n'atteignit jamais la vieillesse, car un jour, son cheval fit un écart sur un pont en ruines. Quand il vit qu'il ne pouvait se dégager et qu'il allait tomber dans l'eau mon bonhomme s'écria dans son désespoir : « Enfer et damnation ! » Et ce furent ses dernières paroles. C'est là-dessus qu'il avait fondé tout son espoir pendant sa misérable vie.
Inutile pour le pécheur de se répéter : la grâce viendra plus tard. La grâce ne vient que par la volonté de Dieu, et un tel état d'esprit peut être un obstacle à tout bienfaisant repentir. Le pécheur risque de traîner sa négligence toute sa vie ou alors de se faire de vains et tardifs soucis, sans jamais parvenir à la grâce et, finalement, de sombrer dans le désespoir.(...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Mer 19 Juil - 22:07 | |
| VI. CERTAINS PRÉTENDENT QU'IL NE FAUT PAS REGRETTER SES PÉCHÉS
VINCENT : C'est vrai, mon oncle. Mais certaines gens disent que nous ne devons pas regretter nos péchés, qu'il nous suffit de prendre la résolution de nous amender et de ne plus penser au passé. Quant au jeûne et aux mortifications imposées au corps, ils disent que nous devons nous en abstenir, sauf s'il faut dominer une chair qui s'amollit et commence à regimber.
Le jeûne, disent-ils, sert à maintenir le corps dans la tempérance. Mais d'après eux, jeûner ou accomplir quelque bonne action telle que la charité en vue de nous faire pardonner nos péchés, c'est insulter à la Passion du Christ, qui seule nous en vaut la rémission. D'après eux, ceux qui veulent faire pénitence pour leurs fautes voudraient être leur propre sauveur, payer eux-mêmes leur rançon, racheter eux-mêmes leur âme. C'est pour cette raison qu'en Saxe beaucoup de gens n'observent plus le jeûne, et ne s'imposent plus d'épreuve corporelle, excepté pour parvenir à la tempérance. Cela ne peut nous faire aucun bien, disent-ils, ni à nous ni à notre prochain. Ils condamnent ces pratiques comme superstitieuses. Regretter nos erreurs leur paraît honteux, puéril, efféminé. Pourtant leurs femmes sont devenues si viriles et si peu puériles qu'elles s'endurcissent dans le péché. Tout comme les hommes, elles ne craignent pas de s'y livrer et ensuite n'en ressentent ni honte ni remords.
Mon oncle, je m'étonnai moins quand j'entendis leurs prédicateurs. Quand je me rendis en Saxe, ces doctrines n'existaient encore qu'à l'état de tendances. Luther n'était pas encore marié et les gens d'Église avaient gardé toutes leurs habitudes, mais ceux qui voulaient être de la Secte pouvaient déjà prêcher librement. J'écoutai moi-même le prêche d'un religieux de grand renom, homme austère et grave. Ciel, quel sermon ! Il me semble que je l'entends encore. Il avait une voix bien timbrée et une grande érudition. Il mettait les fidèles en garde contre le jeûne et la douleur qu'on s'inflige par pénitence. Il appelait cela des inventions humaines. Il criait à ceux qui recommandent ces pratiques de s'en tenir aux lois du Christ, d'abandonner ces puériles pénitences, de s'amender spirituellement et de chercher le salut uniquement dans la Passion et dans la mort du Christ. « Il est notre juge, notre sauveur et c'est lui qui s'est sacrifié pour tous nos péchés mortels. Il a fait pénitence sur la croix. Il nous a lavés par l'eau qui s'écoula de son flanc et il nous a tirés des griffes du démon en répandant son sang précieux. Laissez donc ces inventions humaines, ces carêmes imbéciles et ces puériles pénitences. C'est la mort du Christ, vous dis-je, qui doit nous sauver tous, la mort du Christ et non nos propres œuvres. Ne jeûnez pas !(...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Jeu 20 Juil - 23:55 | |
| VI. CERTAINS PRÉTENDENT QU'IL NE FAUT PAS REGRETTER SES PÉCHÉS
VINCENT (...)Abandonnez-vous au Christ, mes frères, en raison de sa douloureuse Passion ! » Il faisait sonner si fort à leurs oreilles le nom du Christ, il parlait avec un tel feu de la « douloureuse Passion », tant de sueur lui mouillait les tempes que je ne m'étonnai pas de voir dans son auditoire de pauvres femmes pleurer. Moi-même, je sentais en l'écoutant mes cheveux se dresser sur ma tête.
Les gens autour de lui étaient si ébranlés que quelques-uns n'observèrent plus le jeûne désormais. Ce n'était de leur part ni faiblesse ni malice, mais presque de la piété tant ils craignaient de manquer de reconnaissance pour la « douloureuse Passion du Christ ». Mais une fois sur cette pente, ils en vinrent à accepter bien des choses qui les eussent indignés auparavant.
ANTOINE : Plaise à Dieu, mon neveu, qu'il change l'âme de cet homme et qu'il garde tous ses fidèles de pareils prédicateurs ! Un sermonneur comme celui-là abuse plus du nom du Christ et de sa Passion que mille enragés joueurs qui blasphèment et se parjurent en jetant les dés ! En leur lançant le nom du Christ à la tête, ces gens font oublier à leurs ouailles l'enseignement de l'Église, à savoir que, sans le Christ et sa Passion, les pénitences que nous nous imposons seraient sans aucune valeur. Ils leur font croire que nous pouvons nourrir la prétention d'être sauvés par nos propres œuvres, alors que nous professons que sa Passion mérite infiniment plus que nos œuvres, mais qu'il lui plaît que nous souffrions avec lui, car il a dit : « Qui ne prend sa croix et ne vient à ma suite n'est pas digne de moi »(Mt., 10, 38 et 11, 24 ; Mc., 8, 34 ; Lc., 9, 23 et 14, 27). Ils soutiennent que le jeûne ne sert qu'à dominer la chair et à la garder de la luxure. Mais alors je devrais croire que Moïse était bien perverti lui qui eut besoin de jeûner quarante jours d'affilée ! Et Élie ! Et Notre-Seigneur lui-même, qui jeûna quarante jours pour le Carême, et les apôtres qui l'imitèrent, ainsi que tous les chrétiens, de génération en génération.
Ce n'est pas pour lutter contre la luxure que le roi Achab jeûna, s'en alla vêtu de sacs et répandit des cendres sur sa tête (1 R., 21, 27). Pas plus que le roi de Ninive et toute la population de cette ville lorsqu'ils se mirent à gémir et entrèrent en pénitence afin que Dieu les prît en pitié et calmât son courroux (Jon., 3). Anne qui, dans son veuvage, passa tant d'années à prier dans le temple jusqu'à la naissance du Christ (Lc., 3), n'était pas, je suppose si portée à la luxure, elle si chargée d'ans, qu'elle eût besoin de jeûner. Saint Paul jeûna souvent, mais pas seulement à cette fin. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Ven 21 Juil - 23:11 | |
| VI. CERTAINS PRÉTENDENT QU'IL NE FAUT PAS REGRETTER SES PÉCHÉS
ANTOINE : (...) À maints endroits, l'Écriture nous prouve que le jeûne n'est pas une invention humaine, mais une institution divine, et qu'il a plus d'une utilité. Nous voyons aussi que le jeûne de telle personne peut être profitable à telle autre. Notre Seigneur l'affirme quand il dit que certains démons ne peuvent être chassés du corps des possédés « que par la prière et par le jeûne » (Mc., 9, 29).
Je m'étonne vraiment que ces gens parlent ainsi du jeûne et de la pénitence corporelle, mais ce qui me stupéfie c'est qu'ils désapprouvent le repentir qu'on peut éprouver de ses péchés. Le prophète dit :« Mettez en lambeaux vos cœurs et non vos vêtements » (Jb., 2, 12).
Et David dit : (Seigneur) « Tu ne dédaignes pas un cœur contrit et brisé » (Ps., 51, 19), ce qui veut dire un cœur brisé par le chagrin que causent les péchés. Il dit aussi de sa propre contrition : « Je me suis épuisé en gémissements, chaque nuit je baigne ma couche de mes larmes et j'arrose mon lit de mes pleurs » Ps., 6, 7 et 8 Mais pourquoi vous citer un ou deux passages ? L'Écriture en est pleine. Évidemment, Dieu considère que nous devons non seulement nous amender en vue de l'avenir, mais aussi déplorer profondément nos péchés passés. Les Docteurs proclament unanimement que les hommes doivent ressentir de la contrition pour leurs chutes et pleurer dans leur cœur sur leurs fautes.
VII. OÙ IL EST QUESTION DE CEUX QUI NE PEUVENT TROUVER EN LEUR CŒUR LE REGRET DE LEURS FAUTES
VINCENT : En vérité, mon oncle, ce langage me semble un peu dur. Non que je ne sois d'accord avec vous sur l'ensemble, mais il arrive qu'un pécheur, même s'il le désire, ne parvienne pas à regretter son péché. Il y en a qui, se rappelant leur défaillance, ne peuvent s'empêcher d'en rire. Si la contrition et la tristesse étaient indispensables à la rémission des fautes, bien des gens, ce me semble, seraient en dangereuse posture.
ANTOINE : Bien des gens y sont en effet ! Les saints sont sévères sur ce chapitre. Mais « Ses tendresses s'étendent sur toutes ses créatures » (Ps., 145, 9) et « Il n'est soumis à aucune règle, il connaît la fragilité de ces esquifs qu'il fit lui-même, il est miséricordieux, il prend en pitié et en compassion nos faiblesses, il n'exigera pas de nous plus que nous ne pouvons lui donner » (Ps., 103).
Mon neveu, celui qui est dans cet état d'esprit doit remercier le Seigneur de n'être pas pire, et d'avoir au moins l'intention de mieux vivre à l'avenir. Mais puisqu'il ne parvient pas à regretter ses fautes, qu'il déplore au moins de ne pas s'être, d'ores et déjà, amélioré.(...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Sam 22 Juil - 22:06 | |
| VII. OÙ IL EST QUESTION DE CEUX QUI NE PEUVENT TROUVER EN LEUR CŒUR LE REGRET DE LEURS FAUTES
ANTOINE : (...) Saint Jérôme dit à celui dont le cœur est rempli de contrition de se réjouir à cause même de cette contrition ; moi je conseille à celui qui ne peut se repentir de s'attrister parce qu'il ne peut le faire.
Je souhaite que jamais personne ne désespère. Mais qu'il prenne bien garde celui qui ne peut parvenir à la contrition. Car c'est l'indice d'une foi qui s'amollit, d'une piété qui se relâche.
Si nous étions pénétrés de la foi en Dieu, si nous nous inclinions devant sa majesté, si nous pensions à son immense bonté, alors nous devrions trembler de terreur devant lui ; notre cœur devrait se briser, car l'amour et la gratitude devraient le faire éclater en sanglots. J'ajoute que le fait de ne ressentir aucun regret d'un péché dénote un manque de pureté, et rien d'impur ne peut entrer au ciel. Je donne à ceux qui se trouvent dans cet état le conseil que Maître Gerson (1) donne à tout le monde : puisque l'homme a un corps et une âme, moins l'âme est affligée, plus il faut imposer de souffrance au corps, plus il faut purger l'esprit par le mortifiement de la chair.
En agissant ainsi, on finira par avoir le cœur gonflé de larmes et on sentira se répandre dans l'âme une bienfaisante tristesse en même temps qu'une céleste joie. Il ne faut jamais manquer non plus de joindre à ces pratiques vertueuses une prière pleine de confiance.
Cher neveu, je vous ai dit l'autre jour que sur ces sujets je ne voulais pas discuter avec ces hommes nouveaux, mais je ne puis pourtant pas leur donner raison, car, pour autant que mon pauvre esprit puisse discerner, la Sainte Écriture de Dieu leur donne entièrement tort, ainsi que toute la chrétienté. Ils ont contre eux les gens qui ont vécu dans le pays même de ces novateurs ainsi que les saints Docteurs et les saints interprètes de l'Écriture, qui ont vécu au cours des âges. Si ces novateurs découvrent tout à coup que l'Écriture a de tout temps été mal comprise, que parmi tous ces Docteurs des siècles passés il n'en était pas un qui eût pu l'interpréter correctement, alors je devrais me mettre à mon tour à étudier l'exégèse.
Hélas ! Je suis trop vieux pour cela. Je n'ose pourtant pas me fier à la science de ces novateurs, mon neveu, car je ne vois pas pourquoi ils ne se tromperaient pas aussi bien que les autres se sont, à les en croire, trompés avant eux. Cependant ; s'ils ne se sont pas trompés, s'ils ont vraiment trouvé un chemin si facile vers le ciel, soit ! Qu'ils ne réfléchissent pas, qu'ils mènent joyeuse vie, qu'ils ne fassent pas pénitence, mais trinquent à la santé de Notre Sauveur et qu'on remplisse les verres !
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Dim 23 Juil - 22:56 | |
| VII. OÙ IL EST QUESTION DE CEUX QUI NE PEUVENT TROUVER EN LEUR CŒUR LE REGRET DE LEURS FAUTES
ANTOINE : (...) La Passion du Christ paiera l'écot ! Ce n'est pas moi qui envierai leur chance, mais je ne conseille à personne de s'aventurer avec eux sur cette voie-là !
Ceux qui jugent dangereux ce chemin, ceux qui préfèrent l'épreuve de la mortification et du repentir y trouvent le merveilleux réconfort dont je vous ai entretenu. Et puisque ces personnages s'ébaudissent si aisément au sujet de la pénitence, nous ne leur parlerons pas non plus du réconfort qu'ils y pourraient trouver.
VIII. DE L'ÉPREUVE QUE L'ON SUPPORTE AVEC PATIENCE
VINCENT : Je vous remercie de m'avoir si bien éclairé, mon oncle. Parlez-moi maintenant de ce point que vous vous proposiez de traiter en dernier.
ANTOINE : Bien volontiers, cher neveu. Nous traiterons maintenant des épreuves que j'avais rangées dans la deuxième catégorie, celles qui sont supportées avec patience sans toutefois avoir été voulues.
Nous diviserons cette catégorie en deux branches : la première, nous l'appellerons tentation, la seconde persécution. Mais ici, il nous faut observer que je ne veux pas parler de toute espèce de persécution mais seulement de celles qu'on se résout à supporter patiemment pour ne pas déplaire à Dieu. Pourtant, si nous y réfléchissons, nous verrons que chacune d'elles agit sur l'autre et vice-versa car, par la tentation le diable nous persécute et par cette persécution il nous tente. Et, si la persécution est une épreuve pour tout le monde, la tentation est une épreuve pour l'homme de bien. Toutes deux sont des armes du Malin, mais la différence entre elles est la suivante : la tentation est une embûche et la persécution un combat à visage découvert. Cette sorte de tribulation dont nous parlons maintenant, je l'appellerai tentation et je ferai deux divisions : dans la première, nous verrons les embûches du démon, dans la seconde, ses combats à visage découvert.
IX. DE LA TENTATION EN GÉNÉRAL
Il serait trop long de parler de chaque espèce de tentation, car il faudrait également parler des persécutions. Le démon a mille ruses pour nous prendre au piège et dans ses combats il lance mille dards empoisonnés. Il nous tente par la vie du monde, il nous tente par notre propre chair, par le plaisir, par la peine, par nos ennemis, par nos amis ; il lui arrive même, à l'intérieur d'une famille, de transformer en ennemis des êtres chers. Notre Sauveur a dit : Inimici hominis domestici eius (Mt., 10, 36). (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Lun 24 Juil - 23:37 | |
| IX. DE LA TENTATION EN GÉNÉRAL
(...) Pourtant, dans toutes ces tentations, nous pouvons trouver une consolation merveilleuse, c'est que plus forte est la tentation plus nous devons nous en réjouir.
Écoutons saint Jacques : « Heureux celui qui supporte l'épreuve ! Sa valeur une fois reconnue, il recevra la couronne de vie que le Seigneur a promise à ceux qui l'aiment » (Jc., 1, 12).
Dans ce monde, il y a un perpétuel combat entre le peuple de Dieu et ces lutteurs puissants et rusés que sont les démons, esprits orgueilleux et damnés. En effet, ce n'est pas seulement contre notre chair que nous devons lutter mais aussi contre le démon. Et saint Paul dit : « Car ce n'est pas contre des adversaires de chair et de sang que nous avons à lutter mais contre les Principautés, contre les Puissances, contre les régisseurs de ce monde de ténèbres, contre les Esprits du Mal qui habitent les espaces célestes » (Eph., 6, 12). Dieu a préparé des couronnes pour ceux qui luttent à ses côtés et repoussent victorieusement l'ennemi – et celui qui ne lutte pas n'en recevra pas. Comme le dit saint Bernard : comment lutter s'il ne se présente aucun ennemi ? Saint Jacques a donc raison d'affirmer que nous devons nous sentir joyeux de subir des tentations, car sauf si nous avons la lâcheté d'y succomber, elles seront la cause même de notre éternelle félicité.
X. UN RÉCONFORT QUI PEUT SE TROUVER QUAND ON SUBIT N'IMPORTE QUELLE TENTATION
Si la foi est vive, on éprouvera un inestimable réconfort à se dire que Dieu est toujours prêt à donner de la force contre la méchanceté et les embûches du démon.
Le prophète dit : « Ô mon Dieu, mon Seigneur, la force de mon salut, tu me couvres la tête au matin du combat » Ps., 140, 8
Demandez à Dieu la sagesse, il vous la donnera. « Revêtez l'armure de Dieu, dit saint Paul, pour pouvoir résister aux assauts du démon » (Eph., 6, 11).
Dieu étend sa main sur celui qui veut résister au péché et qui fait appel à lui. Il a promis souvent dans son Écriture, de ne pas laisser choir ses fidèles, et si parfois il leur arrive de trébucher par faiblesse, ils ne se blesseront pas, à la condition d'invoquer l'aide du Seigneur. L'Écriture dit du juste : « Quand il tombe, il ne reste pas terrassé, car Dieu lui soutient la main »(Ps., 37, 24). (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Mar 25 Juil - 21:55 | |
| X. UN RÉCONFORT QUI PEUT SE TROUVER QUAND ON SUBIT N'IMPORTE QUELLE TENTATION
(...) Le prophète exprime une véritable promesse de Dieu contre les tentations quand il dit : « Celui qui se confie à Dieu est en sûreté » (Ps., 29, 25). Or, qui se confie à Dieu, cher neveu ? C'est évidemment celui qui, par une foi très vive, se garde du désespoir, celui qui sait qu'il trouvera toujours un soutien dans sa lutte contre la chair, contre le monde, contre le démon. Donc, une foi solide, une ferme confiance dans l'aide de Dieu assurent la sauvegarde divine, ce qui veut dire que, dans la tentation, Dieu ne manquera jamais de protéger ses fidèles. Et le prophète poursuit : « Il te couvre de ses ailes, tu trouveras un refuge sous son pennage » (Ps., 91).
Voici, n'est-ce pas, une promesse certaine pour tout homme dont la foi est vive ; il est assuré que dans la fièvre de la tentation ou de l'épreuve (car, je vous l'ai dit, le démon emploie chaque épreuve pour nous faire perdre patience et nous amener à blasphémer et toute tentation est une épreuve pour le juste) voici donc une promesse que Dieu fait à celui qui croit en lui, de le soutenir dans la tentation. Quelle arme satanique est assez puissante pour nous atteindre si nous sommes protégés par le Seigneur ?
Le psaume continue et dit au croyant : « Lui te couvre de ses ailes, tu trouveras un refuge sous son pennage... » C’est-à-dire, à cause de l'espoir que tu mets en lui, il t'élèvera jusqu'auprès de lui pour te protéger, comme la poule défend ses poussins du vautour en les rassemblant sous ses ailes. Ainsi, pour protéger son peuple fidèle des griffes du démon, et pour le mettre en sûreté, Dieu l'abrite dans la tutélaire chaleur de ses ailes divines. Notre-Seigneur lui-même fit allusion à cette sauvegarde quand il parla aux Juifs comme le rapporte saint Matthieu dans son chapitre XXIII : « Jérusalem, Jérusalem ! toi qui tues les prophètes et lapides ceux qui te sont envoyés, que de fois j'ai voulu rassembler tes enfants, comme une poule rassemble ses poussins sous ses ailes... et tu ne l'as pas voulu » (Mt., 23, 37).
Voilà, n'est-il pas vrai, des paroles très réconfortantes pour des chrétiens. Dieu nous y montre sa tendre affection et sa grande bonté. Il voudrait nous abriter, comme une poule ses poussins. Souvent il rappelle ses enfants menacés par le vautour vers l'ombre protectrice de ses ailes, mais plus il appelle, plus nous nous éloignons. Et cependant, n'en doutons point, si nous répondons à sa voix, si nous accourons vers lui, le cœur gonflé d'espoir, il nous prendra sous son aile en cas de tentation. Là, nous serons en sécurité : rien ne pourra plus nous déloger, ni porter atteinte à notre âme. « Prends-moi près de toi, dit le prophète, et que vienne m'attaquer qui voudra ! » Et pour mieux montrer à quel point nous serons en sécurité auprès de lui, le prophète précise : In velamento alarum tuarum exultabo. Cela ne veut pas seulement dire que sous ses ailes nous serons en sûreté ; cela signifie que nous nous y épanouirons dans l'allégresse.(...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Mer 26 Juil - 21:33 | |
| XI. QUATRE FORMES DE TENTATIONS DONT IL EST QUESTION DANS LES PSAUMES
Dans les deux vers suivants, le prophète mentionne quatre formes de tentations et par la même occasion les épreuves dont je voudrais vous entretenir maintenant et même quelques-unes dont nous avons déjà parlé. Ainsi en terminerai-je, je l'espère, avec le sujet qui nous occupe. Le prophète dit dans le psaume quatre-vingt-dixième : « Sa fidélité t'environnera d'une armure, tu ne craindras ni les terreurs de la nuit, ni la flèche qui vole de jour, ni le trafic se déplaçant dans les ténèbres, ni l'agression du démon de midi ». Voyons d'abord le premier vers. Sa fidélité t'environnera comme une armure, un bouclier, une cuirasse : cela signifie que Dieu a promis de défendre et de protéger ceux qui mettent en lui leur confiance et qu'il tiendra sa promesse. Sa fidélité te défendra toi aussi qui lui es fidèle, non seulement d'un écu de petit format qui pourrait tout juste te couvrir la tête mais bien d'une grande cuirasse qui préserve tout le corps. « Le bouclier de ce psaume, dit saint Bernard, est large en son chef car la partie supérieure, c'est la divinité, et étroit dans sa pointe, car sa partie inférieure c'est l'humanité de Notre Sauveur Jésus-Christ. » Pourtant, ce bouclier ne ressemble pas à ceux que nous connaissons, qui protègent seulement une partie du corps et laissent les autres vulnérables. Mais, comme dit le prophète : il te ceindra de tous côtés, et tes ennemis ne pourront en aucune façon blesser ton âme. Puis il montre que le diable nous attaque par quatre sortes de tentations et épreuves à la fois et qu'il est nécessaire d'être bien protégés. La fidélité du Très-Haut nous défendra le mieux du monde et nous n'aurons rien à craindre aussi longtemps qu'elle nous enveloppera.
XII. LA PREMIÈRE DES QUATRE TENTATIONS
« Tu ne craindras pas les terreurs de la nuit ». Par le mot « nuit », l'Écriture entend parfois épreuve, souffrance, comme il apparaît dans le ch. 34 du livre de Job : « Dieu connaît leurs œuvres et il les plonge dans la nuit », ce qui veut dire qu'il les enfonce dans la douleur pour les punir de leur méchanceté. Vous savez que la nuit nous apporte malaises et frayeurs. Aussi donnerai-je à ces mots : « terreurs de la nuit » le sens d'épreuves par lesquelles le diable tente les justes et s'efforce de les amener à regimber, comme il le fit pour Job. Mais celui qui garde vive en son cœur la confiance en Dieu sera merveilleusement cuirassé et n'aura rien à craindre de ce qu'on appelle ici les terreurs de la nuit. On les appelle ainsi pour deux raisons : la première est que, le plus souvent, celui qui en souffre discerne mal la cause de son épreuve. Ces épouvantes nocturnes diffèrent en cela de ces combats à visage découvert que sont les luttes engagées par le diable lorsqu'il veut empêcher un juste de faire le bien ou l'inciter à commettre une mauvaise action. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Jeu 27 Juil - 23:51 | |
| XII. LA PREMIÈRE DES QUATRE TENTATIONS
(...) La seconde raison c'est que la nuit pousse tout naturellement à la terreur, et, l'imagination aidant, on se voit alors entouré d'objets effrayants. Le prophète dit dans les psaumes : « Tu poses les ténèbres, c'est la nuit, toutes les bêtes des forêts s'y remuent ; les lionceaux rugissent après la proie et réclament à Dieu leur manger » (Ps., 104, 20). Sachez bien que si les lionceaux rugissent dans la nuit et y cherchent leur proie, ils n'en trouveront point d'autre que celle qu'il plaît à Dieu de leur accorder. Ils n'en sont pas conscients, mais c'est pourtant à Dieu qu'ils la demandent et de lui qu'ils la reçoivent. Et ceci peut être un réconfort pour tous les justes dans leurs effrois nocturnes : même s'ils sont les victimes des démons, ceux-ci ne peuvent s'attaquer qu'à leur corps, lequel n'est que l'enveloppe de l'âme. L'âme elle-même, qui est la substance de l'homme, est trop fermement protégée par le bouclier de Dieu pour qu'un simple lionceau puisse lui faire le moindre mal, aussi longtemps qu'elle gardera sa confiance en l'aide de Dieu. Le « grand lion » lui-même ne put tourmenter Job que dans la mesure où Dieu lui en accorda la permission.
Les sombres ténèbres de la mi-nuit plongent l'infidèle dans une grande terreur. Il lui manque la lumière de la foi, qui lui ferait comprendre que le danger n'est pas aussi grand qu'il le craint. Mais nous sommes habitués à attribuer une grande importance à notre corps parce que nous le voyons, nous le sentons, son entretien et sa nourriture font l'objet de tous nos soins, tandis que rarement, hélas ! nous pensons à notre âme. Nous ne pouvons la voir que par les yeux de la foi, dans les méditations spirituelles auxquelles nous accordons si peu de temps que nous en arrivons à considérer la perte de notre corps comme un malheur beaucoup plus grand que la perte de notre âme.
Notre Sauveur nous dit de n'avoir nulle crainte de ces petits lions qui ne peuvent s'attaquer qu'à notre corps, mais il nous recommande de redouter le Lion dévorant qui, après avoir frappé le corps, peut entraîner l'âme dans le feu éternel. Pourtant, une fois plongés dans la sombre nuit de la souffrance, nous n'avons plus confiance dans la parole de Dieu ; les terreurs de la nuit nous enveloppent et nous font craindre de souffrir dans notre corps. Saint Paul affirme à divers endroits que le corps n'est que l'enveloppe de l'âme. Mais si faible est notre foi en la parole de Dieu, si obscure la nuit où nous plonge la souffrance que nous craignons plus pour notre corps que pour notre âme, pour le contenant que pour le contenu et même pour tout ce qui pourrait flatter le contenant. Nous sommes encore plus stupides qu'un homme qui se jette à l'eau plutôt que d'abîmer un vieux vêtement. Rappelez-vous que, dans les versets que je vous ai cités, le prophète ne parle pas seulement des lionceaux rugissant dans la nuit mais aussi de toutes les bêtes des bois. Vous savez aussi bien que moi que, la nuit, on a peur de choses qui sont en réalité parfaitement inoffensives. La nuit, pour un homme qui a peur, chaque buisson est un brigand. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Lun 7 Aoû - 0:18 | |
| XV. LES TERREURS DE LA NUIT ET LA TENTATION DU SUICIDE
ANTOINE : (...) À ces mots, le diable intervint et affûta la dite langue sur les dents de la virago. Alors elle provoqua méchamment son homme, « Par la Messe, fils de putain, vas-y ! Tiens, voici ma tête ! » Et elle posa sa tête sur le billot. « Si tu ne la coupes pas, je te maudis, fils de putain ! » À ce moment, il semble bien que le diable se tenait au côté de la femme tandis que près du mari se tenait son ange gardien, qui lui donna le courage d'agir. Et voilà comment cet homme tua sa femme. Des gens avaient entendu la mégère et s'amusaient de ses propos, mais ils ne prévoyaient pas ce qui allait se passer, et ce fut fait avant qu'ils aient eu le temps d'intervenir. Ils racontèrent avoir entendu la tête séparée du corps continuer à lancer ses insultes : « Fils de putain, fils de putain ! » Ils en témoignèrent ensuite devant le roi, sauf une femme, qui affirma n'avoir rien entendu.
VINCENT : Quelle étrange histoire ! Et qu'arriva-t-il au mari ?
ANTOINE : Le roi lui donna son pardon.
VINCENT : En conscience, il ne pouvait faire moins.
ANTOINE : Mais ensuite, on voulut promulguer un édit : en pareille circonstance, le mari (à condition de pouvoir prouver la vérité de ses accusations contre son épouse) n'aurait pas besoin de pardon mais serait libre d'agir comme le charpentier.
VINCENT : Comment se fait-il que cette bonne loi ne dépassa jamais l'état de projet ?
ANTOINE : Comment cela se fait-il ? Mais, cher neveu, bien des lois aussi justes sont restées à l'état de projet ! Ici et ailleurs, parfois, on en a même promulgué de mauvaises à la place. On dit que c'est la reine qui empêcha celle-ci de sortir. Dieu lui pardonne ! C'est la plus grande faute dont cette bonne dame eut à rendre compte quand elle mourut car, à part cela, elle fut toujours une bonne personne.
Quoi qu'il en soit, il semble bien que la tentation de provoquer sa propre mort ne fut pas une épreuve pour la femme du charpentier. Elle aimait penser à son trépas et même elle le désirait. Supposez qu'elle ait fait part de son projet à vous ou à moi, nous n'aurions pas eu l'occasion de la réconforter, comme une âme en peine, mais, naturellement, nous aurions pu la conseiller comme je vous l'ai dit plus tôt, et tâcher de la faire renoncer à son infernal projet.
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Mar 8 Aoû - 10:00 | |
| XV. LES TERREURS DE LA NUIT ET LA TENTATION DU SUICIDE
(...) VINCENT : C'est vrai, mais ceux qui nourrissent d'aussi noirs desseins n'en parlent à personne : ils ont trop honte.
ANTOINE : Il y en a, en effet, qui n'en parlent pas, mais d'autres vont jusqu'à trouver des gens qui les aident à les réaliser. Il n'y a pas bien longtemps, un voyageur venu de Vienne nous raconta cette autre histoire : Une riche veuve, orgueilleuse et méchante (les deux vont de pair) était en brouille avec son voisin. Elle entra en relation avec un autre voisin, peu fortuné, dont elle pensait pouvoir se servir en l'achetant. Elle lui parla secrètement et lui offrit dix ducats s'il acceptait de venir un matin chez elle et de lui couper la tête avec une hache, puis d'aller, toujours secrètement, déposer la hache dans la propriété du voisin avec qui elle était en querelle, de façon à faire croire qu'il était l'assassin. Elle pensait qu'elle serait considérée comme une martyre et même, se disait-elle, en y ajoutant une somme d'argent qu'on enverrait à Rome en même temps qu'un rapport, elle pourrait être canonisée.
L'homme pauvre promit, sans avoir l'intention de tenir sa promesse. Mais quand il voulut renvoyer à plus tard l'exécution de ce noir projet, elle lui fournit elle-même une hache. Ils décidèrent du jour où il viendrait chez elle. Ce matin-là, il vint, mais il plaça aux environs des gens qui seraient témoins de la folie de cette femme, il les cacha de telle sorte qu'ils pussent entendre. Quand il eut parlé pendant un moment avec la femme, il lui dit de se préparer et il saisit la hache d'une main. De l'autre, cependant, il tâta le tranchant et lui trouva un défaut ; il déclara qu'il fallait aiguiser cette hache, sans quoi il risquait de faire souffrir la patiente. Exaspérée de ces retards, elle se pendit de ses propres mains.
VINCENT : Voilà une bien tragique histoire, je n'ai jamais entendu rien de pareil.
ANTOINE : Celui qui me l'a racontée jura que c'était la vérité. Et c'est quelqu'un de confiance. Voici donc une femme qui n'hésita pas à faire part de ses projets à un tiers, et je connais personnellement celui à qui elle confia l'argent qui devait lui assurer la canonisation. La tentation que subissait cette femme n'était pas, je crois, causée par la peur, mais par la méchanceté et l'orgueil. Elle caressait avec délices ses diaboliques projets et, comme je vous l'ai dit, cela ne lui causait aucun souci, aucune peine. Elle n'aurait eu que faire de paroles réconfortantes. Tout ce qu'on aurait pu tenter, c'eût été de la conseiller sagement. Je vous l'ai dit, dans cette tentation du suicide c'est de conseils qu'on a besoin, non de réconfort ; nous sortons donc ici de notre sujet. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Mer 9 Aoû - 1:40 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
Pour bien vous montrer que ces deux exemples ne sont pas inventés, je vous rappellerai une histoire que vous avez lue dans les conférences de Cassien. Si vous ne l'avez pas lue vous pourrez facilement l'y trouver. Je l'ai moi-même à moitié oubliée. Voici ce dont je me souviens : Un moine vécut longtemps comme un saint dans le désert. Il jouissait de l'estime de ses confrères et des anachorètes. Pourtant, quelques-uns craignaient que les nombreuses révélations qu'il faisait ne fussent des tromperies du démon. Par la suite, on vit bien que c'en étaient, car le diable l'avait si subtilement envoûté, il lui avait insufflé un tel orgueil que, finalement, il l'amena à se tuer. Pour autant que je m'en souvienne sans avoir l'ouvrage sous les yeux, il lui persuada que telle était la volonté divine et qu'ainsi il irait droit au ciel. Si tel était le motif de son suicide, il n'entre pas dans notre propos de parler de ce moine, car il se complaisait dans son idée de suicide et il avait plus besoin d'être sagement conseillé pour ne pas céder aux séductions du Malin, que d'être réconforté. Mais si le diable lui avait fait comprendre comment il avait été trompé et s'il l'avait poussé à se suicider par honte ou par désespoir, alors cette histoire entrerait dans notre sujet. Car alors son orgueil serait tombé et il aurait souffert de pusillanimité, de cette sorte de « terreur nocturne » dont je vous parlais. Si tel avait été son cas, le conseil à lui donner eût consisté en une parole encourageante.
Mais, comme je vous le disais, cet acte ne relève ni du courage, ni de la force de caractère, non seulement parce que la véritable force (qui est une vertu chez les gens raisonnables) doit toujours être accompagnée de prudence, mais aussi parce que en y réfléchissant bien on verra que le motif du suicide est une peur folle, même chez ceux qui sont connus pour leur bravoure.
Prenez par exemple Caton d'Utique, qui se tua après la victoire de Jules César. Saint Augustin déclare dans son ouvrage De civitate Dei qu'en se suicidant Caton ne fit preuve d'aucune grandeur, d'aucune force de caractère, mais seulement de manque de résistance dans l'adversité. Il n'avait pas le courage d'assister au triomphe d'un autre ni de souffrir les malheurs qu'il pressentait. Ainsi, comme saint Augustin le prouve, cet acte horrible n'exige aucun courage. Il peut être causé par une imagination perverse, qui détourne du respect de soi-même. Dans ce cas, l'homme doit être ramené à la raison par de bons conseils, ou alors, cet acte est le fait d'un homme qui manque de force de caractère. Dans ce cas, ce qu'il lui faut c'est une solide consolation, un puissant réconfort. (...) Si nous nous trouvions devant un homme très pieux, comme le père dont parle Cassien, un homme connu pour son austérité, pour sa très grande vertu, ayant une vie spirituelle très profonde, et sujet à de nombreuses et étranges visions, si donc nous nous apercevions que cet homme nourrit secrètement des idées de suicide, nous devrions, avant d'agir pour l'empêcher de les mettre à exécution, étudier son caractère et ses comportements. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Jeu 10 Aoû - 0:50 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
ANTOINE : (...) Il nous faudrait voir s'il est gai et joyeux, ou mélancolique et triste, et s'il vit dans l'espoir de mériter le ciel ou s'il a le cur lourd d'ennui et de dégoût du monde. S'il était du premier type, il faudrait croire que le diable l'a rempli de puérile vanité au moyen d'hallucinations. Un tel homme prend ses hallucinations pour la preuve que Dieu veut qu'il se tue de ses propres mains.
VINCENT : Quels conseils donner dans un tel cas ?
ANTOINE : Ce serait hors de notre sujet, puisque cet homme ne serait pas un personnage tourmenté par une épreuve mais plutôt la victime consentante d'une tentation mortelle. En parler serait allonger considérablement cette conversation et nous n'en terminerions pas aujourd'hui. Je vous dirai pourtant que le conseil à donner doit viser à ceci : se garder des embûches du démon. Mais il faut avoir beaucoup de délicatesse et de doigté pour ne pas heurter l'intéressé, car il est engourdi par la malice du démon, son esprit est occupé par un rêve fascinant et il n'écouterait pas celui qui le viendrait secouer. Il faut le réveiller avec douceur, comme un enfant.
Commencez donc par un éloge ; s'il est fier il écoutera plus volontiers les compliments que les reproches ; une fois que vous aurez gagné sa faveur, vous pourrez insinuer que ses visions sont mises en doute par telle ou telle personne. Si vous n'avez pas trop peur d'un innocent mensonge pour faire le bien (de cette espèce que saint Augustin, tout en le considérant comme un péché, déclare qu'il n'est que véniel, tandis que saint Jérôme n'est même pas aussi sévère), alors vous pouvez feindre qu'un de vos amis est dans un cas semblable. Vous pouvez dire que vous craignez pour lui le danger et que c'est par amitié pour cette tierce personne que vous venez le trouver comme un bon père à qui vous demandez son avis.
Il faut vous rappeler ces mots de saint Jean : « Ne vous fiez pas à tout esprit, mais éprouvez les esprits pour voir s'ils viennent de Dieu » (1 Jn., 4, 1) ; et ces mots de saint Paul : « Satan lui-même se déguise bien en ange de lumière » (2 Cor., 11, 14). Vous tâcherez alors de reconnaître par quel signe infaillible on peut distinguer les vraies révélations des fausses. On en trouvera dans maints auteurs et aussi dans un traité intitulé De probatione spirituum du maître Jean de Gerson. Il faut observer si le comportement de celui qui prétend avoir des visions est naturel ou non, s'il paraît « pauvre d'esprit » ou vaniteux, s'il se complaît dans ses propres louanges. Il se peut qu'il soit trop fin, ou qu'il désire être admiré pour son humilité, alors il refusera d'écouter les compliments. Mais s'il montre la moindre méfiance à l'égard des révélations qui lui sont faites, s'il laisse percer la crainte de se trouver devant des illusions diaboliques, il faudrait, d'après maître Gerson, considérer que ce sont là des signes que le diable est bel et bien dans son coeur. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Ven 11 Aoû - 0:45 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
ANTOINE : (...) Si le diable est assez subtil pour rester caché et ne souffler mot, alors il faut bien observer vers quel but tendent ces révélations, si c'est vers quelque profit spirituel pour lui-même ou pour quelqu'un d'autre ou seulement de vains sujets d'émerveillement. Il faut voir si elles le libèrent de quelque vertueux devoir auquel l'oblige sa qualité de chrétien ou sa profession, ou s'il tombe dans quelque singularité d'opinion contre la sainte Écriture ou contre l'Église catholique. Maître Jean de Gerson parle de maints autres signes auxquels on peut voir si une personne qui n'a ni révélations divines ni illusions démoniaques feint d'en avoir, en vue de gagner de l'argent, de conquérir quelque faveur ou de tromper le monde.
Mais maintenant, revenons à notre sujet. Si parmi tous ces signes qui permettent de distinguer les vaines apparences des vraies révélations, cet homme avance n'importe quoi contre la Sainte Écriture ou la foi de l'Église, alors vous avez une entrée en matière par laquelle, si vous voulez, vous pouvez aborder votre sujet, et il ne vous échappera plus. Ou encore, vous pouvez aussi, si vous le voulez, feindre que cet ami pour qui vous venez demander conseil a été amené à des pensées de suicide par une apparition. Lui l'appelle un ange, vous, vous craignez bien que ce ne soit le diable. Vous affirmez ne pas parvenir à le persuader qu'il se trompe quand il soutient que Dieu veut qu'il se tue. Il s'imagine que, par ce suicide, il participera à la passion du Christ et que des anges l'emporteront au ciel. Dites que votre ami se réjouit à cette pensée, qu'il est aussi fermement résolu à se donner la mort qu'un autre à l'éviter. Vous venez demander comment vous y prendre pour détourner votre ami de son funeste projet et lui montrer son erreur, vous ne voulez pas qu'il perde son corps et son âme à cause de ces hallucinations diaboliques qu'il prend pour des révélations divines.
C'est en cherchant à vous renseigner au profit d'autrui, que l'homme, s'il est pieux, trouvera ce qui convient le mieux à son propre cas. Les arguments qu'il donnera, même s'ils sont moins bons que d'autres, auront beaucoup de prise sur lui, parce qu'il les aura trouvés lui-même. S'il refuse de vous aider, alors il ne vous reste plus qu'à attaquer de front le problème, lui dire que vous avez entendu parler de ses projets et que vous venez l'exhorter à y renoncer. À moins que vous ne désiriez dire que vous avez déjà discuté le projet avec votre ami imaginaire, ainsi vous pourriez introduire la preuve que les révélations ne sont qu'illusions.
VINCENT : Cher oncle, je vous accorde que si on veut faire du bien à quelqu'un il faut trouver une manière agréable de le faire. Si on se rend antipathique, on ne sera pas écouté et les conseils seront inutiles. Mais une fois cette sympathie acquise, quels arguments employer pour convertir ? (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Ven 11 Aoû - 22:42 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
ANTOINE : (...) Tous ceux qui feront comprendre qu'on s'est trompé, que ces « révélations » ne sont que diableries. Tout cela dépendra de la personne et des circonstances. Vous pouvez vous inspirer de l'évolution qu'a subie son caractère en lui montrant que depuis ses « révélations » il a faibli dans tel et tel domaine (ceux qui fréquentent les victimes de telles illusions remarquent des transformations semblables). Ces personnes deviennent plus orgueilleuses, plus capricieuses, plus envieuses, plus méfiantes, leur jugement n'est plus droit, ils corrompent leur entourage en se grisant de louanges et d'autres faiblesses de l'âme.
Cette évolution vous permettra de conclure si ces révélations sont fausses, ou si elles sont plus étranges que profitables. C'est le critère qui permet de distinguer les miracles de Dieu des hallucinations du démon. Le Christ et les saints font des miracles qui apportent toujours grand profit ; le diable, ses sorcières, ses nécromanciens font, avec beaucoup d'ostentation, des tours qui n'apportent rien à personne, comme un jongleur qui émerveille son monde dans une fête foraine.
En vous inspirant de la loi de Dieu vous pourrez prouver par les saintes Écritures que ce qu'on croit être ordonné par l'ange du Seigneur est justement ce que Dieu a défendu. Dans le cas qui nous occupe, c'est si facile à trouver que je n'ai pas besoin de vous le rappeler : dans les dix commandements, Dieu a formellement proscrit l'homicide, par conséquent il est interdit de se tuer soi-même.
VINCENT : C'est vrai, mon oncle, je ne puis discuter cette défense, mais puisque Dieu peut à la fois ordonner et dispenser de suivre ses commandements, cet homme, s'il désire tuer soit un autre soit lui-même peut être amené à croire que Dieu lui ordonne de se tuer et, par conséquent, se croire dégagé de la défense et engagé par l'ordre contraire, comment dès lors lui ferons-nous admettre que ses visions ne sont qu'illusions ?
ANTOINE : Non, mon neveu Vincent, vous n'avez pas besoin de me demander cela à moi. Vous savez parfaitement que c'est à Dieu qu'il faut le demander. Puisque Dieu l'a défendu lui-même, un jour, il peut aussi dispenser quelqu'un de lui obéir, mais il ne faut pas oublier que le diable peut se faire passer pour Dieu et tromper qui il veut dans une apparition prestigieuse. Si cette apparition entraîne à désobéir aux commandements de Dieu, il y a de grandes chances pour que ce soit une hallucination démoniaque et non une apparition divine. Vous pourrez le faire remarquer et demander à la personne comment elle peut connaître l'authenticité de ses visions (...)
Source : livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Dim 13 Aoû - 0:00 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
VINCENT : Vraiment, mon oncle, voilà une question à laquelle il serait, me semble-t-il, bien difficile de répondre. En de telles matières, peut-on être sûr de soi ?
ANTOINE : Oui, cher neveu, Dieu peut projeter dans l'esprit une telle lumière d'intelligence qu'on ne peut manquer d'être certain. Pourtant, celui qui est le jouet du démon peut être sûr de lui également. Dans un sens, il y a la même différence entre eux qu'entre le rêve et la réalité.
VINCENT : Si la différence est aussi marquée, il sera facile au moine dont nous parlons d'indiquer à quoi il reconnaît que ses visions sont vraiment des messages divins.
ANTOINE : Ce n'est pas aussi simple que vous paraissez le croire. Pouvez-vous me prouver, pour l'instant, que vous êtes éveillé ?
VINCENT : Oh ! voyons, mon oncle ! J'agite la main, je secoue la tête, je frappe du pied...
ANTOINE : N'avez-vous jamais fait ces gestes en rêve ?
VINCENT : Bien sûr, et même il m'est arrivé de me demander en rêve si oui ou non j'étais éveillé. Pour le savoir, j'ai fait ces mêmes gestes que je viens de faire devant vous, et j'en ai conclu que j'étais bel et bien éveillé, puis j'ai continué de rêver. Je me voyais attablé avec de bons amis à qui je racontais mon rêve, et tout le monde riait à l'idée que, même en rêve, je remuais bras et jambes et considérais ces gestes comme une preuve que je ne dormais pas.
ANTOINE : Et tout à l'heure, mon cher neveu, ne rirez-vous pas de vous-même, quand vous vous réveillerez, en constatant que vous êtes bien au chaud dans votre lit, que vous avez rêvé tout ceci, alors que vous vous croyez éveillé et en train de discuter avec moi ?
VINCENT : Oh ! mon oncle, vous vous moquez de moi, alors que vous semblez si sérieux ! Vous voudriez me faire croire que je dors ?
ANTOINE : Il se pourrait que vous fussiez endormi, car vous ne pouvez me prouver que vous êtes éveillé. Tout ce que vous pouvez dire ou faire vous le feriez aussi bien en rêve.
VINCENT : Voyons, mon oncle, j'ai pu me croire éveillé alors que je dormais, mais maintenant je sais que je ne dors pas, et il en est de même pour vous, bien que je ne puisse trouver les mots qui vous forceraient à le reconnaître. (...)
Source : livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Lun 14 Aoû - 1:29 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
ANTOINE : Il me paraît, cher neveu, que vous avez parfaitement raison. Il me semble également que les différences entre certaines sortes de vraies révélations et de trompeuses illusions sont comparables à celles qui distinguent le rêve de la réalité. Celui qui reçoit du ciel une vision véritable est aussi sûr de l'authenticité de ses visions que nous le sommes de nos actes quand nous sommes éveillés, et celui qui est le jouet du démon est trompé comme on peut l'être par un rêve et même plus encore. Pourtant, il se croit aussi sûr que celui qui reçoit de vraies révélations : la différence, c'est que l'un croit à tort et que l'autre sait vraiment. Mais je ne dis pas, mon cher neveu, que cette connaissance vraie accompagne chaque sorte de révélation. Car il en est de toutes sortes. Il serait trop long d'en parler ici.
VINCENT : Ne craignez-vous pas, mon oncle, que si, l'Écriture en main, je prouve à ce religieux que ses prétendues visions ne sont que des illusions, il me réponde de m'occuper de ce qui me regarde. Il m'affirmera que lui les connaît pour vraies, puisque dans toute l'Écriture, Dieu fait ce qu'il veut et ordonne même des choses qui vont à l'encontre de ses commandements. Il a commandé à Abraham de tuer son propre fils (Gn., 22), et Samson avait reçu l'ordre de se tuer en faisant s'écrouler un palais sur sa propre tête (Jg., 16, 30).
Mais je pourrai suggérer à ce religieux que de telles apparitions peuvent n'être qu'illusions, lui demander de m'indiquer à quoi il reconnaît que ses apparitions à lui ne sont pas vaines ; je lui ferai remarquer que la parole de Dieu est contre lui et que la défense est claire et nette. C'est lui alors qui me demandera comment je puis lui prouver que je suis éveillé, et c'est lui qui me mettra aux abois et non moi lui.
ANTOINE : C'est fort bien dit, mon cher neveu, pourtant il pourrait ne pas vous échapper comme cela. Observez bien que, depuis que le monde est monde, jamais Dieu n'a autorisé qui que ce soit à se soustraire aux commandements qu'il a donnés à tous.
Examinons d'abord le cas d'Abraham. Dieu n'a jamais envisagé de faire mourir Isaac, il voulait seulement éprouver l'esprit d'obéissance du père. Quant à Samson, tout le monde n'est pas sûr qu'il ait été sauvé. Il semble bien pourtant qu'il l'ait été. Car, les Philistins ennemis de Dieu se servant de Samson pour se moquer de Dieu, il est vraisemblable que le Seigneur lui inspira d'offrir sa vie pour venger Dieu de ces blasphémateurs. C'est ce qui apparaît en ceci : il perdait sa force quand on lui taillait les cheveux, mais il semble bien que cette force extraordinaire, il ne l'avait pas toujours à sa disposition, même quand il avait les cheveux longs. Dieu la lui dispensait quand il lui plaisait. C'est ce qui ressort des mots : « L'Esprit de Dieu fondit sur lui, et, sans rien avoir dans les mains... » Il semble donc que, malgré sa force extraordinaire, il n'eût pas réussi ce qu'il a fait si l'Esprit de Dieu ne l'avait pénétré. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Mar 15 Aoû - 0:49 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
ANTOINE : (...) Saint Augustin rappelle qu'au temps des persécutions de saintes et vertueuses vierges étant poursuivies par les ennemis de Dieu qui voulaient les violer se jetèrent à l'eau afin de préserver leur virginité. Mais il ne croit pas qu'il soit permis à toute autre jeune fille de suivre leur exemple. Il pense qu'il vaut mieux qu'elles supportent le péché d'un autre commis sur elles plutôt que de commettre sur elles-mêmes, un homicide. Pourtant, il estime que pour ces vierges dont il parle, l'Esprit de Dieu est intervenu pour les garder de perdre leur chasteté.
Mais l'homme qui nous occupe n'est pas comme Samson chargé de châtier les ennemis de Dieu ; il ne se trouve pas non plus dans la même situation que les vierges dont parle saint Augustin. Et jamais Dieu n'a éprouvé l'obéissance de personne en le forçant à se donner la mort. Vraiment, cette permission paraît étrange et contraire aux commandements de Dieu. On n'en comprend pas la cause, on ne peut même pas l'imaginer. Il s'est peut-être mis en tête que Dieu ne peut se passer de lui, qu'il ne veut pas l'amener à lui par les voies dont il use pour les autres hommes, qu'il lui ordonne de venir par un chemin défendu, un chemin dont il est sans exemple qu'il ait jamais été recommandé à personne.
Vous pensez que si vous lui demandez comment il peut être assuré que sa détermination de suicide peut être d'inspiration divine, comment il peut prouver qu'il ne s'agit pas d'une illusion, il vous répondra par une question. Il vous demandera de prouver que vous êtes éveillé. S'il en est ainsi, répondez-lui donc qu'il est banal de bavarder, de remuer et d'en être conscient, tandis qu'il est beaucoup moins courant qu'on rêve tout cela, et encore beaucoup plus rare qu'en rêve on se pose de telles questions. D'autre part, recevoir une vision divine est chose extrêmement rare. Il est donc évident que c'est à lui de fournir des preuves d'une chose aussi extraordinaire, et non à vous de prouver des gestes quotidiens. De plus, celui à qui vous devriez démontrer que vous êtes éveillé s'en aperçoit bien lui-même. Mais ce que lui voudrait vous faire croire, l'authenticité de ses révélations, vous ne pouvez savoir s'il le sait vraiment lui-même. C'est donc à lui de vous prouver qu'il s'agit bien d'une révélation divine, puisqu'il veut vous faire accepter quelque chose de contraire à l'Évangile.
VINCENT : Il pourrait aussi me répondre qu'il lui est indifférent que j'y croie ou non, que c'est lui que cela regarde, et non moi, qu'il a la conviction intime qu'il s'agit bien de vraies révélations divines, qu'il en a la certitude aussi claire et aussi nette que de savoir qu'il est actuellement en train de me parler.
ANTOINE : Sans doute, cher neveu, il se peut qu'il refuse d'envisager le doute, qu'il s'obstine dans son sommeil, tel un somnambule qui se lèverait la nuit pour aller se pendre. Je ne vois guère d'autre solution que de le lier à son lit, ou alors de faire ce que fit, dit-on, la femme d'un sculpteur qui était la proie de ces folles idées. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Mer 16 Aoû - 1:31 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
ANTOINE : (...) Figurez-vous que ce sculpteur s'était mis en tête, de mourir pour le Christ un vendredi saint comme le Christ était mort pour lui. Sa femme alors, plutôt que de l'en dissuader directement, lui persuada de mourir comme le Christ était mort. Il ne devait pas mourir de ses propres mains, puisque le Christ ne s'était pas tué. Elle lui offrit donc de le crucifier, en secret, sur une grande croix qu'il avait préparée pour en faire un crucifix. Il trouva cette idée bonne. Mais alors elle lui rappela que le Christ fut d'abord attaché à un pilier et flagellé, qu'il fut ensuite couronné d'épines. Alors, elle le ligota et se mit à le fustiger avec violence, tout en l'exhortant à souffrir saintement, tant et si bien qu'avant même qu'elle le détachât (lui demandant toutefois de lui enfoncer sur la tête une couronne d'épines qu'elle avait faite) il dit qu'il pensait en avoir fait assez pour cette année. Il prierait Dieu de montrer de la longanimité jusqu'au prochain vendredi saint. Mais l'année suivante, il n'éprouva plus le désir d'imiter le Christ jusqu'au bout.
VINCENT : Vraiment, mon oncle, si une ruse comme celle-là n'est d'aucun secours, je pense que rien ne le sera jamais.
ANTOINE : Et pourtant, mon cher neveu, le diable peut, pour amener sa victime au suicide, lui faire endurer avec joie des souffrances et même diminuer en lui l'impression de souffrance, afin qu'il craigne moins la mort. Pour guérir quelqu'un d'un tel désir, il faut essayer sur lui bien des moyens, car le diable peut réussir, à lui faire accepter de souffrir, mais il peut aussi échouer, par exemple si les amis de cet homme se mettent tous en prière pour demander à Dieu d'éloigner de lui cette tentation. Il faut que ce soit des amis qui prient, lui ne le fera jamais, puisque, pour lui, il ne s'agit pas d'une tentation.
Pour conclure, je dirai que si cet homme est à ce point résolu à se tuer qu'il s'imagine en avoir reçu l'ordre de Dieu, si aucun conseil ne peut le détourner de cette hantise, ni aucune ruse, il ne reste plus, me semble-t-il, qu'à le garder toujours à vue ou à le lier dans son lit.
Il ne pourra pas se plaindre d'être ainsi surveillé. Il devra admettre que, puisqu'il ne peut nous faire accepter sa version sur ses prétendues révélations que nous continuons, nous, à prendre pour des lubies, il est naturel que nous nous efforcions de le préserver d'une tentation contraire à l'ordre formel de Dieu.
VINCENT : Ici, je ne vous suis plus, mon oncle. Et s'il avait l'intention de se tuer par chagrin, par désespoir, quel argument employer alors ?
ANTOINE : Cette tentation-là, cher Vincent, entre mieux dans notre propos, car celui qui la suit est dans une douloureuse et dangereuse épreuve. Ce peut être le signe que le diable l'a amené au désespoir en le faisant pécher, ou peut-être est-il désespéré parce qu'on a prouvé que les visions qu'il avait reçues étaient fausses, quelque secret péché a peut-être été connu des gens, il a perdu l'espoir en le ciel et il est fatigué de la vie parce que les gens qui l'estimaient le méprisent à présent. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Jeu 17 Aoû - 0:32 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
ANTOINE : (...) C'est pour cela, cher neveu, que dans un cas comme celui-ci il faut traiter l'homme gentiment, doucement, lui donner du courage, le réconforter le mieux possible. Il faut lui rappeler que, s'il fait montre de courage et de foi en la clémence divine, il aura sujet de se réjouir de sa chute. Car, avant de tomber, se croyant meilleur qu'il n'était, il était dans un danger bien plus grand qu'il ne le pensait. Mais Dieu, dans l'amour qu'il porte à sa créature, permit qu'elle tombât dans le piège du démon, afin de la révéler à elle-même et de lui montrer le danger d'une telle assurance. Puisque Dieu a permis cette chute pour guérir le pécheur de sa vanité, il lui permettra également de se relever, si toutefois celui-ci s'amende, non par un désespoir inutile, mais par une fructueuse pénitence. Il le fortifie de sa grâce, si bien que pour cette seule victoire le démon subira cent défaites.
C'est ici qu'il faut rappeler Marie-Madeleine, le prophète David et surtout saint Pierre, dont le grand courage avait subi une grave défaillance. Mais parce qu'il ne désespéra pas de la grande pitié de Dieu, mais pleura son péché, Dieu le reprit en sa faveur, ainsi qu'il est rapporté dans l'Écriture et connu de toute la chrétienté.
Il serait charitable que des gens vertueux, de ceux que celui qui veut se tuer estimait, et qui eux-mêmes l'appréciaient, vinssent de temps à autre lui rendre visite, non seulement pour lui donner des conseils mais aussi pour lui en demander et ainsi lui faire comprendre qu'ils lui ont conservé leur estime et qu'ils pensent que maintenant, grâce à cette chute, il connaît mieux les ruses du démon, qu'il est mieux qualifié pour donner des conseils. Cela devrait, me semble-t-il, lui rendre courage et le sauver du désespoir.
VINCENT : N'est-ce point dangereux, mon oncle ? Ne risque-t-il pas de sous-estimer sa faute et de retomber dans son orgueil ?
ANTOINE : Mon cher neveu, je n'ai pas dit que n'importe qui devait se mettre entre les mains de cet homme. Cela pourrait, en effet, lui faire grand tort. J'aurai recours à des comparaisons pour me faire mieux comprendre. Supposez un médecin qui applique à un patient un certain traitement. Si avant d'être guéri, le malade se met à souffrir d'une autre maladie dangereuse, et telle qu'il ne supporte plus ce traitement sans danger, le médecin devra parer au plus pressé et sauver d'abord la vie de son malade ; une fois le danger écarté il pourra continuer le traitement pour le premier mal qu'il soignait.
De la même façon un navire en danger de tomber dans Scylla, sait qu'il risque en s'écartant de Scylla de tomber dans Charybde, mais cela n'empêchera aucun maître d'équipage de commencer par s'éloigner de Scylla, puis, ce premier danger écarté, il prendra des mesures pour s'éloigner du second.
C'est la même chose pour cet homme qui sombre dans le désespoir et veut se détruire : commencez par lui rendre courage et confiance, puis, le péril une fois conjuré, on s'occupera de le guérir de ses autres défauts.
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Jeu 17 Aoû - 22:54 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
VINCENT : Je pense, mon oncle, que le diable a plus d'un tour dans son sac pour faire tomber les hommes dans ce triste état d'esprit.
ANTOINE : C'est bien vrai, mon neveu. Le démon saisit toutes les occasions. Parfois, c'est par la fatigue : les gens sont lassés d'eux-mêmes après quelque lourde perte ; certains autres par la crainte de quelque douleur physique et d'autres, comme je vous l'ai dit, par crainte de quelque déshonneur. J'ai connu moi-même un homme qui jouissait de l'estime de tous, mais un jour il se mit en tête qu'il avait perdu cette estime, il n'en dit rien à personne d'autre, mais il me confia à moi ce qui le torturait. Il était poursuivi par l'idée que les gens ne l'estimaient plus, qu'on n'appréciait plus son esprit comme avant, que maintenant on le prenait pour un imbécile. En fait, il se trompait, on le tenait toujours pour un homme capable et honnête.
J'en ai connu deux autres qui vivaient dans la crainte du suicide. Ils n'auraient pu dire pour quelle raison ils l'auraient commis, mais cette pensée les hantait. Ils n'avaient subi aucune perte, ils n'avaient pas à craindre le mépris de leurs semblables ; l'un d'entre eux était même agréable à regarder, mais tous deux étaient obsédés par cette pensée. Ils se disaient que pour rien au monde ils n'en arriveraient à se supprimer de leurs propres mains, mais pourtant ils craignaient sans cesse de le faire. Pourquoi cette crainte ? Aucun des deux n'eût pu le dire. L'un des deux demanda à l'un de ses amis de le charger de liens.
VINCENT : Comme c'est étrange !
ANTOINE : Je suppose que beaucoup d'entre eux sont aussi peu raisonnables. Le démon, comme je vous l'ai déjà dit, est toujours à l'affût. Saint Pierre dit : « Votre ennemi, le diable, tel un lion rugissant, cherche qui il peut dévorer »1 P., 5, 8
Il remarque bien dans quel état chaque homme se trouve et il n'observe pas seulement les signes extérieurs : biens, richesses, fortune, pouvoir, bonne ou mauvaise réputation, mais aussi les choses plus profondes : la santé, la maladie, la bonne et la mauvaise humeur, la joie, le chagrin, la force et la faiblesse d'âme, la hardiesse et la timidité ; dès que l'une ou l'autre de ces caractéristiques lui en donne l'occasion, il apprête le piège de la tentation. S'il voit des gens enclins à se laisser entraîner aux plaisirs de la chair, son piège sera la volupté ; s'il en voit qui sont portés à se mettre facilement en colère, c'est par là qu'il essayera de les faire choir ; de même s'il en rencontre qui ont l'âme mélancolique, qui sont portés à la crainte, il utilisera ce tempérament pour les faire tomber dans le péché, il leur mettra dans l'esprit des pensées si épouvantables que sans l'aide de Dieu ces malheureux ne pourraient jamais s'en débarrasser. Une pensée horrible peut susciter une vertueuse répulsion. Mais il se peut aussi, par la puissance et l'astuce du démon qui utilise à son profit les caractères craintifs, que cette pensée provoque en l'âme qui l'a conçue le désespoir, la certitude d'avoir été abandonnée par Dieu. Alors que le simple fait de ne s'être jamais complu dans cette idée, de l'avoir toujours combattue suffit pour qu'il n'y ait pas péché, mais au contraire source de vaillance et de mérite.
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Sam 19 Aoû - 0:06 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
ANTOINE : (...) Il y en a qui, le couteau entre les mains, pensent subitement à se tuer et, tout en se disant que ce serait là un acte horrible, sont obsédés par la crainte d'en arriver à le commettre. Et ils ont, en y pensant longuement et fréquemment, enfoncé cette crainte dans leur imagination, à tel point que parfois ils doivent faire de gros efforts pour s'en débarrasser. Il y en a qui n'ont pas réussi à chasser cette obsession et ont fini très déplorablement par se tuer. Mais n'oubliez pas ceci, cher neveu, lorsque Satan utilise la chair et le sang d'un homme pour le pousser vers la lasciveté, cet homme doit et peut, avec l'aide et la grâce de Dieu, résister à la tentation ; ainsi doit faire celui qui voit le démon abuser de son humeur mélancolique et tenter de le faire sombrer dans le désespoir.
VINCENT : Cher oncle, dites-moi quelle attitude adopter dans un tel cas ?
ANTOINE : Il faut, me semble-t-il, aider de deux manières celui qui est désespéré : il faut prier et lui donner des conseils. Voyons d'abord les conseils : il se peut que son mal ait deux causes différentes : quelque humeur pernicieuse qui lui empoisonne le corps, et aussi ce maudit démon qui utilise cette faiblesse pour ses funestes entreprises. Il doit donc recevoir deux sortes de conseils : ou, si vous voulez, un médecin pour le corps et un médecin pour l'âme. Le médecin du corps diagnostiquera l'abondance des humeurs mauvaises qui empoisonnent l'homme et dont le démon fait ses instruments. Il prescrira un régime et des médicaments, ainsi que des purgatifs pour le soulager.
Que personne ne s'étonne si je conseille de prendre l'avis d'un médecin pour des maux d'ordre spirituel.
Car l'âme et le corps sont si intimement mêlés qu'ils font entre eux une seule personne et le dérèglement de l'un peut entraîner le dérèglement des deux. Aussi, je conseille à chacun, dans toute maladie du corps, de se confesser et de chercher auprès d'un bon médecin de l'âme la santé spirituelle. Car la confession ne servira pas seulement à écarter le danger de mourir en état de péché, danger qui augmente avec la maladie, mais le réconfort qu'on y puisera (et la faveur de Dieu augmentant avec elle) sera salutaire pour le corps. C'est pour cette raison que l'apôtre saint Jacques exhorte les fidèles à appeler un prêtre quand ils sont malades, et affirme que cela leur fera du bien à la fois au corps et à l'âme. De cette façon, je voudrais conseiller de prendre aussi l'avis de médecins du corps, en cas de maladie spirituelle. Certaines personnes disposées au vice et désireuses d'être plus vicieuses encore vont consulter des médecins et des pharmaciens pour savoir ce qui pourrait les rendre plus sensuelles pour le plaisir de leur chair. Serait-ce dès lors folie, chez celui qui veut combattre une telle inclination de demander au médecin de lui indiquer ce qui, sans nuire à sa santé, diminuerait en lui un tel penchant charnel ? En ce qui concerne l'esprit, il faut conseiller au désespéré de se confesser, afin de diminuer l'emprise que le démon peut avoir sur une âme en état de péché.
VINCENT : On m'a dit, cher oncle, que quand de telles personnes vont à confesse, leur tentation s'en trouve aiguisée. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Dim 20 Aoû - 0:40 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
ANTOINE : C'est très possible. Mais c'est le signe que la confession leur est bienfaisante, et qu'elle a mis le démon dans une grande colère. On trouve dans maints passages de l'Évangile que les démons redoublent leurs efforts contre leurs victimes quand ils voient que le Christ veut les en chasser. Si nous craignons la colère de Satan, nous devons le laisser agir à sa guise, car, à chaque bonne action il se fâche.
Il faut dire au désespéré qu'il craint plus qu'il ne devrait dans la confession, et même qu'il n'y a aucun sujet de crainte ; on peut même ajouter qu'à moins qu'il ne change le bien en mal il devrait plutôt se réjouir.
Oui, il craint plus qu'il ne devrait, car si diligent que se montre le démon pour le détruire, Dieu est plus diligent encore dans son désir de le sauver : aucun démon ne s'acharne à le perdre avec autant de force que Dieu n'en met à le sauver. Aucun démon de l'enfer n'est aussi fort pour l'attaquer que Dieu ne l'est pour le défendre, à condition toutefois que lui-même ait une grande confiance en Dieu.
Il se montre craintif alors qu'il ne le devrait pas. Il craint avoir perdu l'amour de Dieu parce que d'horribles pensées lui sont venues à l'esprit, mais il lui faut comprendre qu'aussi longtemps qu'il ne s'y complaît pas, elles ne peuvent lui être imputées à péché.
Finalement, il est triste, alors qu'il devrait se réjouir. Car puisqu'il n'accueille pas de telles pensées, puisqu'il les rejette, il détient là un signe qu'il a conservé la faveur divine, que Dieu lui vient en aide, et il peut être assuré que Dieu ne le quittera jamais aussi longtemps que lui-même lui est fidèle. En outre, cette lutte contre la tentation peut, s'il ne tombe pas sans nécessité, être une occasion de mériter une grande récompense dans le ciel. La peine qu'il éprouve lui tiendra lieu, comme le démontre maître Gerson, de temps au purgatoire.
Pour combattre cette tentation, il faut trois choses : il faut résister, il faut mépriser les ruses du démon et enfin il faut demander l'aide de Dieu.
C'est le bon sens de résister à une telle tentation, il faut bien se dire que ce serait folie que d'y succomber, ce n'est pas le désir d'échapper à une peine qui y a conduit, ni le désir de jouir d'un quelconque plaisir, c'est au contraire, en y succombant, qu'on perdrait l'éternelle félicité et qu'on tomberait dans l'éternelle douleur. Même à supposer qu'on cède à cette tentation avec l'intention d'échapper à une grande douleur, il faut bien se dire qu'elle n'est rien en comparaison de celle qu'on aura méritée en succombant.
C'est la terreur d'y succomber qui torture le plus dans cette tentation ; il faut bien se dire que tous les diables de l'enfer ne pourront jamais amener quiconque à commettre cet acte, c'est une folle imagination qui y mène.
On pourrait comparer la personne en proie à cette tentation à quelqu'un qui s'avance sur une passerelle étroite, et qui s'effraie, alors qu'il marcherait sans encombre s'il gardait son sang-froid. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Lun 21 Aoû - 10:25 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
ANTOINE (...) Si on crie à un homme dans cette situation : « Tu vas tomber ! Tu vas tomber ! » il se peut très bien qu'il tombe, alors que si on le rassurait, il passerait sans mal, et n'hésiterait même pas à courir, comme s'il n'était qu'à un pied du sol. Ainsi, dans cette tentation, le diable trouve l'homme effrayé de sa propre lubie. Il lui crie à l'oreille : « Tu vas tomber, tu vas tomber ! » ; il effraie cet homme à tel point qu'à chaque pas il risque en effet de choir. Et le démon s'il est écouté, harcèle sa victime en lui inspirant une terreur continuelle à tel point qu'il lui fait oublier le Seigneur et l'amène à commettre cette faute mortelle du suicide.
De même que, dans le vice de la chair, il ne suffit pas, pour vaincre, de combattre, il faut aussi fuir (du reste, fuir les pièges de l'ennemi n'est-ce pas de la bonne stratégie ?), ainsi un homme qui subit la tentation du désespoir ne doit pas seulement résister en raisonnant, mais aussi parfois rejeter la pensée qui l'obsède, refuser de lui accorder crédit un seul instant.
Certaines personnes se sont bien débarrassées de ces pensées empoisonnantes, elles les méprisaient et se signaient pour chasser le démon, elles lui riaient au nez et détournaient leur esprit vers quelqu'autre pensée. Quand le démon voit qu'on lui accorde si peu d'importance, après de vaines tentatives à des moments qui lui paraissent propices, il abandonne la partie, il se retire.
Enfin, il faut, dans une pareille crise, invoquer l'aide de Dieu, prier pour celui qui lutte contre l'idée de suicide et faire prier d'autres pour lui : des pauvres à qui l'on donne des aumônes et d'autres bonnes personnes qui prieront par charité, et spécialement des prêtres à la messe. Il faut penser à son bon ange et aux saints pour qui il a une particulière dévotion. S'il s'agit d'un savant, qu'il ait donc recours aux litanies et aux invocations qui suivent, car ce sont de très anciennes et très vénérables prières de l'Église. Ce ne sont pas, comme certains le croient parfois, des prières ayant pour auteur saint Grégoire. On croit cela parce que, au moment de la grande peste de Rome, saint Grégoire fit réciter ces prières par la foule au cours d'une cérémonie solennelle, mais les litanies datent de bien longtemps avant.
Saint Bernard conseille à chacun de demander aux anges et aux saints d'intercéder en sa faveur auprès du Tout-Puissant. S'il se trouve des gens pour protester et dire que Dieu nous entend bien lui-même, qu'il serait dangereux de prier les saints puisque l'Écriture ne nous le conseille pas, je ne discuterai pas la chose ici. Celui qui ne veut pas le faire, qu'il ne le fasse pas. Pour ma part, je me fierai au conseil de saint Bernard, je le tiens pour un grand savant, un homme très versé dans la connaissance des saintes Écritures, et je préfère risquer mon âme en compagnie de saint Bernard plutôt qu'en compagnie de ceux qui trouvent des fautes dans sa doctrine.
Tout homme de bien conseille d'avoir recours par dessus tout à Dieu lui-même, et dans cette tentation, de se souvenir de la Passion du Christ et de le prier, lui dont la mort est la base de tout salut, afin qu'il garde cet homme d'un trépas aussi condamnable.
Source : livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Mar 22 Aoû - 0:05 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
ANTOINE (...) On trouve dans le livre des Psaumes des versets où il est question d'éloigner les cruelles tentations du démon, par exemple : « Que Dieu se lève et ses ennemis se dispersent et ses adversaires fuient devant sa face » (Ps., 68, 2) et bien d'autres qui, dans une si horrible tentation, plaisent à Dieu et sont redoutables pour le démon. Mais rien ne lui est aussi odieux que les mots par lesquels Notre-Seigneur le chassa lui-même : « Vade Sathana ! ». Aucune prière n'est plus efficace que ces mots, enseignés par Notre-Seigneur lui-même : « Ne nous laissez pas succomber à la tentation, et délivrez-nous du mal ». Et je ne doute pas que celui qui mettra en pratique les bons conseils reçus, qui priera, qui vivra dans la voie droite, se tiendra dans la compagnie de gens vertueux, celui qui conservera bien ferme au cur l'espoir d'être aidé par Dieu, celui-là le Seigneur sera son rempart, son refuge, il ne craindra pas « les terreurs de la nuit » qu'entraîne cette terrible tentation.
Ainsi j'en ai terminé avec cette sorte de « terreur de la nuit ». Et je suis heureux que nous en arrivions au jour avec ces mots du prophète : a sagitta volante in die, car il me semble que la nuit fut bien longue !
VINCENT : En vérité, mon oncle, elle le fut, mais nous n'avons pas dormi, nous avons été bien occupés. Maintenant, ne pensez-vous pas qu'il est temps de prendre votre repas ?
ANTOINE : Non, mon cher neveu, car j'avais déjà rompu le jeûne juste avant votre arrivée. Il faut aussi que vous trouviez que cette nuit et ce jour ont passé comme une nuit et un jour d'hiver ; la nuit fut longue, le jour sera court, et lumineux.
Et ainsi en sera-t-il de notre entretien. Car par ces mots du prophète : « Tu ne craindras pas la flèche qui vole de jour... », j'entends la flèche de l'orgueil, dont le démon se sert pour tenter un homme non dans la nuit (c'est-à-dire dans l'épreuve et l'adversité car ces moments de crise sont trop durs pour qu'on y éprouve de l'orgueil), mais pendant le jour, c'est-à-dire en pleine prospérité, car les moments de prospérité sont riches en joie et en courage. Certes, cette prospérité humaine pendant laquelle l'homme se réjouit et dont le démon le rend si fier, n'est qu'une brève journée d'hiver ; car nous commençons pauvres et froids et nous nous élevons, comme une flèche, mais dès que nous atteignons le point culminant, avant que nous ayons eu le temps de nous y fixer, nous retombons vers le sol froid et c'est là que nous nous arrêtons. Mais pendant le bref instant où nous sommes en haut, Seigneur ! que nous sommes fiers ! Nous nous pavanons, nous bourdonnons comme des abeilles en été, sans nous rendre compte que, dès l'hiver venu, nous mourrons. Il en est ainsi pour beaucoup d'entre nous, Dieu nous vienne en aide ! Car pendant le court moment de la prospérité humaine, cette flèche du diable, cet esprit de vanité provenant de l'arsenal du démon et transperçant notre cur nous fait croire que nous montons au zénith du bonheur, nous voguons sur les nuages, nous nous posons sur l'arc-en-ciel et nous regardons le monde tout en bas, nous contemplons, dans notre propre gloire, ces pauvres âmes, qui peut-être étaient nos compagnes et nous les considérons comme de pauvres fourmis. (...)
Source : livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Mar 22 Aoû - 23:09 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
ANTOINE (...) Que celui qui s'élève ainsi, n'oublie toutefois pas que cette flèche a une pointe de fer ; si haut qu'elle vole elle doit nécessairement retomber. Parfois, elle retombe dans un endroit qui n'est guère propre : la fierté se change alors en répulsion, en honte, et toute la gloire s'évanouit.
C'est à cela que fait allusion l'auteur du cinquième livre de la Sagesse, quand il parle de ceux qui passent leur vie à se glorifier et qui, à leur mort, sont précipités tout droit en enfer :
« À quoi nous a servi notre orgueil ? Quel avantage avons-nous retiré de nos richesses ? Tout cela a passé comme une ombre... ou comme une flèche lancée vers son but ; l'air déchiré reflue aussitôt sur lui-même, si bien qu'on ignore le chemin qu'elle a pris. Ainsi de nous : à peine nés, nous avons cessé d'être et nous n'avons à montrer aucune trace de vertu, notre perversité nous a consumés... » Sg., 5, 8
Voilà comment en enfer parlent ceux qui ont vécu dans le péché. Remarquez, cher neveu, que lorsque l'Écriture compare l'orgueil à une flèche, elle n'assigne pas à cette flèche un but précis. C'est que l'orgueilleux ne vise pas à un but déterminé où il se fixerait. Il vise comme le font les enfants, le plus haut possible. C'est le démon qui lui assigne un but bien précis, et c'est le cur même de l'enfer. Il sait lui-même par expérience que l'âme en proie à l'orgueil ne peut manquer de tomber (à moins d'être arrêtée dans sa chute par quelque grâce divine). Lorsqu'il était lui-même au ciel, et prenait son essor vers le zénith, dans un envol orgueilleux, disant : « Je volerai au-dessus des étoiles, j'installerai mon trône au septentrion, et je serai pareil au Très-Haut », bien avant d'atteindre ce but qu'il se promettait, il fut transformé, lui, l'ange de gloire, en un monstre noir et hideux, son élan vers le haut fut brisé et il fut précipité dans l'enfer.
Il vous semble peut-être, cher neveu, que tout ce qui se rapporte à l'orgueil n'étant pas une épreuve, une tribulation, une douleur, nous sortions de notre sujet.
VINCENT : C'est en effet ce que je pensais, mon cher oncle, et j'avais l'intention de vous en faire part, mais comme votre propos m'intéressait, je ne souhaitais nullement vous voir abandonner ce sujet.
ANTOINE : Cher neveu, comprenez bien ceci : certes la prospérité est le contraire de la tribulation, mais, pour un homme de bien, la tentation de l'orgueil dans la prospérité est une plus grande épreuve et il a plus besoin de conseils et de bonnes paroles que ne peut l'imaginer celui qui n'a jamais subi cette épreuve. C'est pour cela, cher neveu, que j'en ai parlé comme d'une chose se rapportant à notre sujet. Dites-vous bien qu'il est difficile de toucher la saleté sans se salir les doigts, de mettre le feu à la paille et de l'empêcher de brûler, de garder une vipère en son sein et de l'empêcher de mordre, de mettre ensemble jeunes gens et jeunes filles sans que s'éveille le désir de part et d'autre, ainsi il est dur pour n'importe quel homme ou femme en pleine prospérité, de résister aux suggestions du démon et aux occasions offertes par le monde de tomber dans le mortel désir de la gloire ambitieuse. (...)
Source : livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Jeu 24 Aoû - 0:39 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
ANTOINE : (...) Si on y cède, c'est pour tomber dans toutes sortes de défauts : manières arrogantes, comportement hautain, mépris pour les pauvres en paroles et en attitude, comportement dédaigneux et désagréable, malhonnêteté, haine et cruauté.
Pour beaucoup de gens vertueux, mon neveu, le succès est un grand péril, c'est un instrument du diable. Certains, sentant le démon leur offrir des tentations, en sont gravement troublés. Il y en a même qui sont si effrayés, que dans le plein jour de la prospérité, ils tombent dans la terreur nocturne de la pusillanimité, et, doutant d'eux-mêmes avec excès, ils laissent inachevées des uvres dans lesquelles ils eussent pu se rendre utiles. Ils doutent du secours de Dieu qui pourrait les aider à résister aux tentations et se laissent aller au démon du désespoir. Sous prétexte de ce qui leur paraît l'humilité et le désir de servir Dieu en silence, ils recherchent leurs aises sans même en avoir conscience, et cela mécontente le Seigneur.
Cependant si un homme entouré d'honneurs se rend compte, grâce à la connaissance qu'il a de lui-même, que richesses et autorité nuisent à son âme, s'il s'aperçoit qu'il ne peut faire le bien qu'il devrait, s'il voit péricliter par sa faute les uvres qu'il devrait soutenir, s'il voit qu'il ne peut remplir les devoirs de sa charge, je lui conseille d'abandonner cette charge, qu'il s'agisse d'honneurs spirituels comme par exemple la fonction d'évêque ou de toute autorité temporelle ; oui, mieux vaut se retirer et servir Dieu que d'accepter pour soi-même les honneurs au détriment de ceux que sa charge lui ordonne de protéger.
D'un autre côté, il peut remplir honorablement les devoirs de sa charge et n'être troublé que par les tentations de l'ambition et de l'orgueil, et craindre qu'elles ne le fassent tomber dans le péché. Je ne nie certes pas qu'il soit prudent de se tenir tout le temps dans une crainte modérée, car l'Écriture dit : « Heureux l'homme toujours en alarmes » (Pr., 28, 14) ; et saint Paul dit : « Que celui qui se flatte d'être debout prenne garde de tomber »(1 Cor., 10, 12).
Pourtant, l'excès de crainte est périlleux et amène à douter de l'aide de Dieu. Cette crainte immodérée, la sainte Écriture la condamne en disant : « Demeurez fermes, ne vous laissez pas effrayer » (Ph., 1, 28). Il faut donc qu'un homme qui est honoré tempère par une vive espérance la crainte qu'il éprouve de Dieu.
Qu'il se dise que, si Dieu a voulu lui confier cette charge, Dieu l'assistera de sa grâce afin qu'il la puisse bien exercer. Mais s'il est arrivé à s'élever par la simonie ou par d'autres moyens coupables, alors il faudrait considérer les tourments que donne la tentation comme une raison de se démettre. S'il n'en est pas ainsi, qu'il continue son bon travail, et contre la provocation du démon, qu'il se sanctifie, qu'il prie, qu'il en appelle à Dieu et qu'il veille à ce que le démon ne tente pas de le faire pécher. Qu'il plaigne et réconforte ceux qui sont dans l'affliction. Je ne veux pas dire qu'il doit laisser tous les crimes impunis, permettre aux malfaiteurs de voler à volonté. Mais dans son cur, qu'il s'attriste en voyant que, par nécessité, pour préserver le bonheur commun, les hommes sont amenés à infliger une peine aux malfaiteurs. Dès qu'il trouve les indices d'un possible redressement, qu'il agisse de tout son pouvoir pour obtenir le pardon. Il ne manquera jamais de criminels fort mal disposés sur qui la justice pourra s'exercer. Qu'il pense dans le fond de son cur que tout mendiant est son frère.
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Jeu 24 Aoû - 23:44 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
VINCENT : Il est bien difficile, pour un homme riche et bien habillé, de se comparer à un mendiant en guenilles.
ANTOINE : Supposez, mon cher neveu, qu'il y ait ici, deux hommes, tous deux mendiants. Survient un richard, il en emmène un avec lui et le garde chez lui pendant un certain temps, l'habille de soie, lui donne une bourse bien garnie, mais, l'avertissant que, dans peu de temps, il lui faudra reprendre ses haillons, et retrouver sa pauvreté. Supposez que ce mendiant vêtu de soie rencontre son compagnon ; ne pourrait-il, malgré son accoutrement, se reconnaître comme son frère ?
Ne serait-il pas fou, si, pour une fortune de quelques semaines, il se croyait supérieur à l'autre ?
VINCENT : Certainement, mon oncle, si du moins il n'y a entre eux d'autre différence.
ANTOINE : Mon cher neveu, il me semble qu'en ce monde la différence entre le plus riche et le plus pauvre est à peine plus sensible. Que le plus riche considère le plus misérable et pense qu'ils étaient tous deux pareils en venant au monde. Qu'il se dise bien que malgré toute la richesse dont il jouit actuellement il sera, peut-être, dans quelques jours, plus misérable encore que ce mendiant.
Aucun homme ayant un brin d'intelligence et sachant s'en servir ne peut penser moins que cela. Mais un chrétien, ayant un peu de foi, ne peut manquer d'aller plus loin. Il ne pensera pas seulement à sa venue ici-bas, à son départ pour l'autre monde, mais aussi au terrible jugement de Dieu, aux effroyables peines de l'enfer et aux inestimables joies du ciel. En réfléchissant à ces réalités, il se dira que, quand ce pauvre hère et lui-même auront tous deux quitté ce monde, le mendiant sera entouré de tels honneurs qu'il souhaitera à ce moment être son égal. Pour celui qui réfléchit à ces choses, mon cher neveu, la flèche de l'orgueil volant en plein jour, n'est pas bien redoutable.
Mais pour y bien penser, le mieux est de se confesser souvent. Que l'homme vertueux, qui craint le démon de la prospérité, ouvre son coeur et, par la bouche de quelque vertueux père spirituel, il entendra des vérités qu'il avait oubliées. Qu'il se ménage en sa maison quelque endroit solitaire et silencieux, qu'il s'y retire de temps en temps et qu'il s'imagine se retirer du monde et rencontrer Dieu pour lui rendre compte de sa vie de péché. Là, devant un autel, devant quelque image représentant l'amère Passion du Christ, image dont la contemplation peut lui remettre en mémoire la Passion elle-même, et éveiller en son âme une dévote compassion, qu'il s'agenouille et se prosterne aux pieds du Seigneur tout-puissant, croyant fermement qu'il est là, invisiblement présent. Alors, qu'il ouvre son coeur à Dieu et confesse les fautes dont il peut se souvenir, qu'il prie Dieu de lui accorder le pardon. Qu'il se souvienne des bienfaits dont Dieu l'a comblé, (honneurs publics ou grâces intimes). Qu'il avoue à Dieu les tentations du démon, les tentations de la chair, celles du monde, et les occasions de pécher provenant des amis, lesquels sont parfois bien plus dangereux pour enlever un homme à Dieu que ne le sont ses plus mortels ennemis. Notre-Seigneur l'affirme lui-même quand il dit : « Un homme a pour ennemis les gens de sa propre famille » (Mt., 10, 30).
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Ven 25 Aoû - 21:52 | |
| XVI. DE CEUX QUI VEULENT SE TUER POUSSÉS PAR LE DÉMON QUI LEUR FAIT CROIRE À UNE RÉVÉLATION DIVINE
ANTOINE : (...) Qu'il pleure devant Dieu sa propre fragilité, sa négligence, sa mollesse à résister aux tentations, sa facilité à y succomber. Qu'il supplie Dieu de lui accorder son aide, de le fortifier à la fois pour l'empêcher de tomber, pour que, s'il succombe par sa faute, il ait la force de se relever et, avec l'aide de Dieu, de retrouver la grâce. Que cet homme ne doute pas que Dieu l'entend et lui accordera bien volontiers cette faveur.
Ainsi, en gardant le ferme espoir de recevoir l'aide de Dieu, il emploiera bien sa prospérité, il persévérera dans ses occupations profitables. Dieu l'enveloppera comme un bouclier, il n'aura plus à craindre « la flèche volant en plein jour » c'est-à-dire le mal que peuvent faire les biens de ce monde.
VINCENT : Mon cher oncle, ce conseil me paraît excellent. Il est très utile à ceux qui vivent dans l'abondance et la prospérité.
ANTOINE : Je supplie le Seigneur, mon cher neveu, d'inspirer ces pensées et d'autres, meilleures, à toute personne qui en a besoin. Et maintenant, je dirai un mot ou deux de la troisième tentation, celle dont le prophète parle en ces termes : « Gardez-nous des activités se mouvant dans les ténèbres ». Ensuite, nous déjeunerons et nous laisserons la dernière tentation, c'est-à-dire « le démon de midi » pour cet après-midi. Ainsi, avec l'aide de Dieu, nous terminerons ces entretiens.
VINCENT : Que Dieu vous récompense, mon oncle, de vous être ainsi occupé de moi. Mais, je vous en prie, ne reculez pas trop l'heure de votre repas.
ANTOINE : Ne craignez rien, je vous promets que je ne serai pas long.
XVII. DU DÉMON APPELÉ NEGOTIUM, OU TRAFIC SE MOUVANT DANS LES TÉNÈBRES
Le prophète dit dans le psaume déjà cité (Ps., 91) : « Celui qui vit dans l'espoir de recevoir l'aide de Dieu, vivra au ciel, sous la sauvegarde de Dieu. Et toi, qui es un de ceux-là, sa vérité t'enveloppera comme un bouclier et tu ne craindras pas les activités se mouvant dans les ténèbres. »
« Negotium », « trafic », est ici, mon cher neveu, le nom du démon qui toujours s'affaire à tenter les gens et à leur faire commettre le mal. C'est dans l'ombre qu'il préfère agir. En plus de la nuit noire, il y a deux moments de ténèbres : l'un avant l'aube, l'autre entre chien et loup. Pour l'âme d'un homme il en va de même. Le premier se situe avant que la lumière de la grâce l'éclaire complètement, le second quand la lumière de la grâce commence à le quitter. En ces deux moments d'obscurité, le démon appelé « trafic » s'évertue à entraîner avec lui des gens assez fous pour le suivre, et à son appel, ils s'activent comme des frelons. D'aucuns recherchent le plaisir dans la bonne chère, la boisson et autres excitations dégoûtantes. Il en incite certains autres à chercher sans arrêt les biens matériels. C'est à ceux-là que Notre-Seigneur s'adresse dans l'Évangile quand il dit : « Celui qui marche dans la nuit ne sait où il va » (Jn., 10, 11). Ils sont, en vérité, dans un tel état qu'ils ne savent pas où ils vont. Ils tournent en rond, comme en un labyrinthe. (...)
Source : livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Dim 27 Aoû - 0:47 | |
| XVII. DU DÉMON APPELÉ NEGOTIUM, OU TRAFIC SE MOUVANT DANS LES TÉNÈBRES
(...)Quand ils se croient sur le point d'en sortir, ils sont simplement revenus à leur point de départ. Le service de la chair n'est-il pas une occupation à l'infini, qui recommence sans trêve ? Si rassasiés que soient ces gens en se couchant, il faut encore qu'ils mangent le lendemain matin. Ainsi en est-il du ventre et du bas-ventre. Quant au désir, il brûle comme le feu : plus on l'alimente, plus il est gourmand.
Mais ce labyrinthe a un centre d'attraction vers lequel ces gens affairés sont entraînés subitement au moment où ils pensaient en sortir. Ce centre, c'est l'enfer. C'est là que ces gens sont attirés, inconscients du lieu où ils vont. Parfois cela leur arrive quand ils croient avoir encore un long chemin devant eux. De ces gens vivant dans les plaisirs, l'Écriture dit : « Ils vivent dans les plaisirs et soudain ils sont précipités dans l'enfer » (Jb., 21, 13).
Voici ce que dit saint Paul de l'homme avide : « Ceux qui désirent s'enrichir tombent dans la tentation, dans le piège du démon, dans une foule de convoitises insensées et funestes qui les plongent dans la mort et la perdition » (Tm., 6, 9).
Ce labyrinthe tumultueux est le piège du démon, le lieu de perdition et de destruction dans lequel ils tombent avant d'en avoir conscience.
Notre-Seigneur parle dans l'Évangile d'un homme riche et cupide qui avait tant de grain qu'il ne savait où le loger. Il voulait faire agrandir ses greniers et se promettait des réjouissances de plusieurs jours en l'honneur de ces belles récoltes. Il pensait, voyez-vous, qu'il avait encore bien du temps devant lui. Mais Dieu lui dit : « Insensé, cette nuit ton âme te sera retirée, et tous les biens que tu as amassés, à qui appartiendront-ils ? » (Lc., 12, 16 sqq.). Voilà un homme qui est tombé soudain au centre de ce labyrinthe d'agitation et bien avant le moment qu'il avait lui-même prévu.
Bien sûr, ceux qui sont pris dans ce remous, ne considèrent pas leurs occupations comme une épreuve. Pourtant, beaucoup d'entre eux sont accablés, angoissés, leurs plaisirs sont si brefs, si rares et leurs tourments si grands, si fréquents, si importants... Cela me fait penser à un homme très honorable qui, voyant la peine que sa femme se donnait pour serrer ses cheveux de manière à bien dégager le front et pour se comprimer la taille de manière à l'avoir bien fine, tout cela la faisant bien souffrir, lui dit un jour « Vraiment, Madame, si Dieu ne vous accorde l'enfer, il vous fera tort, car vous y avez droit. Vous l'achetez très cher, et vous vous donnez grand mal pour l'obtenir. »
Ceux qui sont en enfer à cause de leur folie, comprennent désormais leur erreur, car ils se sont donné bien du mal pour un mince plaisir. Ils confessent maintenant leur démence et crient : « Notre force est épuisée à cause de notre péché » (Ps. 31, 11). Alors pourtant qu'ils étaient sur la voie de cette perdition ils ne voulaient prendre nul repos, mais continuaient à se dépenser malgré leur fatigue, et se donnaient toujours plus de mal, pour un plaisir infime, puéril, de brève durée et tôt oublié. C'est pour en arriver là à la peine éternelle qu'ils se sont donné tout ce mal ! Il me semble, Dieu me garde ! que bien des gens qui ont ici-bas acheté l'enfer en se donnant toute cette peine, auraient pu, en s'en donnant la moitié moins, gagner le paradis !
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Dim 27 Aoû - 22:21 | |
| XVII. DU DÉMON APPELÉ NEGOTIUM, OU TRAFIC SE MOUVANT DANS LES TÉNÈBRES
(...)Pendant que ces gens, attachés aux biens matériels, vont et viennent dans ce labyrinthe où règne ce démon appelé « trafic », les esprits sont tellement ensorcelés qu'ils ne remarquent pas la terrible fatigue que ce démon leur fait endurer pour rien. Aussi ne prennent-ils pas cela pour une épreuve et ils n'ont nul besoin de réconfort. Ce n'est pas pour eux que je parle, bien que cela puisse leur servir à comprendre leur propre misère, à la lumière de la grâce de Dieu, qui éclaire de nouveau leurs âmes. Mais il est des gens très bons et très vertueux, qui sont éclairés par la grâce et que pourtant le démon attire perfidement vers les plaisirs de la chair. Ils voient s'offrir à eux des jouissances matérielles, ils sentent que c'est le démon qui les tente ainsi et sont gravement troublés. Ils commencent à craindre de n'être pas avec Dieu, dans la lumière, mais avec ce démon qu'on appelle negotium perambulans in tenebris c'est-à-dire « trafic se mouvant dans les ténèbres ».
Pourtant je répète, au sujet de ceux qui craignent le péché de la chair, ce que j'ai dit de ces gens riches et puissants qui par vertu craignent le péché d'orgueil : qu'ils modèrent leur crainte car, en la mettant trop en évidence, ils risquent de s'enorgueillir d'eux-mêmes et de tomber ainsi dans ce péché qu'ils veulent éviter. Ils subissent des tentations sans y céder, il est dès lors superflu et pas toujours sans danger de se troubler cruellement l'esprit avec la crainte de perdre la faveur de Dieu. J'ai déjà dit le mal que cette phobie risque de causer : elle fait perdre de vue la confiance que nous devons toujours garder en l'aide de Dieu. Or, aussi longtemps qu'on ne succombe pas à ces tentations, si on a le courage d'en éviter autant que possible tous les risques, la lutte qu'on mène contre elles est un sujet de mérite.
Ceci se comprend plus aisément pour tout ce qui concerne les tentations de la chair que pour tout ce qui relève de la cupidité. Les gens vertueux, se souvenant des menaces que Dieu a proférées contre les riches, s'effraient en se voyant entourés de richesses. C'est ainsi que saint Paul dit : « Ceux qui veulent amasser des richesses tombent dans la tentation et dans les pièges du démon » (1 Tm., 6, 9). Et Notre-Seigneur dit lui-même : « Il est plus facile pour un chameau (ou comme certains le prétendent, pour un gros câble, c'est le sens de camelus dans la langue grecque) de passer par le trou d'une aiguille que pour un riche d'entrer dans le royaume des cieux » (Lc., 18, 25 ; Mc., 10, 25).
Rien d'étonnant, dès lors, si des gens vertueux et craignant Dieu prennent peur à des paroles aussi terribles, quand ils voient pleuvoir en abondance autour d'eux les biens de ce monde. Quelques-uns se demandent s'ils ont le droit d'en garder pour eux. Mais dans tous les passages de l'Écriture où on menace les riches de la damnation éternelle, ce qu'on leur reproche, ce n'est pas de posséder des biens matériels mais de trouver du plaisir à les posséder. Car lorsque saint Paul dit : « Ceux qui veulent posséder des richesses... » il ne parle pas de la possession elle-même, mais du désir de posséder, du plaisir qu'on y trouve. C'est cela qui ne peut aller sans pécher. Quand on désire une chose aussi fortement, on se laisse aller à bien des faux-fuyants, à bien des ruses, et on se fait tort à soi-même.
Voici des paroles du prophète qui montrent que ce n'est pas la possession qui est défendue mais le fait de s'y attacher trop : « Quand vos richesses s'accroissent, n'y attachez pas votre cur » (Ps., 62, 4).(...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Lun 28 Aoû - 22:54 | |
| XVII. DU DÉMON APPELÉ NEGOTIUM, OU TRAFIC SE MOUVANT DANS LES TÉNÈBRES
(...) Et, bien que Notre-Seigneur, par l'exemple du chameau (ou du câble), ait montré qu'il est non seulement difficile, mais impossible à un riche d'entrer dans le royaume des cieux, il assure pourtant que, si c'est impossible pour des hommes, ce ne l'est pas pour Dieu, car « pour Dieu, tout est possible » (Mt., 19, 26 ; Mc., 10, 27). Mais, d'autre part, il décrit le genre de riches qui ne peuvent aller dans le royaume des cieux, disant : « Mes enfants, comme il est difficile à ceux qui s'attachent à l'argent d'entrer dans le royaume de Dieu ! » (Mc., 19, 24).
VINCENT : C'est très vrai, mon oncle. À Dieu ne plaise qu'il en fût autrement, car si tout riche courait un tel danger, le monde serait dans un bien triste état !
ANTOINE : Effectivement, mon cher neveu, je crains qu'il ne soit dans un triste état, car bien peu de gens ne désirent pas être riches, et, parmi ceux qui subissent l'attrait des richesses, il y en a bien peu qui ne s'y attachent passionnément.
VINCENT : Je crains bien que vous n'ayez raison, mon oncle. Mais ce n'est pas ce que j'ai voulu dire. Voici ce que je désirais vous dire. Je ne puis comprendre (le monde étant ce qu'il est et si rempli de gens pauvres), je ne puis comprendre comment un riche peut rester riche sans danger de se damner.
Il a tout le temps sous les yeux des pauvres, à qui il manque ce que lui pourrait leur donner. Or, il est tenu de soulager leur misère, puisqu'il le peut. Saint Ambroise va même jusqu'à dire que laisser mourir quelqu'un sans le secourir équivaut à l'avoir tué. Je ne puis m'empêcher de voir que tout homme riche doit craindre très fort d'être damné, je ne vois pas comment il peut être sauvé aussi longtemps qu'il conserve ses biens. Il pourrait le faire s'il n'y avait des pauvres, il conserverait la faveur de Dieu, comme Abraham, et beaucoup d'autres riches qui dans la suite ont été des hommes vertueux, mais étant donné la grande quantité de pauvres qu'on trouve dans tous les pays, un homme qui garde par devers lui quelque bien doit nécessairement s'attacher beaucoup à la richesse, puisqu'il ne donne pas ses biens aux pauvres comme la charité lui en fait un devoir.
Il me semble, mon oncle, que vos paroles de réconfort s'adressant aux riches qui se font des scrupules et craignent la damnation, ne peuvent guère être utiles.
ANTOINE : Il est souvent difficile, mon cher neveu, de juger une chose sans tenir compte des circonstances. Saint Augustin raconte l'histoire d'un médecin qui administra à un malade un certain médicament qui le soulagea. Le même malade, atteint une seconde fois de la même maladie, reprit lui-même de ce médicament sans l'avis du docteur. Cette fois, le médicament lui fit plus de mal que de bien. Il le raconta au médecin et lui demanda comment c'était possible. « Ce médicament, répliqua le praticien, ne te fit aucun bien, parce que tu le pris sans que je te l'ordonnasse ! » Saint Augustin approuve cette réponse car, si le remède était pareil, la maladie, elle, pouvait présenter des aspects différents de la première fois sans que le malade en fût conscient. Bien des facteurs pouvaient intervenir que le docteur eût perçus et en raison desquels il n'eût pas donné le même médicament que la première fois.
Et ce qui concerne ce démon nommé « trafic », il serait vraiment long de passer en revue les circonstances qui devraient être examinées et pesées. Mais je parlerai un peu de ce que vous avez demandé, ensuite nous irons dîner. (...)
Source : livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Mar 29 Aoû - 22:48 | |
| XVII. DU DÉMON APPELÉ NEGOTIUM, OU TRAFIC SE MOUVANT DANS LES TÉNÈBRES
(...)Je vous dirai d'abord, mon cher neveu, que le riche qui conserve ses biens a, je pense, sujet d'être effrayé. Pourtant, ce sont ceux-là qui craignent le moins. Ils sont loin d'être des hommes de bien, puisqu'ils gardent tout. Ils sont loin de la charité et sont peu généreux ; le plus souvent même ils ne le sont pas du tout. Mais votre propos n'est pas de délibérer sur le cas du riche avare qui garde tous ses biens mais de savoir si nous devons souffrir que d'autres, plus scrupuleux, aient peur de la damnation (cette peur elle-même étant dangereuse) parce qu'ils conservent une grande part de leurs biens. Car, si ce qu'ils gardent les met dans un état de damnation, alors les prêtres doivent les avertir comme Dieu le leur a ordonné par la bouche d'Ezéchiel : « Si, quand je dis au méchant : « Tu vas mourir », tu ne l'avertis pas, si tu ne parles pas pour avertir le méchant d'abandonner sa conduite mauvaise afin qu'il vive, lui mourra, mais c'est à toi que je demanderai compte de son sang » (Ez., 3, 18).
Mais, mon cher neveu, si Dieu a invité tous les hommes à le suivre dans la pauvreté, s'il a recommandé de tout abandonner pour l'amour de lui, car c'est par le détachement des biens de ce monde qu'on peut le plus rapidement atteindre la perfection spirituelle, la soif des choses célestes, il n'ordonne cependant pas cette pauvreté, ce détachement ; il ne menace pas de la damnation ceux qui ne le suivraient pas sur cette voie. Car s'il dit : « Celui qui n'abandonne pas tout ce qu'il a, ne peut être mon disciple » (Mt., 19, 29 ; Mc., 10, 29 ; Lc., 18, 29), il avait, un peu avant, expliqué sa pensée en disant : « Celui qui vient à moi sans haïr son père, sa mère, sa femme, ses frères, ses surs et même sa propre vie ne peut être mon disciple » (Lc., 14, 26 ; Mt., 10, 37 ; 19, 29).
Ici, Notre-Seigneur nous signifie que personne ne peut être son disciple à moins de l'aimer, lui, beaucoup plus que sa propre famille et par-dessus sa propre vie. Plutôt que de l'abandonner, lui, il faut les laisser tous. Donc, ne peut être le disciple du Christ quiconque refuse de se détacher de tout ce à quoi il tient plutôt que de déplaire mortellement à Dieu en s'efforçant de s'en conserver une parcelle. Le Christ nous enseigne d'aimer Dieu par-dessus toutes choses, et celui qui garde quelque chose pour soi montre qu'il n'aime pas Dieu, puisqu'il préfère cette chose à Dieu, puisqu'il préfère perdre Dieu que de perdre cela. Mais, comme je l'ai dit, je ne vois nulle part de commandement ordonnant de tout quitter, ni qu'il soit interdit à tout le monde d'être riche, ou de posséder des biens.
« Il y a, dit Notre-Seigneur, plusieurs demeures dans la maison du Père » (Jn., 14, 12). Heureux celui qui pourra habiter même la moindre. Il semble bien, d'après l'Évangile, que ceux qui souffrent patiemment la disette ne seront pas seulement au-dessus de ceux qui, ici-bas, vivent dans l'abondance, mais aussi que le ciel, de quelque manière, leur appartient plus et qu'il est préparé pour eux plus spécialement que pour les riches. Car Dieu conseille en quelque sorte aux riches de s'acheter le ciel quand il leur dit : « Faites-vous des amis avec la richesse malhonnête, afin qu'au jour où elle viendra à manquer, ces amis vous accueillent dans les tentes éternelles » (Lc., 16, 19).
Pourtant, en ce qui concerne la fortune et la pauvreté, si un riche et un pauvre sont tous deux des êtres bons, il se peut que le riche surpasse le pauvre de quelque manière et qu'au ciel il soit mieux considéré que lui. Abraham et Lazare en sont la preuve. (...)
Source : livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Jeu 31 Aoû - 0:31 | |
| XVII. DU DÉMON APPELÉ NEGOTIUM, OU TRAFIC SE MOUVANT DANS LES TÉNÈBRES
(...) Je ne dis pas ceci pour encourager les riches à amasser des richesses ; ils n'ont guère besoin d'y être encouragés. Mais je parle pour les hommes vertueux, à qui Dieu donne de la fortune et l'esprit d'en bien disposer, sans toutefois leur inspirer de distribuer sur-le-champ tous leurs biens ; au contraire, pour dès raisons sérieuses, il les invite à en garder quelque portion. Qu'ils ne désespèrent pas de la faveur de Dieu s'ils ne se dépouillent pas de leurs biens, Dieu le recommande, il ne l'a pas ordonné, il ne les oblige à le faire par aucun commandement.
Voyez Zachée qui grimpa dans un arbre, tant il désirait voir Notre-Seigneur : le Christ l'appela à haute voix et lui dit : « Zachée, descends vite, car il me faut aujourd'hui m'arrêter dans ta maison » (Lc., 19, sqq). Il se réjouit et fut touché d'une grâce spéciale. La foule murmura parce que le Christ parlait familièrement à cet homme, les gens étaient choqués de son offre de se rendre chez lui, car Zachée était le chef des publicains, qui étaient collecteurs d'impôts pour le compte de l'empereur, et qui avaient la réputation d'être malhonnêtes ; or, Zachée n'était pas seulement le chef de la compagnie ; il était aussi très riche ; et, à cause de cela, les gens le considéraient comme un pécheur, comme un homme très méchant. Mais Zachée eut tôt fait de leur prouver combien cette opinion qu'ils se faisaient de lui était téméraire et sans fondement. La foule ne pouvait pas voir le fond de son âme, elle ne pouvait voir le changement opéré en lui par ces mots que Notre-Seigneur lui adressa. Quel qu'il ait été auparavant, à ce moment, il devint bon. Il se dépêcha de descendre de son arbre et accueillit le Christ joyeusement en disant : « Seigneur, je donne la moitié de mes biens aux pauvres et, si j'ai fait tort à quelqu'un, je lui rendrai le quadruple. »
VINCENT : C'était fort bien dit, pourtant je me demande pourquoi Zachée employa ces mots dans cet ordre là. Il me semble qu'il aurait pu parler de restitution avant de parler de charité. Car la restitution est, vous le savez, un devoir, alors qu'on est libre de faire la charité ou de ne la point faire. Je m'étonne qu'il n'ait pas parlé d'abord de restituer à ceux qu'il avait lésés et ensuite de faire la charité avec ce qui lui restait, car cela seul était sa propriété.
ANTOINE : Votre remarque se justifie s'il s'agit d'un homme qui ne peut faire les deux. Mais celui qui le peut, n'est nullement obligé de laisser sans le secourir le pauvre qui l'appelle et de se mettre d'abord à la recherche de ses créanciers. Il est toujours bon de faire quelque bien tout de suite, quand nous y pensons ; la grâce ainsi fructifiera bien mieux en nous.
Voilà ce que j'aurais dit si l'homme avait donné la moitié de ses biens avant de parler de restitution. Mais Zachée a peut-être restitué d'abord ; peut-être n'est-ce qu'en paroles qu'il plaça la charité en premier, et encore mentionne-t-il les deux dans la même phrase. Mais dites-vous bien, mon cher neveu, que l'Esprit-Saint a guidé la langue de Zachée quand il prononça ces paroles si bien que la sentence du Sage se vérifie une fois de plus : « C'est à Dieu qu'il appartient de diriger la langue des mortels » (Pr., 20, 24). En effet, quand Zachée a dit premièrement qu'il donnerait la moitié de ses biens aux pauvres et puis que, non seulement il dédommagerait tous ceux qu'il avait lésés, mais qu'en plus, il leur donnerait trois fois autant, il a bien montré que les soupçons de la foule n'étaient pas fondés. Les gens le considéraient comme si mauvais qu'ils croyaient tous ses biens mal acquis parce qu'il s'était enrichi dans une profession où s'exerçait couramment la malhonnêteté. (...)
Source : livres-mystiques.com
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Ven 1 Sep - 1:08 | |
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(...) Mais on vit bien le contraire lorsqu'il déclara que même quand il aurait donné la moitié de ses biens il pourrait dédommager ses créanciers sans pour cela devenir un mendiant. Plût à Dieu, mon cher neveu, que chaque riche chrétien qui a la réputation d'être honorable fût capable de se comporter comme promit de le faire le petit Zachée, ce publicain, c'est-à-dire avec moins de la moitié de ses biens dédommager au quadruple ceux qu'il avait lésés !
Je vous assure que les créditeurs seraient contents et pardonneraient même s'ils étaient simplement remboursés. Or c'était un des points sur lesquels l'ancienne loi différait de l'enseignement du Christ. Les chrétiens, en effet, ne doivent pas exiger qu'on leur rembourse jusqu'au dernier sou, ils doivent savoir remettre.
Mais revenons à Zachée. Il ne promit ni d'abandonner toute sa fortune, ni de se faire mendiant, ni de quitter son emploi. Il ne le remplissait pas de façon aussi pure que saint Jean-Baptiste l'avait enseigné aux publicains : « N'exigez rien au delà de ce qui vous est fixé » (Lc., 3, 12). Pourtant il a pu employer légalement son bien, qu'il avait l'intention de garder, et pouvait légalement remplir son métier, qui était de percevoir les impôts selon les paroles du Christ : « Rendez à César ce qui est à César » (Mt., 22, 21 ; Mc., 12, 17 ; Lc., 20, 25) et ne se livrer à aucune exaction, à aucune malhonnêteté. Notre-Seigneur, approuvant les bonnes intentions de Zachée, lui dit : « Aujourd'hui, cette maison a reçu le salut. Celui-ci aussi est un fils d'Abraham. »
Mais je n'oublie pas, mon cher neveu, ce que vous m'avez concédé : qu'un homme peut être riche sans être pour cela privé de la grâce ni se voir retirer la faveur de Dieu. Mais en somme, vous ne me faites cette concession qu'à condition de rester dans le vague, mais maintenant, en ce cas précis, vous estimez qu'un riche ne peut en conscience garder ses richesses alors qu'autour de lui, il y a des pauvres.
Vraiment, mon cher neveu, si vous avez raison, j'ose affirmer que le monde ne fut jamais si prospère qu'un riche pût garder quelque bien sans danger d'être damné. Le Christ nous l'a du reste affirmé « Des pauvres, vous en aurez toujours avec vous, à qui vous pourrez faire du bien » Mt., 26, 11 ; Mc., 14, 7 ; Jn., 12, 8 Si vous aviez raison, à aucun moment, à aucun endroit un homme ne pourrait être riche sans courir le risque de la damnation éternelle, à cause de ses seules richesses et quels que soient ses mérites.
Mais, mon cher neveu, il faut des riches. Autrement, pardi, il y aurait encore plus de mendiants et personne ne pourrait plus secourir personne. Écoutez bien ceci, cela me paraît être un argument très sûr : si tout l'argent du pays était rassemblé en un tas et divisé en parts égales, demain, ce serait pire encore, car, quand tout aurait été divisé également entre tout le monde, les plus riches ne seraient guère mieux que ne sont actuellement les gueux, et ceux qui étaient des mendiants avant, ne seraient pas devenus beaucoup plus riches. Mais beaucoup de riches dont la fortune ne consistait qu'en biens meubles seraient délivrés de la richesse peut-être pour toute leur vie !
Vous savez très bien, mon cher neveu, que les hommes ne peuvent pas vivre si on ne leur procure un moyen d'existence. Chacun ne peut posséder un navire, un marchand doit avoir des stocks, chacun ne peut avoir une charrue. Et qui ferait vivre le tailleur si personne ne pouvait s'offrir un habit ? Qui voudrait se faire maçon ou charpentier, si personne ne pouvait bâtir une église ou une maison ? Qui ferait tourner les métiers à tisser s'il n'y avait plus de gens aisés ? (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Ven 1 Sep - 22:18 | |
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(...) Pour un homme qui n'a pas deux ducats dans sa maison, mieux vaut encore les perdre que de voir le riche qui l'emploie perdre la moitié de son bien, car alors le pauvre perdrait son travail. C'est l'argent du riche qui est le moyen d'existence du pauvre. On pourrait rappeler, à propos du pauvre, une fable d'Esope. Une femme avait une poule qui pondait chaque jour un uf d'or. Un jour, elle voulut avoir beaucoup de ces ufs en une seule fois. Alors, elle tua la poule. Mais dans le ventre de la poule elle ne trouva qu'un ou deux ufs et ce fut la fin de sa fortune.
Maintenant, mon cher neveu, revenons-en à votre question : « Comment un homme peut-il garder par devers lui des richesses quand il voit autour de lui tant de pauvres à qui il pourrait les distribuer ? » Eh bien ! en conscience, s'il doit donner le plus possible, il ne pourrait cependant donner à tous. Tout homme riche sait que toute misère qu'il voit lui est spécialement confiée par un ordre de Notre-Seigneur : « Donne à celui qui te demande » (Mt., 5, 42 ; Lc., 6, 30). Il doit donc donner à tout mendiant qui lui demande, aussi longtemps qu'il lui restera un sou en poche. Mais, mon cher neveu, cette parole a besoin d'être interprétée. Écoutons saint Augustin : « Si le Christ dit : Donne à tous ceux qui demandent, il ne dit pourtant pas : Donne-leur autant qu'ils demandent » Il me paraît tout aussi évident que si je me sentais obligé de donner à tous sans exception, il ne me resterait plus rien pour moi.
Notre-Seigneur, à ce passage du sixième chapitre de saint Luc, parle à la fois du mépris que nous devrions avoir au cur pour tous les biens de la terre et aussi de la manière dont il faut en user avec les ennemis. C'est là qu'il nous ordonne d'aimer nos ennemis, de bénir ceux qui nous maudissent, de ne pas nous contenter de supporter patiemment le mal qu'on nous fait (que ce soit à notre corps ou à notre fortune), mais aussi d'être prêts à subir le double et même de rendre le bien pour le mal. Et parmi ces choses, il nous ordonne de donner à tous ceux qui demandent, ce qui signifie que, quand nous pouvons faire du bien, nous ne devons pas refuser, quel que soit celui qui demande, même si c'est notre ennemi mortel, si nous voyons que sans notre secours il est en danger de périr. C'est pourquoi saint Paul dit : « Si ton ennemi a faim, donne-lui à manger » (Rm., 12, 20). (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Dim 3 Sep - 1:08 | |
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(...) Mais, bien que je sois obligé de donner à chaque homme en considération de son genre de besoin, qu'il soit ami ou ennemi, chrétien ou païen, je ne suis pourtant pas lié pareillement à chacun, ni tenu de considérer chaque cas de la même façon, mais comme j'ai commencé à vous l'expliquer, les circonstances sont très importantes en cette matière.
Saint Paul dit : « Celui qui n'a pas soin des siens est pire qu'un infidèle » (1 Tm., 5, 8 Les siens, les nôtres, cela signifie ceux qui sont à notre charge, soit par la nature, soit par la loi, ou encore par un commandement de Dieu ; par la nature, ce sont nos enfants ; par la loi, nos domestiques. Les deux ne sont pas nôtres de la même façon, mais je pense que si nos serviteurs sont dans le besoin, nous devons veiller à leur bien-être, à ce qu'ils ne manquent pas du nécessaire. S'ils tombent malades pendant qu'ils sont à notre service, nous ne pouvons pas les renvoyer, même s'ils sont incapables de faire leur travail. Ce serait inhumain. Supposons même qu'un homme, un simple passant qui serait entré chez moi, tombe malade sous mon toit, je me sentirais obligé de le garder et de le prier de réparer ses forces, quoiqu'il m'en coûtât, plutôt que de le mettre à la porte dans cet état, au péril de sa vie. Car il est mon hôte et je reconnais en avoir la charge ; c'est Dieu qui l'a envoyé vers moi.
C'est par un commandement de Dieu que nos parents sont à notre charge, et c'est par la nature que nous sommes à la leur. Comme le dit saint Paul : « Ce n'est pas aux enfants à pourvoir aux besoins de leurs parents mais aux parents à pourvoir aux besoins de leurs enfants » (2 Co., 12, 19). Je veux dire par là qu'ils doivent leur donner une bonne éducation, un bon métier, qui leur permettra de vivre dans la vérité, et dans la grâce de Dieu, mais il ne s'agit pas pour les parents d'amasser pour leurs enfants de telle façon qu'ils se comportent mal envers Dieu.
Au contraire, si les parents voient que les enfants, à cause d'une vie trop facile, prennent de mauvaises habitudes, ils doivent se montrer beaucoup plus stricts. La nature n'a pas mis les parents à la charge des enfants, pourtant ce n'est pas seulement pour obéir à Dieu que les enfants doivent avoir envers leurs parents une attitude déférente, c'est la nature elle-même qui les y oblige, comme elle les oblige à les soutenir dans leurs besoins.(...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Dim 3 Sep - 20:35 | |
| XVII. DU DÉMON APPELÉ NEGOTIUM, OU TRAFIC SE MOUVANT DANS LES TÉNÈBRES
(...) Mais les besoins de mon père peuvent être minimes et ceux d'un autre homme si grands et si pressants que Dieu et la nature exigent que devant l'inégalité de ces besoins je me porte au secours du plus malheureux et soulage d'abord le besoin urgent, oui, même s'il s'agit de mon ennemi, même si c'est un ennemi de Dieu, un Turc ou un Sarrasin.
Mais maintenant, cher neveu, en dehors de cette extrême nécessité connue de moi, je ne suis pas obligé de donner à chaque mendiant qui me demandera, ni de croire chaque imposteur que je rencontrerai dans la rue et qui se prétendra très malade, ni de croire que tous les pauvres gens sont confiés à ma seule charge et que personne ne leur donnera rien avant que moi je leur aie donné tout. Je ne suis pas tenu d'avoir si mauvaise opinion des autres et de croire que si je n'aide pas moi-même les pauvres tout de suite, ils manqueront de tout, comme si j'étais seul à pouvoir faire la charité.
VINCENT : Alors, mon oncle, bien des gens seront peut-être tout contents, dans de tels cas, d'attribuer à leurs voisins des intentions bonnes et, de cette façon, de se sentir libérés de l'obligation de donner quoi que ce soit.
ANTOINE : C'est vrai, mon cher neveu, certains seront heureux de le penser ou de faire comme s'ils le pensaient. Mais ceux qui sont heureux de ne rien donner ne comptent pas, ils ne nous intéressent pas. Ce sont les gens vertueux qui nous intéressent, qui, en gardant leurs biens, ont grand' peur d'offenser Dieu. C'est pour tranquilliser leur conscience que je parle maintenant, je voudrais leur faire comprendre comment, tout en conservant leurs biens, ils peuvent rester en état de grâce.
Je vous dirai donc, cher neveu, qu'un homme riche qui se glorifie d'être riche, qui en tire vanité, qui méprise celui qui est moins riche que lui, celui-là est ridicule et en définitive, bien mauvais. Mais d'un autre côté, voici un homme (Dieu veuille qu'il y en ait beaucoup comme lui !) qui n'aime pas les richesses, mais, tout en en ayant abondamment, il n'y prend pas grand plaisir, il se comporte comme s'il n'en possédait pas. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Lun 4 Sep - 23:02 | |
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(...) Dans le privé, il vit dans l'abstinence, sans toutefois le faire ouvertement, afin de ne pas paraître hypocrite. Ainsi, il pourra protester, comme le fit la reine Esther, qu'il n'agit pas pour son plaisir mais avec bonne volonté, qu'il renoncerait volontiers à ces richesses, mais qu'il les conserve pour en faire profiter son entourage : cet argent l'aide à avoir une maison bien tenue, de façon chrétienne ; c'est grâce à cet argent qu'il peut donner du travail à d'autres qui, grâce à lui, gagnent mieux leur vie. Si un tel homme existe, il me semble que, tout en restant riche, il égale en mérites ceux qui abandonnent tout. Ce serait du moins ainsi, s'il n'y avait, attachés à l'abandon des richesses, des mérites plus agréables à Dieu, par exemple une plus grande ferveur, une vie spirituelle plus active, en raison du fait qu'on a abandonné tout intérêt pour les choses terrestres. C'est pour cette raison que la part de Marie-Madeleine était la meilleure, autrement le Christ l'aurait encouragée à aider sa sur Marthe à préparer le dîner plutôt que de rester assise à ne rien faire.
Maintenant, si celui qui possède des richesses n'a pas une conscience aussi parfaite, s'il préfère se mettre à l'abri du besoin, s'il n'est pas décidé à abandonner son plaisir aussi pleinement qu'une conscience chrétienne le demande, eh bien !, que voulez-vous, l'homme est tellement moins parfait que je ne souhaiterais, et peut-être que lui-même le souhaiterait ! Il est bien moins facile de l'être que de souhaiter l'être. Mais il n'est pas pour cela sur la voie de la damnation.
Il ne suffit pas non plus de tout quitter et d'entrer en religion pour être instantanément délivré de toute attache terrestre. Bien des moines qui avaient spontanément abandonné leur position honorable ont dû, par la suite, lutter contre le désir d'obtenir, dans leur couvent, la position de sacristain ou même celle de cellérier, pour détenir une parcelle de pouvoir, ne fût-ce que sur les estomacs. Mais Dieu est indulgent pour les imperfections humaines, si toutefois l'homme reconnaît ses défauts et travaille à s'en corriger progressivement. Il ne rejettera pas celui qui a tendance à se satisfaire. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Mer 6 Sep - 1:02 | |
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(...) Pour en finir avec ce démon que le prophète appelle « trafic se mouvant dans les ténèbres », je vous dirai, mon cher neveu, que si un homme désire servir Dieu et lui plaire, s'il préfère perdre ses biens plutôt que de déplaire à Dieu, s'il est prêt à tout abandonner au cas où Dieu le lui ordonnerait, s'il est prêt à supporter patiemment de voir Dieu lui retirer tout, s'il s'efforce d'employer ses biens comme il plaît à Dieu, s'il essaie de s'informer pour savoir comment en user pour plaire à Dieu, s'il écoute de temps en temps les conseils d'hommes vertueux, eh bien ! même si cet homme n'abandonne pas tous ses biens, même s'il ne donne pas à tous ceux qui lui demandent, même si, dans son entourage, on pense que la charité qu'il fait est beaucoup trop peu, pourtant, malgré tout, cet homme peut espérer en l'aide de Dieu. La vérité de Dieu l'entourera comme un bouclier (Ps., 91), il n'aura plus à craindre les pièges et les tentations du démon que le prophète appelle « trafic se mouvant dans les ténèbres ». Malgré toutes ses richesses, il évitera les pièges et les tentations, si bien que, par la grâce du Dieu tout-puissant, il finira bien par aller en paradis.
Je pensais, mon cher neveu, qu'après ce discours je commanderais mon déjeuner, mais voyez : je n'aurai même pas à le faire, car voici qu'on me l'apporte déjà.
VINCENT : Vraiment, mon oncle, il semble que Dieu dirige lui-même votre emploi du temps !
ANTOINE : Mon cher neveu, nous allons dire le bénédicité et, pendant un moment, nous interromprons notre conversation pour savourer notre repas. Ensuite, vous connaissez mon habitude, je ne vous dirai pas adieu, je disparaîtrai pour dormir. Mais vous savez que je ne dors jamais longtemps dans l'après-midi. Après quoi, nous achèverons notre conversation à loisir.
VINCENT : Je vous en prie, mon oncle, reposez-vous comme vous en avez l'habitude, sans vous inquiéter de moi. Je profiterai de ce moment pour faire une course.
ANTOINE : VOUS ferez comme il vous plaira. Mais, je vous en prie, ne restez pas trop longtemps parti.
VINCENT : Soyez sans crainte, mon oncle, j'ai trop envie de connaître la dernière partie. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Jeu 7 Sep - 9:20 | |
| LIVRE III DU DIALOGUE DU RÉCONFORT DANS LES TRIBULATIONS
VINCENT : J'ai quelque peu tardé, mon oncle, parce que je craignais de vous importuner par une visite trop matinale, mais surtout je fus retardé par quelqu'un qui m'a montré une lettre datée de Constantinople. Par cette lettre, il apparaît que le Grand Turc prépare une armée d'une très grande puissance. Contre qui veut-il la lancer ? Personne n'en sait rien. Mais je crains bien que ce ne soit contre nous. Pourtant, notre informateur dit que le bruit court sous le manteau, à Constantinople, que cette armée doit embarquer en direction de Naples ou de la Sicile.
ANTOINE : Cher neveu, une lettre d'un Vénitien, datée de Constantinople peut très bien avoir été rédigée à Venise. Il arrive des missives de Venise ou de Rome, ou d'ailleurs encore, qui toutes annoncent que les Turcs sont sur le point d'attaquer. En réalité ceux qui répandent de telles nouvelles ne poursuivent d'autre fin que d'avancer leurs propres affaires.
D'autre part, le Grand Turc tient en réserve une telle quantité de soldats qu'il est bien obligé de les faire changer de cantonnement, de les diviser, et de les regrouper différemment, de crainte qu'ils ne se connaissent trop bien entre eux ou n'imaginent quelque nouveauté. Ce lui est aussi un moyen de tromper ses adversaires, de les empêcher de se préparer à lui résister. Ceux-ci, en effet, lui voient un visage belliqueux alors qu'il n'a nulle intention de passer à l'offensive, si bien que lorsqu'il attaque effectivement, on ne le craint plus.
Il n'en est pas moins probable, cher neveu, qu'il se dirigera vers le royaume de Hongrie. Il n'y a, pour lui, dans toute la chrétienté, proie plus tentante ni plus facile. Et d'ailleurs, nous l'appelons parmi nous, comme les moutons d'Esope prièrent le loup de les garder des chiens.
VINCENT : Alors, cher oncle, nous devons nous attendre à subir toutes ces épreuves dont je vous ai parlé dans notre première conversation.
ANTOINE : Cela ne peut manquer d'arriver, cher neveu, mais pas tout de suite, car le Grand Turc nous envahira sous couleur de soutenir un parti contre l'autre. Il ne se découvrira que plus tard, quand l'occasion lui en sera fournie. Vous verrez que cette occasion il l'aura directement et sans laisser à l'adversaire le temps de se ressaisir.
VINCENT : Pourtant, cher oncle, on dit qu'il n'oblige personne à abandonner sa foi.(...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Ven 8 Sep - 0:12 | |
| LIVRE III DU DIALOGUE DU RÉCONFORT DANS LES TRIBULATIONS ANTOINE : Personne ? Cher Vincent, ceux qui vous ont informé de la sorte, en disent plus qu'ils n'en peuvent savoir. Le Grand Turc, au cours de la cérémonie de l'investissement, fait solennellement le serment d'affaiblir la chrétienté et de répandre la religion de Mahomet.
Pourtant, ce n'est pas sa manière d'obliger tous les habitants d'un pays à abjurer simultanément leur foi. Il lui est arrivé, dans certaines régions, de prélever un tribut annuel et de laisser les habitants vivre comme ils l'entendaient.
Dans d'autres, les Turcs emmènent toute la population et la dispersent dans des régions à eux et les gens sont ainsi réduits en esclavage, très loin de chez eux, sans espoir de retour. Dans les pays très peuplés, il détruit la noblesse et donne le pays en partie à ceux qu'il amène avec lui, en partie à ceux qui acceptent d'abjurer leur foi. Les autres, il les maintient dans une telle misère qu'il eût mieux valu pour eux qu'ils fussent morts au moment de l'invasion. Il ne tolère les chrétiens que s'ils se font marchands, ou s'ils l'aident dans ses guerres.
Dans les pays chrétiens qu'il ne traite pas en vassaux, comme Chypre, Chio et la Crète, mais qu'il considère comme une véritable conquête et occupe totalement comme la Morée, la Grèce, la Macédoine, et d'autres parmi lesquels se rangera, je le crains, la Hongrie, dans tous ces pays il traite les chrétiens de différentes façons.
On les laisse où ils sont, parce qu'ils seraient trop nombreux pour qu'on puisse les emmener tous, ou les tuer tous, à moins que les occupants ne veuillent dépeupler la région et y transplanter des populations turques. Ceux qui ne veulent pas abjurer la religion du Christ (que son nom soit béni et qu'il nous garde dans la foi !) le Turc les laisse vivre en paix.
Mais il ne s'agit pas d'une paix véritable. Il ne leur permet la possession d'aucune terre, ils ne peuvent avoir aucune charge honorable ; et, sous prétexte de guerres, ils sont écrasés d'impôts. On leur arrache leurs enfants et on en abuse.
Des jeunes filles on fait des prostituées, les garçons deviennent soldats, parfois on les fait châtrer, non pas par l'ablation partielle des organes génitaux, comme on le faisait dans l'antiquité, mais en les amputant totalement. Combien survivent, on ne s'en soucie nullement. Et tous ceux qui sont enlevés jeunes à leurs parents sont confiés à des Turcs ou à des renégats, si bien que tous renient la foi du Christ. (...)
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| Sujet: Re: Dialogue du réconfort dans les tribulations de Saint Thomas More Sam 9 Sep - 0:42 | |
| LIVRE III DU DIALOGUE DU RÉCONFORT DANS LES TRIBULATIONS
ANTOINE : (...) Il arrive aussi que les chrétiens soient traités de telle façon qu'ils ont en vérité une triste fin. Car, en plus des tracasseries que les chrétiens renégats infligent aux bons chrétiens qui persévèrent dans leur foi, ils trouvent moyen parfois de faire dire par des gens à leur solde que tel ou tel chrétien a prononcé des paroles injurieuses envers Mahomet. Ce faux témoignage sera pour eux l'occasion d'obliger ce chrétien à renier le Christ et à le forcer à embrasser leur honteuse religion, sans quoi ils le mettront à mort, dans de cruels tourments.
VINCENT : Que le Seigneur dans sa grande miséricorde nous garde de ces misérables ! Car, par ma foi, s'ils viennent par ici, il me semble à plus d'un signe que je vois des gens prêts à leur tomber dans les bras. Comme on voit avant l'orage, la mer s'agiter et mugir même avant que le vent s'élève, ainsi il me semble que j'entends autour de moi des gens qui, naguère encore, haïssaient le nom de Turc autant que le nom du diable, commencer à lui trouver bien peu de défauts et, même insensiblement, se mettre à le louer autant qu'ils le peuvent, et à critiquer la chrétienté à tous les échelons : les prêtres, les princes, les rites, les cérémonies, les sacrements, les lois, les coutumes spirituelles, temporelles et tout ce que fait l'Église.
ANTOINE : En vérité, mon cher neveu, c'est ainsi que nous nous comportons depuis peu. Les choses se sont gâtées dans ce pays depuis que la couronne a été mise en question. La Hongrie continuera à aller à vau-l'eau aussi longtemps que les gens se tourneront vers des idées de changement et de subversion. Je n'aime pas que leurs paroles les portent au-devant du Grand Turc, eux qui le haïssaient naguère, comme devrait le faire tout vrai chrétien.
On dit à Buda, (et je suis assez âgé pour vous affirmer que cela s'est vérifié) que lorsque les enfants se mettent à jouer à l'enterrement, à faire le simulacre de porter des corps à l'église et de chanter à leur façon enfantine un chant funèbre, on dit alors qu'un grand malheur est proche. Deux ou trois fois, je m'en souviens, des enfants se sont groupés et ont joué à se battre comme de véritables soldats ; et après ces batailles pour rire, assez violentes toutefois pour que des marmots y fussent blessés, de véritables guerres ont éclaté. Vous parliez tout à l'heure de la mer et des signes avant-coureurs de la tempête, on pourrait en rapprocher ces deux formes de présages dont le sens secret nous échappe.
Mais, par sainte Marie, mon neveu, je n'aime pas ces présages, je ne parle pas des jeux des enfants, mais des paroles répandues à si haute voix en faveur de Mahomet dans ce royaume de Hongrie, qui fut jusqu'à présent un bastion de la chrétienté. Je crains fort que les Turcs ne mettent que quelques années à conquérir le pays tout entier. (...)
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